« Avec une commission électorale aux ordres, c’est l’assurance que les ordres sont exécutés dans la lettre et l’esprit » (Alpha Amadou Barry)
Les commissions électorales, censées être des organismes publics dotés de la personnalité juridique qui lui donne la tâche de garantir la neutralité et l’impartialité dans l’organisation des élections, sont devenues des organes spécialisés dans l’organisation des mauvaises élections en Afrique. Pour maintenir le statu quo via des simulacres d’élections, la plupart des régimes africains misent sur les commissions nationales électorales bancales. Les CENI jouent un rôle tout aussi important que l’armée et les services de sécurité dans la préservation et la consolidation des régimes en place. Celui qui prend le contrôle de cette institution gagne à tous les coups les élections.
Au Togo, le régime en place depuis 55 ans le sait. C’est pour cette raison que le père et le fils se sont toujours arrangés pour que la CENI ne leur échappe jamais, pour éviter de se soumettre à la sanction populaire. Ici, l’institution chargée d’organiser les élections, est transformée en un organisme électoral partisan, partial et partiel, manquant cruellement de compétences, d’expertises et d’expériences en matière électorale, et qui s’est spécialisé dans des fraudes pyramidales.
La CENI a toujours été composée à plus de 90% des représentants du parti au pouvoir et alliés qui se sont toujours décarcassés pour que le parti présidentiel ne perde jamais les élections. Faisant sienne cette philosophie d’Omar Bongo Ondimba selon laquelle, « on n’organise pas les élections en Afrique pour les perdre ». Cette assertion qui est restée dans les annales des consultations populaires sur le continent, en dit long sur le rôle que revêtent désormais les élections dans la plupart des pays africains. Depuis la nuit des temps, toutes les consultations électorales organisées au Togo, ont été systématiquement remportées « haut les mains » par le régime RPT/UNIR.
A l’exception des élections législatives de 1994 organisées par une CENI, un scrutin démocratique, juste et équitable remporté par l’opposition, notamment le CAR de Me Yawovi Agboyibo et l’UTD d’Edem Kodjo, deux partis d’opposition qui, après coup, avaient laissé échapper la majorité à l’Assemblée nationale au profit du RPT, à cause de leurs dissensions et guéguerres. Gnassingbé Eyadema avait surfé sur les faiblesses de l’opposition pour retourner la situation en sa faveur en manipulant les leaders et en les dressant les uns contre les autres. Les malheurs des Togolais ont commencé depuis là et se poursuivent à ce jour.
Depuis l’expérience de 1994 -malheureureuse pour le RPT-, le régime a usé de tous les pouvoirs pour avoir la mainmise sur la CENI. Avec les élections chaotiques qu’on a connues par la suite. La dernière composition de la CENI n’a pas dérogé à la règle. Le casting a une nouvelle fois accouché des fraudeurs assermentés d’élections. Le régime s’est taillé la part léonine. Sur les 17 membres, seulement trois (03) sont revenus à l’opposition, le parti au pouvoir et ses supplétifs s’étant octroyé les 14 autres postes.
Dans les pays comme le Ghana par exemple où la démocratie est en marche, une institution comme la CENI est indépendance vis-à-vis du pouvoir politique et les membres sont réputés pour leur compétence et leur intégrité. Il ne peut y avoir de démocratie sans démocrate comme on le dit. Les institutions ont besoin de personnalités à la psychologie forte, intègres, compétentes, pour s’opposer à toute forme de tyrannie.
Tout le contraire au Togo où les membres des institutions sont les lèche-bottes du pouvoir. Avec la CENI actuelle fort déséquilibrée, c’est la porte ouverte à toutes les dérives, fraudes et tripatouillages électoraux. Il n’y aucune chance qu’un scrutin juste et équitable soit organisé dans ces conditions.
Médard AMETEPE
Source : icilome.com