Entre le candidat malheureux de la présidentielle du 22 février 2020, Gabriel Messan Agbéyomé Kodjo, et le vieux prélat catholique Philippe Fanoko Kpodzro, qui donne conseil à qui ? Les deux ont eu l’ingénieuse idée de se mettre dans les rues, avec de pauvres vieux fatigués comme bouclier, pour aller réclamer leur supposée victoire au scrutin du samedi dernier.
Au grand dam de la Cour constitutionnelle officiellement habilitée à trancher en de telles circonstances. Dans un point de presse, mardi en fin d’après-midi au domicile de M. Kodjo, une manifestation a été effectivement lancée pour ce vendredi 28 février par la coalition dirigée par le prélat Philippe Fanoko Kpodzro.
Celui-ci invite les personnes du 3ème âge de tout le pays à se joindre à lui «dans le cadre d’une marche pacifique de revendication de la victoire des forces du bien sur celles du mal», précise une déclaration de l’homme de Dieu. «Ce serait leur meilleure manière d’indiquer la voie de l’honneur et de la dignité aux jeunes (…) à prendre leur responsabilité», ajoute le texte.
Plus encore, le vieux prélat catholique – apparemment très remonté contre le chef de l’Etat – demande à ses collègues évêques, à tous les prêtres, aux pasteurs ainsi qu’aux imams «à se mobiliser à mes côtés pour arracher au pouvoir la énième victoire du peuple qu’il tente de confisquer si grossièrement». Pour lui, «2020 signe la fin de carrière de «Messi» Faure Gnassingbé, parole d’Archevêque Emérite».
Il promet d’être le pire cauchemar du chef de l’Etat. Appelant le Pape François à contribution. Et Agbéyomé Kodjo de reprendre, tel un enfant de chœur : «De toutes les façons, ils vont partir. Ils ont pris un plat chaud !». «Ils n’ont pas gagné de manière régulière», a-t-il ajouté, très furax. Avant de lancer, comme pour contrôler quelque peu ses nerfs : «Je veux bien respecter les lois de mon pays, mais il faut que les autres le fassent aussi».
Ah ! Dans son petit coin de triste troisième, au score minable au scrutin du 22 février, Jean-Pierre Fabre de l’Alliance nationale pour le changement (ANC) peut se permettre un petit sourire au coin de la bouche. En son temps, quant il dénonçait de «graves irrégularités» et contestait les résultats de la présidentielle de 2015 qui donnaient Faure Gnassingbé gagnant avec 58,77%, c’était bien Agbéyomé Kodjo qui lui demandait de se conformer strictement aux lois de la République.
Comme Jean-Pierre Fabre il y a cinq ans, c’est Agbéyomé Kodjo qui crie aujourd’hui «bourrage des urnes», «votes multiples», et «chasse» de ses délégués dans des bureaux de vote au nord. Ils exhibaient certaines preuves aux journalistes, parce que des preuves, il en a à profusion. Sauf que jusqu’ici, la bande à Mgr Kpodzro et à M. Kodjo, cinq (5) jours après les résultats provisoires, n’a pas eu le simple culot d’approcher la Cour constitutionnelle.
A la presse qui veut comprendre, Agbéyomé Kodjo répond : «On va déposer un recours, on est en train de constituer le dossier. On va déposer pour la forme». Pour la forme ? Parce que les sept (7) juges de la Cour constitutionnelle sont en lien avec le pouvoir central. Et qu’ils ne seront pas censés de dire le droit, estime-t-il.
Au moins Jean-Pierre Fabre avait tenté de saisir la Cour…Dans une de ces contradictions, le malheureux du 22 février 2020 rebondit : «Les résultats de la CENI sont des résultats provisoires ; ils ne s’imposent à moi que lorsqu’ils seront validés ou confirmés par la Cour constitutionnelle».
Et c’est ce qui risque justement d’arriver. A l’article 142 de la toute récente loi n°2019-017 du 06 novembre 2019 portant modification du Code électoral, il est indiqué que : «Tout candidat ou toute liste de candidats peut contester la régularité des opérations électorales sous forme de requête adressée à la Cour constitutionnelle. La requête lui est adressée dans un délai de quarante-huit (48) heures pour l’élection présidentielle et cinq (5) jours pour les élections sénatoriales et législatives à compter de la proclamation des résultats provisoires. La requête doit contenir les griefs du requérant».
Le souhait, pour ceux qu’on aspire à exposer dans la rue, est que la dynamique Kpodzro puisse présenter, dans les délais constitutionnels, les preuves de ses revendications à la Cour.
Aux dernières nouvelles, nous apprenons du portail officiel Republicoftogo que Agbéyomé Kodjo a finalement fait le choix de saisir la Cour constitutionnelle au sujet de ses revendications : «Nous avons déposé le recours hier (mardi) avant minuit. Il porte sur l’annulation du vote par endroits. Nous avons démontré des cas de fraudes et avons demandé que le vote soit repris dans plusieurs localités», a-t-il indiqué, cité par notre source.
Tout compte fait, l’autorité publique semble apprêter les outils nécessaires pour dire son droit dans la rue. «S’ils s’amusaient à vouloir poser des actes qui sont contraires à l’ordre public et à la loi, la réaction des autorités compétentes sera ferme», a gentiment promis mardi le ministre Gilbert Bawara de la Fonction publique au micro de Victoire FM.
«Les deux personnages devraient tirer un certain nombre de conséquences et d’enseignements par rapport au désintérêt que les citoyens sont en train de manifester à leur égard. Les Togolais vaquent à leurs occupations», a-t-il souligné. Et s’est dit choqué par l’attitude de Mgr Kpodzro : «A cet âge-là, avec les responsabilités religieuses qu’il a jouées, nous aurions aimé qu’il soit là en train de méditer et de prier pour la paix dans le pays et non pas qu’il devienne un élément d’agitation et quelqu’un qui œuvre pour le désordre et la confusion», a-t-il fait remarquer.
Et au ministre Damehame Yark, ministre de la Sécurité et la protection civile, en bon acteur de la rue, de dire le mot de la fin à l’endroit de Gabriel Messan Agbéyomé Kodjo : «Je crois qu’il serait sage pour ce candidat de se mettre dans les rangs.
On n’a pas besoin de ça. Nous avons besoin d’une situation calme et apaisée pour continuer le développement du pays», a-t-il déclaré lundi à la presse, en marge de la présentation au 2 Février de leurs rapports par les missions d’observation de la CEDEAO et de l’Union africaine. Malgré tout, dans leur plan de déstabilisation du pays, ils avaient projeté une marche ce vendredi 28 février 2020, une manifestation sans autorisation que l’autorité a tout simplement interdit.
L’Union N°1313
Source : Togoweb.net