Révolution togolaise / le tour de garde : Tel un phénix, renaître des cendres

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RÉVOLUTION TOGOLAISE / LE TOUR DE GARDE

TEL LE PHÉNIX, RENAÎTRE DES CENDRES

« Il est parfois fort doux de ne rien être, mais il est honteux de n’avoir rien été ; comme il est humiliant de n’avoir pas été, par sa faute, ce que l’on était fait pour être »
Paul Thiébault ; Le recueil de pensées (1805)

La montée des périls

L’enlisement de l’opposition togolaise dû à ses contradictions internes et à sa faiblesse structurelle à conquérir le pouvoir et à l’exercer devient un danger grandissant pour le peuple. Désormais orphelin, le citoyen togolais est à la merci des brimades et intimidations du régime dictatorial. Les braquages successifs, les exécutions sommaires extrajudiciaires, les meurtres, les emprisonnements arbitraires, une justice corrompue et aux ordres participent de cette tentative d’imposer aux forceps un quatrième mandat de M. Faure Gnassingbé par le musellement et la terreur.
Aphones depuis la pantalonnade du 30 juin 2019, les « participationnistes électoraux » paraissent groggy. Incapables d’élever la moindre contestation pour défendre le peuple plus que jamais livré à la férocité séculaire d’un régime illégitime et liberticide.
Ce calme politique apparent est un vrai danger pour le pouvoir de Lomé 2 lui-même. Un peuple quel qu’il soit « ne démissionne jamais et meurt rarement ». Aussi vrai que les hommes sont placés au sommet de la création, ils reprendront NÉCESSAIREMENT leur droit et leur dignité. Aucune force ou organisation humaine ne peut les leur confisquer ad vitam æternam. La cécité politique de M. Gnassingbé et de ses nervis les pousse à tous les excès. Ils en payeront le prix fort. L’homme humilié n’est pas voulu de Dieu.
Sortir de ce cercle vicieux lourd de menaces pour la notion togolaise devient un impératif catégorique.

Pour un aggiornamento des figures marquantes de la nation togolaise

Le paradoxe togolais tient en un constat amer. Le Togo est un pays doté de grandes richesses matérielles et spirituelles et pourtant la majorité de son peuple vit dans la misère la plus noire.
C’est aussi un pays doté d’une impressionnante ressource humaine tant à l’intérieur qu’au sein de la diaspora. Ressource que la dictature se refuse obstinément à valoriser et à mettre au service de la nation. La dictature ne peut s’accommoder que de lumières sombres, c’est entendu. Pour autant, rien n’empêche les vraies lumières et lumignons de s’organiser en s’agglomérant pour éclairer la marche du peuple vers sa libération. Les dérives autoritaires de M. Talon au Bénin se sont heurtées à la détermination coalisée de deux anciens chefs d’État, Messieurs Nicéphore Soglo et Boni Yayi. Les présidents Gbagbo et Bédié viennent de se rencontrer à Bruxelles pour se pencher sur les convulsions de la société ivoirienne et conjurer le destin funeste en préparation pour 2020 en prônant le chemin de la réconciliation nationale.
Au Togo, les anciennes figures politiques marquantes sont étonnamment discrètes. Que disent Messieurs Olympio, Kodjo, Gnininvi, Ayéva, Koffigoh de la crise profonde que traverse le pays ? Rien. Comme Mgr Kpodjro ne voient-ils pas monter les périls ? Le combat de la libération et de la démocratisation qu’ils avaient mené des années durant était-il simplement de la poudre de perlimpinpin ? Que ne donnent-ils de la voix comme le vieux prélat pour éclairer le chemin du peuple vers la liberté ? Voient-ils leurs successeurs opposants tomber ? Sont-ils seulement conscients de la déliquescence de la nation dans ses valeurs les plus fondamentales ? Que sont devenus en définitive leurs idéaux d’antan ?
Il est temps, grand temps que ces figures de tout bord se coalisent en un creuset de salut public.
L’opposition actuelle est vaincue et paralysée à force de reculades, de maladresses, de manque de fermeté et de compromission. L’échéance de 2020 est à nos portes.

Je propose qu’un groupe de sages se mette rapidement en place. Sans étiquette politique, sans troupes de militants, armés justes de leur sagesse et de leur longue expérience pour indiquer le chemin de la libération du peuple togolais. Il serait souhaitable que ce groupe se forme autour de Mgr Philippe Fanoko Kpodjro, qui tel Jean-Baptiste, ne cesse de prêcher dans le désert du renoncement coupable des acteurs politiques togolais.
Il est évident que le retour coalisé des anciennes figures de l’opposition redonnerait le goût de la chose politique au peuple déçu, en désamour profond avec ceux qui font profession de le représenter et qui n’arrêtent pas de le trahir. Il lui rendrait l’habituelle saveur d’une union qui seule suscite son adhésion et sa mobilisation. A huit mois d’une élection majeure, il est une évidence que les partis politiques de l’opposition ne peuvent y réussir. Le récent appel du Comité d’action pour le renouveau (CAR) pour une unicité d’action sonne comme un renforcement de la paralysie de l’opposition conviée, une fois de plus, à ses habituelles guerres picrocholines qui masquent le principal tout en dégageant la voie à la dictature. L’union sacrée serait au contraire impulsée par les sages auxquels se joindront les acteurs politiques de tout bord en vue d’enrayer la tendance abstentionniste qui fait si bien le jeu de la dictature. L’opposition participationniste semble disqualifiée. Sa popularité est baissière auprès de la population qui se réfugie dans son bastion abstentionniste tenu comme une arme de résistance. Il faut sortir de ce schéma pour créer les conditions d’une alternance en 2020.
La constitution rapide ce groupe créerait une dynamique nouvelle à la lutte que mène le peuple togolais en tirant parti de l’élan majeur emmené le 19 août 2017 par M. Atchadam Tikpi. Ce groupe devra effectuer la soudure stratégique entre la ligne insurrectionnelle et la ligne électoraliste pour la conquête du pouvoir et son exercice. Pour notre part, nous soutenons que face à un régime fondé sur une vision confiscatoire du pouvoir au sens de Paul Ricoeur, toute élection non enchâssée sur un élan de vigilance et de manifestation populaire ne saurait prospérer. Ne l’oublions pas, M. Gbagbo n’est arrivé au pouvoir en Cote-d’Ivoire en 2000 qu’à la faveur d’une manifestation populaire post-électorale qui a pu aller « chercher » SA victoire face au régime du général Guéï. L’opposition factice des deux voies, la guerre fratricide artificielle entre le Parti national panafricain (PNP) et l’Alliance nationale pour le changement (ANC) est source d’immobilisme au profit de l’ogre de Lomé 2. Il faut en sortir et les sages doivent y aider. Ceci est un point essentiel de la résolution de la crise au Togo. Il relègue la fumeuse et pernicieuse question de la désignation d’un candidat unique de l’opposition issu de la société civile portée par le parti « Santé du peuple » au rang des accessits. Il est clair que les partis de l’opposition ne peuvent d’eux-mêmes y parvenir compte tenu des agendas cachés et des différences programmatiques trop marquées. C’est donc un serpent de mer dont la seule vertu est d’endormir le peuple et de conduire l’opposition sur la butée d’une question insoluble. Il sert en réalité à retarder la mise en ordre de bataille des acteurs et à permettre à Lomé 2 de supplanter dans les « urnes » les éternels distraits de l’opposition qui n’auraient su ni se préparer à l’affrontement et à la victoire, ni à l’empêchement des fraudes électorales massives en préparation. Une vraie-fausse piste que l’action des sages devraient rendre impraticable.
Ce groupe des sages sera aussi un recours de premier ordre pour le président démocratiquement élu au cours d’un premier mandat qui sera nécessairement de transition. Les partis politiques retrouveront toute leur place d’acteurs de la vie démocratique. Ils seront également les incontournables pivots d’une réconciliation nationale qui remettrait le Togo et ses fils sur le chemin de la paix et de l’harmonie.
Ni rêve éveillé ni utopie qui n’est du reste qu’un rêve non encore réalisé, cette voie n’a rien d’extraordinaire et se trouve largement à la portée de tout individu de bonne volonté. Ne manquons pas de l’emprunter car selon le mot de V. Cherbuliez : « il n’est rien de plus humiliant que d’arriver si près du but et de renoncer ».

Jean-Baptiste K.

Source : www.icilome.com