Riz birman déclaré impropre en Côte d’Ivoire : Des doutes sur les analyses de l’Institut national d’hygiène au Togo

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Riz birman déclaré impropre en Côte d’Ivoire : Des doutes sur les analyses de l’Institut national d’hygiène au Togo

L’odyssée du navire OceanPrincess se termine en Côte d’Ivoire. Après avoir erré quatre (04) mois sur la côte ouest africaine, avec à son bord 18.000 tonnes de riz, le bateau se voit donc infliger un rejet de sa cargaison de la part des autorités ivoiriennes, après la Guinée et le Burkina Faso. Après des analyses effectuées, le riz est jugé impropre à la consommation en Côte d’Ivoire. Il s’ensuit avec effet immédiat, sa destruction. Et pourtant ce même riz est déclaré propre à la consommation par l’Institut national d’hygiène du Togo!

Selon le relevé du chef de laboratoire à l’Institut national d’hygiène (INH) Dr Badziklou Kossi, il s’agit de cinq (05) sacs de riz prélevés dans chaque cale du navire. Après les analyses effectuées, il ressort que « Les échantillons analysés sont de qualité d’hygiène et de sécurité sanitaire satisfaisantes ». « Les produits analysés sont propres pour la consommation humaine et pour l’alimentation animale », a ajouté le chef de laboratoire en guise de conclusion. La boucle est bouclée. Olam a donc reçu un blanc-seing pour écouler son produit. Cependant, la cargaison ne sera jamais déchargée. Après plusieurs tergiversations, les autorités togolaises ont finalement décidé d’opposer un refus de déchargement à Olam. Entre-temps après avoir essayé, en vain, de mouiller au port de Tema au Ghana et d’écouler le riz impropre au Burkina Faso, c’est en Côte d’Ivoire qu’il a accosté.

A la suite des analyses effectuées par les autorités ivoiriennes, la cargaison est déclarée impropre à la consommation et sera détruite. Un revers de plus pour la société Olam. « Le ministère du Commerce, de l’Industrie et de la Promotion des PME porte à la connaissance des populations que l’inspection de la cargaison des 18000 tonnes de riz d’origine birmane déchargée au Port autonome de Lomé du 11 mars au 18 mars 2019 par le navire OceanPrincess, en provenance d’Asie via les ports de Conakry et de Lomé, a révélé des anomalies de qualité », lit-on dans un communiqué rendu public par les autorités ivoiriennes. Elles ajoutent : « En conséquence et conformément aux dispositions de l’article 17 de la loi N°2016-410 du 15 juin 2016 relative à la répression des fraudes et des falsifications en matière de vente de biens ou services, il est procédé à la saisie réelle et la mise sous scellés de ces 18000 tonnes de riz birman et au déclenchement de la procédure de destruction ». Cette mesure soulève des doutes sur la fiabilité des résultats d’analyse issus de l’Institut national d’hygiène du Togo. Il y a des zones dans les laboratoires de l’INH.

Du discrédit sur l’INH.

L’INH sait mieux que ses nombreux patients que la « nourriture est le premier médicament de l’Homme ». Tout ce qui entre dans le corps est objet d’une minutieuse attention. Une moindre négligence peut être fatale. En cela, la responsabilité et la crédibilité de cet institut sont engagées dès qu’il est sollicité à trancher sur une question de santé publique.

Or tel ne semble pas être le cas avec le navire OceanPrincess transportant des tonnes de riz impropre à la consommation. En permettant à la société Olam d’écouler ses produits impropres alors que les autres pays ont interdit le riz birman après des analyses, l’Institut national d’hygiène paraît très spécial et semble fonctionner selon des outils propres à lui. Il se couvre ainsi d’un voile de discrédit auprès des populations qu’il est censé protéger. Toutefois, les responsables du laboratoire ont voulu porter des gants en se réfugiant derrière l’échantillon qui leur a été présenté. Pas convaincant.

L’institut aurait pu décliner la sollicitation en s’abritant derrière la Direction des végétaux du ministère de l’Agriculture qui est habilitée à faire ce genre d’analyse. Mais cette démarche n’a pas été entreprise, et d’une manière unilatérale, il a déclaré le riz propre à la consommation après ses analyses. Alors que les résultats des autres pays contredisent les conclusions du Dr Badziklou Kossi, le chef de laboratoire pouvait, dans un souci d’objectivité et de transparence, associer les journalistes ou des témoins afin de rassurer la population que les échantillons ont été bel et bien prélevés dans les cales du bateau. Tout s’est déroulé dans une opacité totale.

L’INH aurait-il subi des pressions ou cédé aux espèces sonnantes et trébuchantes ? Le mystère demeure. Mais l’institut sort éclaboussé par cette affaire. Et c’est un précédent qui va renforcer des doutes sur ce laboratoire par rapport à la fiabilité de ses analyses. Aussi, cela donne-t-il à penser que le cas du riz birman est un parmi tant d’autres. Seul Dieu sait combien d’analyses sont biaisées à l’INH.

Bref récit de l’odyssée d’OceanPrincess.

En décembre 2018, sur alerte de leurs collègues guinéens, les responsables de la Ligue des consommateurs du Togo (LCT) ont à leur tour averti la population et les autorités togolaises sur le navire OceanPrincess qui transportait du riz de qualité douteuse. C’est le début d’un feuilleton qui va durer quatre (04) mois. En essuyant un refus de déchargement en Guinée, le navire a donc mouillé au Togo. L’objectif était de décharger vaille que vaille la nourriture encombrante. Entre-temps parti en rade, OceanPrincess va revenir sur la côte togolaise avec un objectif bien précis.

D’abord ce sont certains journaux qui ont été mis à contribution. Dans leurs colonnes, ils ont insinué que le riz est bon à consommer. C’est devenu le propre d’une catégorie de presse au Togo pour qui il faut tout manger en temps de disette, même si ça peut engendrer une constipation. Parallèlement, la société Olam importatrice veut « museler » les journaux qui ont relayé les doutes de la LCT sur la qualité de la cargaison de 18.000 tonnes de riz. Les médias L’Alternative, Liberté et l’Indépendant Express sont convoqués à la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC), l’organe chargé de réguler les médias, en présence de l’avocat de la société Olam. Après des échanges houleux, les patrons ont demandé à l’avocat de leur fait parvenir un droit de réponse. Ce que la société n’a jamais fait.

Ensuite l’arrêté de l’ancien ministre en charge de l’Agriculture Ouro-Koura Agadazi interdisant le déchargement du riz, Olam ne compte pas en rester là. Elle introduit une analyse du riz au laboratoire microbiologie alimentaire de l’Institut national d’hygiène (INH) de Lomé. Coup de tonnerre ! L’institut juge le riz propre à la consommation, contredisant ainsi les autorités guinéennes qui ont déjà effectué des analyses et jugé le riz impropre.

Source : L’Alternative No.788 du 02 avril 2019

27Avril.com