Si en 2014, nous doutions encore de cette possibilité, désormais, il est clair que l’État togolais pompe clandestinement du pétrole sur les plateformes situées au large du Togo. Grâce à une structure « étatique » ! N’en déplaise aux griots du pouvoir qui continuent de verser dans le dilatoire et la désinformation. Nous avons recueilli les propos d’un marin ayant travaillé sur ces installations en mer que nous vous livrons, en attendant d’autres confessions.
Il y a exactement une semaine, suite à notre article dans la parution N°2515 du 13 septembre 2017 sous le titre « Dossier du pétrole off-shore du Togo/ L’Etat togolais et quelques individus perçoivent des dividendes de production ! », le site dit du gouvernement, republicoftogo. com a cru intelligent de rebondir sur le sujet, sans recherche. « Pas de chance, le Togo n’a pas de pétrole », a-t-il titré, avant d’ajouter : « En rubrique Economie, Liberté affirme que « quelques individus perçoivent des dividendes de production de pétrole off-shore au Togo ». Cocasse quand on sait qu’aucune goutte d’or noir ne sort malheureusement du sous-sol. On peut toujours rêver ». Heureusement qu’il existe un fossé entre l’investigation et le rêve.
La coordination de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) au Togo est l’organe chargé d’établir le Rapport de conciliation des paiements et des recettes du secteur extractif. A ce titre, et à ce jour, ce sont ses données et écrits qui font foi dans le domaine. Et lorsque dans les deux derniers rapports de cette structure (2012 et 2013), on lit au niveau du Cadre réglementaire du secteur extractif, à la section b) : « Au même titre, nous avons relevé que la société « ENI » s’est engagée dans un procès contre la société Américaine « Brenham Oil & Gas Corp », en raison de la signature de cette dernière d’un accord pour acquérir des droits d’exploration en eau profonde du pétrole dans la République Togolaise. Ceci n’a pas été confirmé par la DGH qui déclare que suite à la cessation des activités de la société « ENI », aucun accord portant sur l’exploration ou l‘exploitation du pétrole au Togo n’a été signé », on doit se poser les vraies questions sur le jeu auquel joue l’État togolais. Mais quand les deux rapports affirment que « Conformément à la lettre envoyée par ENI, datée le 29 janvier 2014, la société a notifié la cessation de ses activités sur les deux blocs et leurs remises au Gouvernement Togolais. Le motif présenté dans la lettre est l’échec des négociations portant sur les modifications des Contrat de Partage de Production (CPP) initialement signés », on est obligé de conclure qu’IL EXISTE ENTRE LA SOCIÉTÉ ENI ET L’ÉTAT TOGOLAIS UN CONTRAT DE PARTAGE DE PRODUCTION en bonne et due forme. Il revient au ministère des Mines et de l’Energie en général et particulièrement à la Direction de la Géologie et des Hydrocarbures de TOUT DÉBALLER.
Petit exercice de comparaison pour attester que le Togo pompe clandestinement du pétrole et que la société ENI n’est pas la propriété de Mère Theresa. En 2012 et 2013, la société MM Mining qui exploitait le fer de Bandjeli, a versé à l’État environ 33,620 millions de FCFA comme redevances minières pour avoir extrait 392.697 tonnes de fer ; la société Wacema pour sa part versé environ 1,64 milliard à titre de redevances minières en deux ans. Quant à la Société nouvelle des phosphates du Togo (SNPT), elle a extrait, toujours selon les chiffres de l’ITIE-Togo, plus de 2,32 millions de tonnes de phosphate du sous-sol togolais, mais aucune trace de redevances minières versées. Et la comparaison n’est pas finie, du moins pour les deux premières sociétés.
Ainsi, les valeurs des exportations de MM Mining s’établissent à 2.505.130.118 FCFA en 2012 et 2.514.419.025 FCFA en 2013, soit au total plus de 5 milliards FCFA de produits exportés selon les données reportées par ladite société.
S’agissant de Wacem, les données reportées par elle indiquent 45.792.111.760 FCFA en 2012 et 38.258.841.017 FCFA en 2013, soit des exportations au-delà de 84 milliards FCFA.
Au final, MM Mining a versé 33,620 millions de redevances pour avoir exporté plus de 5 milliards FCFA de fer, et Wacem pour sa part 1,64 milliard FCFA pour avoir exporté plus de 84 milliards FCFA de produits. Mais alors, comment la société ENI elle autre peut avoir versé plus de 6 milliards FCFA de redevances minières sans rien exporter ??? C’est à cette démonstration qu’on invite le ministre Marc Ably-Bidamon et le gestionnaire de republicoftogo. com à réagir.
Cette réaction est d’autant plus attendue qu’un ancien marin ayant travaillé à l’exploitation discrète est formel : le Togo produit clandestinement du pétrole et seul un groupe restreint de barons en profitent. Voici ce qu’il nous a confié.
« Je n’aime plus revenir sur ce que j’ai vécu sur la mer ; le Togo pompe du pétrole depuis un bon bout de temps, mais une forme de magouille entoure l’opération qui se passe à l’insu de la population. La géographie du sol est telle que quand le Togo pompe le pétrole, les pays voisins comme le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Bénin et le Nigeria ne peuvent plus en pomper suffisamment. C’est comme il existe un deal entre notre pays et les autres pour que nous ne l’exploitions pas. Contre des préférences lorsque nous achetons le pétrole auprès de ces pays ou quelque chose de ce genre. Normalement le Togo ne doit pas exploiter son pétrole, mais l’État et quelques ministres ont décidé de s’adonner à cette pratique mafieuse. Moi j’ai travaillé avec eux et c’est ENI qui est à la base de l’exploitation parce qu’elle dispose du matériel adéquat. C’est elle qui est venue placer la pompe et c’est encore elle qui va chercher les preneurs de ce pétrole « made in Togo » ».
Aujourd’hui, le départ de la société ENI n’absout en rien le devoir de vérité que les ministres qui se sont succédé à la tête du département des Mines et de l’Energie doivent aux citoyens. Autrement, des langues se délieront avec le temps et la manne longtemps cachée risque d’être connue un jour. Déjà que nous avions relevé une production minimale de 853.000 barils au temps où ENI exerçait, il ne serait pas surprenant d’apprendre qu’en réalité, les productions étaient plus grandes, ainsi que les directions qu’elles prenaient nombreuses.
Bon à suivre.
Abbé Faria/Source : Liberté
Source : www.icilome.com