Présidentielle 2020: comment Fabre et la C14 peuvent encore se racheter

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Radjoul Mouhamadou est essayiste, blogueur, et étudiant résident au Canada. Il est auteur de plusieurs publications
sur le Togo et la crise politique. Nous vous proposons un article de la
Plateforme nationale de transition, conçue justement pour des
réflexions sur la construction d’un Togo nouveau. Lisez plutôt.
..

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 Le déboussolement de l’insurrection légitime des
Togolais de 2017-2018, depuis le dernier en date des dialogues intertogolais,
plonge le pays dans un profond désarroi dont on mesure encore mal les
conséquences. À six mois de la prochaine présidentielle, il est de bon ton de
mobiliser les bonnes âmes pour empêcher une troisième candidature de
Jean Pierre Fabre en 2020 que pour faire obstacle à un quatrième mandat de
Faure Gnassingbé. Il ne faut pas se tromper d’adversaire, cette inversion des
valeurs profite paradoxalement au chef de l’État sortant. On ne peut pas croire
que l’usure et la lassitude ont eu raison de la décence commune et de
l’enthousiasme démocratique des débuts. Quant aux forces d’opposition, la
panique stratégique qui les paralyse s’est muée en faillite politique et en
misère morale. Une radiographie du paysage politique togolais permet de mieux
appréhender les symptômes de la dégénérescence qui les frappe.

Lire aussi:Présidentielle 2020: divorce consommé entre Fabre et Adjamagbo !

 D’un côté, les uns se vautrent dans la politique
du coup de menton
, celle qui substitue la logorrhée à l’action, avec une
rhétorique bouffie dans la surenchère et l’hyperbole, mais incapable de se
matérialiser en agir politique. Chantres de l’appel au peuple et de la
Révolution, ils ont poussé la confusion et l’outrecuidance jusqu’à ériger la
Désertion comme forme achevée de la Résistance et du Courage politique. Ces
pieux prophètes du boycott ont mis les forces significatives d’opposition hors-jeu
politique
, désormais privées de leviers pour peser sur les institutions,
notamment les organes de gestion des élections. En créant un désert
oppositionnel dans les noyaux des institutions togolaises, la politique du
boycott génère un paradoxe. Elle condamne l’Opposition à l’échec électoral
qu’elle prétend conjurer. De l’autre côté, ne sachant plus à quel saint ni à
quel diable se vouer, il y a ceux – parfois les mêmes que les premiers- qui
confondent défaite et victoire, vessie et lanterne. Dans l’intervalle de leurs
échecs, ils ont manqué d’humilité pour tirer les indispensables leçons. Par une
sombre prophétie autoréalisatrice, toute l’Opposition togolaise – ou ce qui en
tient lieu- travaille à sa propre annihilation, en élevant des obstacles entre
elle et toute action politique réfléchie et coopérative. Toute une série de
raisons explique cela, notamment la toile de néant stratégique dans laquelle
l’Opposition togolaise s’est engluée. Dans ces conditions, la moindre volonté
efficace d’agir est corrompue par l’allergie à la critique et la haine de
l’agir raisonné.

Lire aussi:Succession à Lomé II: le choix de Faure contesté par les lobbies kabyè d’UNIR

  Parlons nettement, la crise de l’Opposition touche
aux virages manqués, aux visages usés et usages périmés. Même si la bataille du
turnover générationnel est urgente, il faut séquencer les priorités. Il
est impérieux, sous la tyrannie du calendrier électoral de 2020, de délimiter
les bords de la tâche à accomplir, pour éviter d’abandonner le pouvoir ad vitam aeternam à Faure Gnassingbé. En considérant la
balance du rapport des forces en présence et les multiples contraintes –
institutionnelles, législatives, calendaires, financières, etc-, l’Opposition
togolaise peut encore jouer une dernière carte. Certes, la marge de
manœuvre est extrêmement étroite mais elle reste la seule option jouable.
 D’abord, pour gagner une partie presque perdue, il faut cesser de croire
que la défaite est au bout du parcours. L’esprit de défaite déteint sur la
volonté d’agir et pousse à la faute. Ensuite, il est nécessaire de rassembler
les forces significatives d’opposition dans un nouveau cadre organisationnel ad
hoc
pour:

  • Construire une stratégie électorale
    commune
    (toutes les options y seront discutées, sauf l’option
    candidature unique issue d’un accord exclusivement électoral ne reposant pas
    sur un accord inclusif de gouvernement préalablement ficelé
    ) et un programme
    de consolidation démocratique post-Gnassingbé
    ;
  • Éviter la multiplication de candidatures au
    risque d’émietter l’électorat d’opposition (ne pas oublier que même
    des scrutins à deux tours peuvent se perdre dès le premier
    ) ;
  • Encourager la participation électorale
    pour limiter les effets de l’abstention différentielle ;
  • Développer des techniques efficientes de
    compagne
    et des outils de vigilance électorale;

Lire aussi:Présidentielle 2020: les chances de l’opposition

Le plus dur n’est pas de perdre, mais de gagner… La défaite console et la victoire met au défi.

Radjoul Mouhamadou, blogueur, essayiste, étudiant résident au Canada

Source : Togoweb.net