Il y a quelques jours, la Haute Autorité de l’Audiovisuelle et de la Communication (HAAC) a reconnu officiellement, l’existence des organes de presse en ligne au Togo. Dans un communiqué qu’elle a rendu public le 23 janvier dernier, l’institution chargée de la régulation de la presse demandait aux organes de la presse en ligne, un certain nombre de mesures pour encadrer leur existence légale. Une nouvelle favorablement accueillie par les acteurs de la presse en ligne, mais qui ont également des réserves. C’est en tout cas ce que pense le Directeur de l’Agence de presse bilingue, www.afreepresse.info, Olivier Adja, souligne dans la présente interview accordée à Togo Matin.
Togo Matin (TM) : Comment avez-vous accueilli cette information faisant état de la prise en compte par l’Etat des organes de presse en ligne ?
Olivier Adja : Il faut d’abord dire que c’est une décision qui est salutaire puisque les professionnels de la presse en ligne l’attendaient depuis des lurettes pour exister légalement.
Le problème d’existence juridique des médias en ligne se pose avec acuité surtout lorsqu’il s’agit pour eux, de nouer des contrats et des partenariats avec des entités installées au Togo ainsi qu’à l’étranger. C’est une lutte que la presse en ligne a menée depuis plusieurs années pour une reconnaissance légale de la part de l’État. La décision de la HAAC vient ainsi combler un vide qui existait déjà.
Cependant, la presse en ligne a accueilli la décision de façon mitigée, étant entendu que c’était un travail que l’Association Togolaise des Organes de la Presse Privée en Ligne (ATOPPEL) a entamé depuis des années avec le bureau de feu Koukou Tozoun et ensuite avec le bureau de feu Pitang Tchalla.
Malheureusement, avec la disparition de ces deux personnalités, le travail est resté non achevé. Le travail consistait à ce que le Code de la presse soit revu et intègre les médias en ligne. Ça aura pour effet, une reconnaissance officielle des médias en ligne avec leur association au partage de l’aide de l’Etat à la presse.
Quels peuvent être selon vous les avantages liés à une telle reconnaissance de l’Etat des médias en ligne?
Il faut d’abord commencer en disant qu’aujourd’hui, la presse en ligne est une entité importante de la grande famille de la presse togolaise. Le travail que la presse e ligne abat aujourd’hui, est un travail important et louable. Il n’y a aucun togolais qui soit connecté à internet qui n’utilise pas les services de la presse en ligne. Et lorsqu’on se réveille aujourd’hui, la première des choses que nous faisons, c’est d’aller sur les réseaux sociaux pour voir ce que la presse en ligne a posté. Quelles sont les informations qui sont postées avant même d’écouter la radio ou de suivre les infos à la télé ou même d’acheter le journal.
Quels sont vos rapports avec les institutions de la République, les instances de régulation, malgré ce vide juridique qui existait?
S’il faut parler de l’Agence de presse Afreepress, nous dirons que nous avons de très bonnes relations avec les institutions de la République puisque nous avons toujours besoin de ces institutions pour fonctionner et faire au mieux notre travail. Le Togo est un Etat de droit et il faut respecter ses lois.
Maintenant, je n’ose pas parler au nom de l’Association des organes de la presse privée en ligne du Togo qui est ATOPPEL, car l’actuel président est là et est mieux placé pour répondre à cette question. Mais il faut dire qu’en notre temps, les relations étaient parfaites. Elles étaient meilleures et je crois que cela n’a pas changé aujourd’hui.
Mais comme je le dis, il y a une personne qui est mieux placée pour répondre à cette question.
La HAAC demande aux presses en ligne de faire une simple déclaration de leur organe pour être reconnues alors qu’elle demande aux web TV et web radio une autorisation. N’y a-t-il pas là une contradiction étant donné que ces trois genres de médias utilisent le même support. Le web ?
Certainement que la HAAC a ses motivations et ses raisons que nous ignorons. Donc, nous ne voulons pas aller vite en besogne et nous jeter dans un exercice de critique de la décision de la HAAC. Il faut aller à l’information et comprendre les motivations qui se cachent derrière cette décision. De toutes les façons vous l’avez dit, tous ces supports sont en ligne et aujourd’hui, un organe de la presse en ligne peut au même moment faire de la télévision, de la radio et de la presse écrite. A afreepress par exemple, nous avons une fenêtre vidéo sur notre plateforme, nous avons aussi la possibilité de passer de l’audio comme une radio, même si nous fessons essentiellement dans la presse écrite en ligne.
Qu’est ce qui se cache derrière cette décision de la HAAC? Peut-être bien que c’est pour arranger ce beau monde-là. Il faut aller aux informations et être situés sur les motivations de la HAAC. C’est pourquoi les professionnels de la presse en ligne sont en train de frapper à la porte de la HAAC pour rencontrer le nouveau président puisque ces professionnels n’ont pas encore eu l’occasion de le rencontrer pour échanger avec lui. C’est un exercice qui s’impose et nous allons faire un effort pour rencontrer M. Willibronde Télou pour discuter avec lui du domaine qui est spécifique à la presse en ligne, de nos besoins, de nos inquiétudes et aussi recueillir les informations et les raisons qui ont motivé cette décision de la HAAC.
Mais tout compte fait, il faut qu’on parvienne à s’entendre avec la HAAC et qu’il n’y ait pas de mécontentement de part et d’autre. Je ne crois pas que cela puisse être le cas parce qu’il y a toujours les passerelles de discussions entre les médias en ligne et la HAAC.
Le gouvernement a d’ailleurs posé les bases d’une reconnaissance des journaux en ligne au cours du dernier conseil des ministres. Donc nous attendons la suite des événements.
Avec l’émergence de plusieurs médias en ligne et les fausses informations qui tendent à prendre le dessus, quel message pouvez-vous adresser aux lecteurs pour qu’ils puissent distinguer le vrai du faux ?
Pour la multiplication des médias en ligne, il faut dire que c’est un processus naturel. Au début de la presse privée au Togo dans les années 90, on a remarqué le même engouement. Mais avec le temps, ceux qui pouvaient tenir ont continué, les autres ont tout simplement disparu.
Il faut aussi rappeler qu’aujourd’hui il n’existe pas encore un cadre juridique et légal pour la presse en ligne. Tout le monde peut aujourd’hui créer un média en ligne. De l’argent et quelqu’un qui s’y connait un peu en matière de programmation, suffisent largement à vous donner le titre de journaliste en ligne au Togo. En juillet 2014, lors des états généraux de la presse, nous avons formulé des recommandations à l’endroit des autorités pour encadrer l’entrée dans la corporation. Toutes les corporations dans le monde ont des règles qui régissent leur intégration. Mais pas celle de la presse au Togo.
Pour la question des fake news, il faut dire qu’internet est un monde aussi vaste que l’océan, si bien qu’on peut retrouver un peu de tout.
Les organes de la presse en ligne sont animés par des professionnels de la presse qui n’ont rien à envier aux journalistes de la presse écrite, de la radio ou de la télé.
Selon moi, c’est le support qui diffère si non, les journalistes de la presse en ligne sont des professionnels de la presse comme tous les autres mais certains ont pour support la télévision, pour d’autres, ce sont les ondes radio. Pour la presse en ligne, c’est tout simplement internet.
Les professionnels de la presse en ligne respectent eux-aussi les mêmes règles que les autres journalistes. Ils sont soumis aux mêmes exigences de qualité que les autres médias.
Maintenant, il y a des citoyens qui ne sont pas des journalistes, mais qui peuvent publier des informations sur internet. Ils peuvent faire des articles et les publier sur Facebook, WhatsApp, Twitter et autres. Mais, est ce qu’ils connaissent forcément les règles qui gouvernement ce métier ? C’est-à-dire l’exigence l’obligation de vérifier les informations ? D’aller aux nouvelles ? De faire des recoupements ? Je ne crois pas du tout !
C’est ce qui occasionne les fake news. Ce qu’il faut demander, c’est que les journalistes fassent attention aux informations et alertes qui sont publiés sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas tout qui est vrai et il faut beaucoup faire un travail de recoupement et de vérification avant de reprendre des informations trouvées sur les réseaux sociaux.
Donc, moi je vous dirai en conclusion que la plupart des fake news ne viennent pas des professionnels de la presse en ligne, mais des citoyens qui ne maîtrisent rien du métier de journaliste.
Propos recueillis par R. Zakari et transcrit par J. Amah et D. Edem.
Source : Quotidien Togo Matin N°0245 du jeudi 1er février 2018
Source : www.icilome.com