Il n’y a pas à dire, il y a quelque chose qui a changé ces derniers jours dans le landernau politique congolais.
Le traitement de choc qui semble avoir rebattu toutes les cartes s’appelle Ensemble pour le Changement, le mouvement politique lancé officiellement ce lundi par Moïse Katumbi. Un mouvement qui doit soutenir la candidature à la présidentielle de l’ex-gouverneur du Katanga mais qui va aussi présenter une série de plateformes électorales aux élections législatives et provinciales qui doivent aussi se tenir le 23 décembre prochain.
En présentant plusieurs plateformes, le mouvement katumbiste va contourner aisément la question du seuil de représentativité. Et le mouvement katumbiste ne devrait pas être le seul à présenter ce type de plateformes, même s’il devrait être et de loin le plus costaud. Du coup, la stratégie de la majorité présidentielle qui pensait couper les ailes à la plupart des partis avec sa loi électorale doit être revue. Une fois de plus, la majorité présidentielle érige elle-même Katumbi dans le rôle de son principal, si pas le seul, opposant.
Katumbi a pris de court la majorité présidentielle. L’homme a les moyens de présenter suffisamment de plateformes pour concurrencer la Kabilie sur toute l’étendue du territoire. Qui plus est, en regardant les résultats de 2011, la majorité a des soucis à se faire. En effet, entre 2006 et 2011, l’Assemblée Nationale a conservé moins de 20 % de ses élus. Ce qui signifie que 80 % des parlementaires élus en 2006 n’ont pas été réélus en 2011. La majorité actuelle, vu le climat politique, la colère de la population, a toutes les raisons de craindre ce passage par les urnes… Handicap supplémentaire de taille.
Reste, évidemment, la « machine à voter » qui peut permettre de « tripoter » les résultats. Mais le clergé se mobilise pour surveiller le scrutin et la communauté internationale a promis d’être très vigilante. Même la fraude pourrait donc être plus difficile.
Marabout Minaku
C’est dans ce contexte qu’il faut situer la déclaration « prophétique » du président de l’Assemblée nationale Aubin Minaku, ce vendredi, à l’occasion de son discours d’ouverture de la session parlementaire.
Le président Minaku, devenu un véritable marabout, a évoqué, parmi les lois à étudier pendant cette session, la loi sur la répartition des sièges mais aussi… un réexamen de la loi électorale.
Comment, ce juriste perdu en politique, peut-il annoncer ce réexamen alors que la loi est encore en cours d’examen par la Cour Constitutionnelle ? En fait, tout indique que la loi actuelle pourrait être retoquée par la Cour Constitutionnelle en raison notamment du seuil. Ce renvoi du texte au législateur est un fait rare dans l’histoire parlementaire de cette majorité. Suffisamment rare pour qu’on s’interroge encore un peu plus sur la prémonition de Minaku.
En réalité, selon divers témoignages recueillis ce vendredi, il apparaît que la majorité aurait compris que sa stratégie allait se révéler désastreuse face à une opposition qui affûte ses armes et envisage d’aligner autant de regroupements qu’elle.
La sortie de Moïse Katumbi à Johannesburg a fni de convaincre les brillants stratèges de la majorité que la loi électorale n’apportait aucune garantie de succès aux prochains scrutins. Le seuil de 1% est désormais devenu, par effet boomerang, un handicap pour ceux qui hier pensaient avoir trouvé la solution miracle pour faire le vide autour d’eux et écarter la plupart des partis de l’opposition.
En pouvant afficher un mouvement regroupant plusieurs formations ayant obtenu en 2011 le seuil, Moïse Katumbi se pose encore un peu plus comme le seul adversaire capable de remporter les élections au nez et à la barbe de Kabila et de son éventuel dauphin.
La majorité veut donc revoir sa copie rapidement en dépit de son adoption par le parlement. Une fois de plus la Kabilie veut changer les règles du jeu en cours de partie, histoire d’éviter une déroute qu’elle aurait elle-même initiée par cette nouvelle loi électorale
Maintenant, il va falloir justifier les raisons de ce retour de la loi devant le parlement et il va falloir aller vite. Le calendrier électoral, qui a reçu l’aval de la communauté internationale est encore un peu plus menacé de ne pas être respecté… pour un scrutin organisé deux ans après la date de l’échéance constitutionnelle
Source : www.cameroonweb.com