PIRATERIE MARITIME EN AFRIQUE : Prise de conscience et budget affecté permettent une sécurité améliorée

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PIRATERIE MARITIME EN AFRIQUE : Prise de conscience et budget affecté permettent une sécurité améliorée

L’insécurité et l’imprévisibilité de l’occurrence des actes illicites qui compromettent la sécurité des navires et la sûreté de leurs passagers et de leurs équipages est devenu inquiétant au cours des dernières années en Afrique. Il est question d’enlèvements de membre d’équipages, de détournements de navires, de sabordages ou de destructions de navires par des explosifs, avec des passagers menacés, séquestrés, volés, blessés et tués.

Aucun Etat africain ne peut sérieusement s’opposer à la mise en place de mesures destinées à prévenir ces actes illicites. Encore faut-il s’en donner les moyens et prévoir une répression générale des actes illicites dirigés contre la sécurité de la navigation maritime qui mettent en danger des vies humaines innocentes, compromettent la sécurité des personnes et des biens, gênent sérieusement l’exploitation des services maritimes, avec des conséquences sur l’efficience des échanges et du commerce maritime local et global.

1. BAISSE DES ATTAQUES MARITIMES MONDIALES AU PREMIER SEMESTRE DE 2019
Selon le dernier rapport de juillet 2019 du Bureau maritime international (BMI 1) et de son Centre de rapports sur le piratage 2, le niveau de piratage et d’attaques maritimes ont baissé. En effet, le nombre d’incident de piraterie et de vol à main armée à l’encontre de navires au premier semestre de 2018 est passé de 107 à 78 à la même période en 2019 avec 57 navires arraisonnés, soit 73 % de toutes les attaques. Rappelons que ceux que l’on désigne comme des pirates ont tué à ce jour une personne, pris en otage 38 membres d’équipage et en ont enlevé 37 autres pour obtenir une rançon.

2. AFRIQUE DE L’OUEST, ZONE LA PLUS DANGEREUSE DANS LE MONDE
L’Afrique de l’Ouest notamment le Golfe de Guinée demeure l’espace la dangereuse au monde 3. Sur les 75 marins pris en otage ou enlevés contre rançon dans le monde entier en 2019, 62 ont été capturés dans le Golfe de Guinée, au large des côtes du Nigéria, de la Guinée, du Togo, du Bénin et du Cameroun. 73 % de tous les enlèvements en mer et 92 % des prises d’otages ont eu lieu dans le Golfe de Guinée. Les attaques de pirates augmentent dans le Golfe de Guinée. Au moins 27 membres d’équipage ont été enlevés par des pirates armés au premier semestre de 2019 contre 25 pour la même période en 2018.

3. SUCCÈS DE LA POLICE MARITIME NIGERIANE
Toutes ces attaques ont lieu au large des côtes africaines, soit en moyenne 65 milles marins de la côte. « Sur les neuf navires visés dans le monde, huit se trouvaient au large des côtes du Nigéria, premier producteur de pétrole en Afrique ». Il y a donc bien un problème. Il est vrai que les attaques perpétrées au 2e trimestre de 2019 est en diminution dès lors que la police maritime du pays concerné, est informé à temps, est équipé pour envoyer un patrouilleur. Pour le Nigeria et au cours du 2e trimestre, les incidents sont passés de 31 en 2018 à 21 en 2019. La réalité est que de nombreuses attaques ne sont pas signalées par les navires qui pour diverses raisons trouvent des solutions « à l’amiable » pour éviter des contrôles inopinés.

4. SÉCURITÉ MARITIME : PARTENARIAT GAGNANT ENTRE GUINEE EQUATORIALE ET L’ESPACE
La coopération entre la Guinée équatoriale et l’Espagne ont donné de bons résultats. En effet, des navires de la marine de la Guinée équatoriale et de l’Espagne sont intervenus en mai 2019 suite au détournement à 41 milles marins au large de Luba, en Guinée équatoriale d’un navire remorqueur nigérian. Sur un autre cas et suite à une attaque contre un porte-charge maltais dans la même zone, les pirates ont utilisé un navire remorqueur pour leur attaque illégale et criminelle. L’équipage s’est protégé contre les assaillants en se retiré dans la citadelle du navire, la partie la plus sûre du navire.

Toutefois, lorsque la police maritime est intervenue, les pirates ont quitté précipitamment le navire, ce qui a permis la libération de l’équipage. La sécurité maritime dépend directement de l’information en temps réel et l’intervention rapide notamment avec des navires de guerre. Aucun chiffre sur le coût de cette intervention pour les responsables et propriétaires du navire. Mais la sauvegarde de la vie n’a pas de prix. La réalité est qu’il faut que les gouvernements africains, notamment ceux du Golfe de Guinée, doivent mettre plus l’accent sur la vigilance, la prévention et le contrôle de la piraterie maritime et moins dans les « conférences de chefs d’Etat » sans mise en œuvre des recommandations.

5. TRANSFERER PLUS DE BUDGET DE SÉCURITÉ VERS LA LUTTE CONTRE LE PIRATAGE MARITIME
L’Afrique, et plus particulièrement le Golfe de Guinée ne pourra plus continuer à marginaliser la lutte contre le piratage maritime. Il faudra évoluer en s’attelant à ne plus agir dans le cadre d’une réaction suivie de conférences sans lendemain, mais d’agir dans le cadre d’une politique de régulation et d’affectation de ressources substantielles à des structures spécialisées et compétentes.

Il ne s’agit pas seulement d’organiser les contrôles, mais les Gouvernements doivent s’organiser avec des organisations spécialisées pour :

organiser la cartographie et des statistiques indépendante, sans parti pris, ce en temps réel de la circulation des navires et donc des pirates en imposant un système d’auto-signalisation avec une intervention automatique pour tous navires qui refuseraient de s’autosignaler ;
récolter sur la base de la transparence le maximum de données ponctuelles sur la motivation des pirates afin de mieux comprendre les incidents de piraterie, de kidnapping, de rançonnage, de vol à main armée, et d’assassinats, si possible en recoupant les informations obtenues directement des agences d’intervention, les propriétaires et armateurs réels des pavillons de plaisance et des bateaux, des capitaines de navires, etc. ;
maîtriser la connectivité afin d’assurer le transfert rapide et instantané des données de piraterie récoltées tant au niveau national, régional qu’international notamment avec le Système Mondial de Détresse et de Sécurité en Mer (SMDSM) afin d’alerter les responsables de sécurité publique et privée en lien avec le navire, les personnes, les biens ou toutes activités maritime illégales identifiables.
Bref, les autorités africaines doivent cesser de considérer que la sécurité doit se faire en priorité sur le territoire national, donc au sol avec en filigrane leur propre protection pour souvent se maintenir au pouvoir. Cette prise de conscience devrait rééquilibrer les affectations de ressources par les autorités publiques vers la lutte contre le piratage maritime, ce de manière permanente. YEA.

21 août 2019.

Dr Yves Ekoué AMAÏZO.

Directeur Afrocentricity Think Tank

© Afrocentricity Think Tank.

Source : www.icilome.com