Le régime cinquantenaire a réussi, depuis les légilatives controversées du 20 décembre 2018, à se donner les moyens pour passer tranquillement en 2020, malgré le désir d’alternance du peuple togolais dans sa majorité. La preuve, outre le régime et ses vuvuzelas, les « nommés du 20 décembre » aiment à crier sur tous les toits que maintenant les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales pour lesquelles l’opposition parlementaire (de la 5e législature) s’est battue, vont passer comme une lettre à la poste. Visiblement, on y est.
Ces amis de Faure Gnassingbé aujourd’hui à l’Assemblée nationale ont poussé l’outrecuidance jusqu’à accuser l’ancienne législature, notamment l’opposition parlementaire d’avoir bloqué la mise en œuvre des réformes. Dans tous les cas, comment cela pouvait-il être autrement quand on sait que le régime veut encore offrir un autre mandat à son « champion » à travers des réformes personnalisées ? Une situation contre laquelle se bat le peuple togolais dans les rues. Aujourd’hui que le boulevard est dégagé avec la parodie du 20 décembre dernier qui a rempli l’Assemblée nationale de « députés frelatés », la forfaiture est sur le point d’être commise.
En effet, la Commission des Lois de l’Assemblée nationale a débuté mardi dernier, l’étude du texte en vue des réformes politiques. Et sans surprise, c’est le projet de loi du gouvernement, contesté par la vraie opposition et tout le peuple togolais, qui y a été envoyé, au détriment de la proposition de loi faite par l’expert commis par la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Le projet de loi portant modification des articles 59, 60 et 100 de la Constitution du 14 octobre 1992 introduit par le gouvernement fait la part belle à Faure Gnassingbé. L’article 59 nouveau stipule : « Le Président de la République est élu au suffrage universel direct et secret pour un mandat de cinq (05) ans renouvelable une seule fois. Le Président de la République reste en fonction jusqu’à la prise de fonction effective de son successeur élu ». Alors que la proposition faite par l’expert de la CEDEAO, acceptée par l’opposition et le peuple togolais, indique à l’article 59 nouveau : « Le Président de la République est élu au suffrage universel, libre, direct, égal et secret pour un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois. Nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels ou proroger le mandat pour quelque motif que ce soit. Cette disposition ne peut faire l’objet d’une révision ». De plus, le gouvernement, dans sa proposition, n’a pas pris en compte l’article 100 nouveau proposé par l’expert de la CEDEAO. Ce dernier a proposé sept (07) membres pour la Cour constitutionnelle alors que le gouvernement maintient les neuf (09).
Visiblement comme on peut le redouter, les accompagnateurs du régime cinquantenaire qu’on appelle vulgairement aujourd’hui des députés, sont sur le point de laisser passer cette loi. Depuis mardi, on n’entend personne s’opposer au projet de loi du gouvernement qui consacre Faure Gnassingbé, un chef d’Etat à vie au Togo. Une situation sur laquelle réagit l’Archevêque émérite de Lomé, Monseigneur Philippe Fanoko Kpodzro.
Les récriminations de Mgr Kpodzro contre la forfaiture en préparation
Le prélat n’a pas attendu la fin de l’étude du projet de loi (introduit par le gouvernement) pour réagir sur la situation. Pour Mgr Philippe Fanoko Kpodzro, les crises sociopolitiques sont devenues récurrentes depuis que l’Assemblée monocolore RPT a toiletté la Constitution de 1992 pourtant plébiscitée par plus de 98% de la population togolaise. « Le chef de l’Etat actuel qui est aux commandes depuis la mort de son père feu Général Gnassingbé Eyadéma en 2005, a régulièrement mis en place des structures qu’il a particulièrement chargées de proposer des solutions de sortie de crise qu’il n’a jamais voulu mettre en œuvre », a-t-il fait remarquer.
Après avoir rappelé ces différentes structures, Mgr Kpodzro a relevé qu’il manque un vrai courage à Faure Gnassingbé pour sortir par la grande porte. Il est convaincu que l’Assemblée nationale actuelle, avec des députés à la solde du régime, va sûrement accepter la loi introduite par le gouvernement pour ainsi donner la latitude au fils du père de briguer d’autres mandats présidentiels. « Pourquoi faut-il que tout le temps, nous soyons obligés d’accepter l’inacceptable ? N’avons-nous pas le droit d’exiger que, pour une fois, les aspirations profondes du peuple togolais soient prises en compte par ceux qui veulent gérer son présent et son futur ? Quel honnête citoyen de ce pays ne serait pas fier d’être véritablement élu ? Si les élections sont organisées de façon franche, transparente et sincère, les perdants iront féliciter les gagnants et la démocratie s’en trouverait renforcée », a souligné le prélat. Pour lui, un vrai fort ne piétine pas le faible.
Il a élevé la voix contre des réformes taillées sur mesure et appelé à la préservation des acquis de la Constitution de 1992 arrachée de haute lutte. Mgr Fanoko Kpodzro a en outre appelé à l’audit du fichier électoral avant l’élection présidentielle de 2020 et la reprise du recensement pour les élections locales. « Le peuple togolais, malgré ses apparences pacifistes, à la limite exagérées, est capable de rupture. Par conséquent, nous voulons que les recensements soient repris ici et maintenant, peu importe le coût », a-t-il appelé.
Source : www.icilome.com