Depuis le déclenchement des manifestations pacifiques lancées par l’opposition pour dénoncer la mascarade électorale en cours entre UNIR et ses sous-traitants avec la bénédiction de la CEDEAO, une vague de répression, sanglantes s’abat sur les manifestants à travers le pays. Que ce soit à Sokodé, Bafilo, Anié Kpalimé, Agoè et une partie de Lomé, les militaires en tenues de guerre n’hésitent pas à ouvrir le feu à balles réelles sur les manifestants.
Les images d’horreurs qui font le tour du monde et alimentent la presse et la toile renseignent tous les observateurs sur la jungle qu’est devenu le Togo sous le règne interminable des Gnassingbé. Exactions, exécutions, usages de balles réelles, torture, incendie des boutiques, arrestations et mandat de dépôts avec l’aval des juges corrompus à la solde d’un système pourri, voilà le sort macabre qui est réservé à ces Togolais qui s’opposent ouvertement au régime RPT/UNIR et à la farce électorale en cours.
Le safari macabre d’Agoè-Zongo et le film des évènements
La répression sauvage des manifestations de la C14 a connu sa première victime à Agoè-Zongo. Un jeune mécanicien de 11 ans nommé Idrissou Moufidou. Il s’apprêtait à prendre son petit déjeûner qu’il venait d’acheter lorsqu’il a été fauché par une balle. Ses collègues voyant foncer la voiture sur le garage, ont eu le temps de se mettre à l’abri. Lui non malheureusement. Plus de 400 m plus loin, un second individu a été également fauché par balles avant que la voiture et les occupants qui faisaient la ronde macabre, tel dans un safari, ne se soient envolés en trombe dans la nature.
Tous les témoins sur place, à savoir journalistes, cameramen responsables de droits de l’homme ont identifié formellement le chef d’Etat-major à bord de la voiture 4X4 noire de marque Dodge dont un des occupants ouvrait le feu sur les manifestants. Les auteurs du crime quittent les lieux et les populations se précipitent autour du corps du jeune mécanicien abattu. Les forces de l’ordre présents sur les lieux rendent compte rapidement à leurs hiérarchie dans les moindres détails. Le ministre de la Sécurité et de la Protection civile est informé du drame et du nom de l’auteur. Cette sortie macabre du chef d’Etat-major est d’une extrême gravité et il faut trouver une formule pour dissimuler la vérité. C’est en ce moment que Yark Damehame rentre en jeu et de manière maladroite, comme il sait le faire.
Les mensonges de Yark Damehane
Dans la soirée sur RFI le ministre de la Sécurité et de la Protection civile attribue l’assassinat de l’enfant de 11 ans à des occupants d’une voiture 4X4 noire sans plaque qui était sur les lieux. Il pensait ainsi disculper le Chef d’Etat-major des FAT et même nier sa présence sur les lieux. A l’instant où il tenait ces déclarations, il ne s’imaginait pas un seul instant qu’une vidéo qui a immortalisé le passage du patron des FAT devait être mise sur la toile.
Après la mise en ligne de la vidéo, ne pouvant plus nier les faits, il revient sur les médias pour avouer enfin que le Chef d’Etat-major des FAT était sur les lieux pour contrôler le dispositif sécuritaire et qu’il n’a jamais fait usage d’une arme à feu. Il ajoute sans scrupule que la vidéo serait un montage. Cette sortie, tout comme la première, vise toujours à disculper le Général Felix Abalo Kadangha, accusé d’avoir tiré à bout portant sur le gamin. Cette deuxième sortie s’est également révélée comme un gros mensonge, puisqu’une seconde vidéo mise en ligne montre bien que les occupants de la voiture ouvraient le feu sur les manifestants, ce que Yark Damhame a réfuté dans sa première intervention.
La vérité sur la présence d’une ou deux voitures sur les lieux
Selon les investigations de la Rédaction de L’Alternative qui a recueilli même les témoignages de certains agents des forces de l’ordre présents sur les lieux sous le sceau de l’anonymat il y a effectivement eu deux voitures 4X4 sur les lieux, mais pas au même moment. Lorsque la première voiture 4X4 dans laquelle se trouvait le Chef d’Etat-major a fini sa mission macabre et s’est retirée, un compte rendu a été fait au ministre de la Sécurité. C’est quelque temps après les assassinats qu’une autre 4×4 sans plaque noire, avec des individus en civil à son bord, est arrivée pour faire la ronde sur les lieux avant de disparaitre. Selon ces agents, la vraie mission de cette seconde 4X4 était en réalité de brouiller les pistes sur la présence de la première.
La question est donc de savoir qui a envoyé la seconde 4X4 sans plaque sur les lieux après que le crime soit déjà commis ? Et comme par hasard, c’est la présence de la seconde voiture que le ministre de la Sécurité s’est empressé de servir à RFI avant que la vidéo ne le mette à nu. Il ne fait l’ombre d’aucun doute qu’un responsable de l’appareil sécuritaire a envoyé cette seconde 4X4 sans plaque sur le terrain pour brouiller les pistes et couvrir le Chef d’Etat-major.
Du reste, connaissant le Togo, il est quasiment impossible vu le quadrillage sécuritaire de la zone d’affrontement entre les forces de l’ordre et les manifestants, qu’une voiture 4X4 puisse d’abord s’infiltrer sur le terrain des opérations, abattre un gamin et ressortir comme si de rien n’étais. C’est un tissu de mensonge cousu avec du fil blanc.
Que cherche un chef d’Etat-major des FAT sur un lieu de manifestations?
Selon les explications bancales du ministre de la Sécurité et de la Protection civile, lorsqu’il y a manifestations, le Chef d’Etat-major a l’habitude de se rendre sur le terrain pour vérifier le dispositif sécuritaire. Est-ce son rôle? Que fait le ministre de la Sécurité lui-même ? Que fait le Directeur Général de la Police ou le Directeur Général de la Gendarmerie nationale ? C’est assez curieux, cette ligne de défense qui ne tient à rien du tout. Au cas où Yark Damehame ne se rappelle plus les prérogatives d’un Chef d’Etat-major d’une armée, lui général de son état, qu’il nous soit permis de les lui rappeler.
Le Chef d’État-major général des armées a pour mission d’assister les armées dans ses attributions relatives à l’emploi des forces. Il est responsable de l’emploi opérationnel des forces. Sous l’autorité du Président de la République togolaise et du gouvernement, et sous réserve des dispositions particulières relatives à la dissuasion, le Chef d’Etat-major des armées assure le commandement des opérations militaires. Il est le conseiller militaire du gouvernement. Sous l’autorité du ministre de la Défense et des Anciens combattants, il est responsable :
1- De l’organisation interarmées et de l’organisation générale des armées. 2- De l’expression du besoin en matière de ressources humaines civiles et militaires des armées et des organismes interarmées.
3- De la définition du format d’ensemble des armées et de leur cohérence capacitaire.
4- De la préparation et de la mise en condition d’emploi des armées. Il définit les objectifs de leur préparation et contrôle leur aptitude à remplir leurs missions. Il élabore les doctrines et concepts d’emploi des équipements et des forces.
5- Du soutien des armées. Il en fixe l’organisation générale et les objectifs. Il assure le maintien en condition opérationnelle des équipements.
6- Du renseignement d’intérêt militaire. Il assure la direction générale de la recherche et de l’exploitation du renseignement militaire et a autorité sur la direction du renseignement militaire. 7- Des relations internationales militaires.
Pour revenir aux gymnastiques de Yark Damehame qui essaye maladroitement de couvrir son supérieur, où est-il dit dans ces prérogatives que le Chef d’Etat-major doit se rendre sur le terrain d’une manifestation politique pour juger du dispositif sécuritaire ? A moins de prendre les Togolais pour des cancres.
Nous sommes en présence d’une usurpation de compétence gravissime d’un sulfureux officier coutumier des faits et décrit par ses collègues comme un homme à la gâchette facile.
La double responsabilité de Faure Gnassingbé
Comment peut-on avoir un tel individu à la tête d’une armée ? Telle est l’interrogation de plusieurs observateurs à la vue de cette vidéo qui fait le tour du monde. Les dérives meurtrières du Général Abalo Kadangha sont les résultats de sa loyauté au système en place. Pour avoir aidé Faure Gnassingbé à neutraliser son demi-frère Kpatcha Gnassingbé en prenant d’assaut son domicile avec des armes de guerre, il a été rapidement récompensé en montant non seulement en grade, mais aussi en fonction.
Il n’est donc pas superflu, le lien familial qui lie le chef d’Etat-major à l’actuel Président de la République. Mais lorsqu’on assume des responsabilités de Président de la République, chef suprême des armées, couplées avec celles du ministre de la Défense et des Anciens combattants, on ne peut pas laisser à la tête de l’armée togolaise un si triste personnage. Maintenant que les faits ne souffrent d’aucune ambiguïté, même si on essaye d’enfumer l’opinion d’une certaine enquête qui, en réalité, n’a pas de raison d’être, on attend de voir la réaction qu’aura le chef suprême des armées par ailleurs ministre de la Défense sur le cas du général qui adore faire le safari en tirant sur les humains, surtout les gamins. Lorsqu’on voit la brutalité des militaires togolais, on comprend désormais d’où leur viennent les ordres.
Il est temps de mettre fin à cette honte nationale qu’est une armée qui prend plaisir à tuer les civils et surtout les enfants. Le corps du jeune Idrissou Moufidou a été déplacé à la morgue de Tsévié et des pressions fortes sont exercées sur les parents pour l’inhumer. Mais la famille résiste.
Il faut une autopsie pour retrouver si elle est encore dans son corps, la balle qui a fauché cet enfant et remonter à l’arme et son propriétaire. On sait de toute façon celui qui adore ce type d’arme dans l’armée togolaise. Que dire sinon rappeler une de ces grandes pensées du Capitaine Isidore Noel Thomas Sankara qui disait : « Un militaire sans formation politique n’est qu’un criminel en puissance»?
Source : www.icilome.com