Pertes post-récoltes ou le supplice des maraîchers

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Emballage des choux dans un maraîcher aux abords de la rivière Kara

Des nourritures, volontairement ou non, jetées alors que le monde en manque: Ainsi se dresse le tableau où les uns sont dans l’abondance alors que la disette sévit dans d’autres contrées. Des récoltes n’atteignent pas les marchés avant décomposition. C’est un paradoxe alimentaire qui régit le monde. A l’origine, le manque de gestion équitable de la production alimentaire. Selon les données, le gaspillage se fait plus ressentir dans les pays développés pendant les pertes post récoltes sont l’apanage des pays en voie de développement. Le Togo, un pays d’Afrique de l’Ouest se trouve être dans le lot.

Après une enquête auprès d’un groupe de jardiniers de la ville de Kara (450 km au nord de Lomé, la capitale du Togo) le constat est quasi alarmant: Plusieurs produits maraîchers se détériorent avant leur mise en vente. On parle donc de pertes pour ces agriculteurs et par ricochet, une entrave à l’alimentation durable.

Une alimentation durable est une alimentation qui veille à protéger et à respecter la biodiversité et les écosystèmes, économiquement équitable, accessible et qui permet surtout de rendre favorable les ressources naturelles.

Or, il s’avère de le tiers (1/3) de la nourriture produite dans le monde est jetée ou perdue; ce qui ne garantit pas une alimentation durable aux générations futures.

Au Togo, 40% de la production agricole sont perdus

Au Togo, les données fiables et à jour par rapport aux pertes post-récoltes sont quasi-inexistantes. En 2013, la ministre de l’Environnement et des Ressources Forestières d’antan Dédé Ekoué, déclarait qu’au Togo 40% de la production agricole sont perdus alors que l’agriculture demeure le secteur clé de l’économie du Togo (35 à 40%). Le cas des jardiniers aux abords de la rivière Kara est illustratif. Ils dépensent pour faire leur potager mais n’ont pas de rendement proportionnel.

Notre investigation a pris en compte les exploitations de trois jeunes spécialisés dans la culture des tomates, piments verts, carottes, betteraves, laitues, choux, bref des légumes qui permettent d’approvisionner les populations urbaines dans cette ville à 450 km environ au Nord de Lomé.

Les Changements climatiques et l’instabilité des prix: deux principales causes des pertes post-récoltes chez les producteurs maraîchers à Kara

Ces jeunes font face aux pertes de leurs récoltes qu’ils justifient par deux raisons: Les intempéries et la chute des prix sur le marché étant donné qu’ils n’ont pas de moyens appropriés pour conserver leurs produits maraîchers. En 2016, le thème de la journée mondiale de l’alimentation était: le climat change, l’alimentation et l’agriculture aussi. Une évidence dans les pays en voie de développement comme le Togo où l’agriculture est subordonnée aux saisons.

Anthonio Isaac Monteiro, Représentant résidant de la FAO (Fonds des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation) au Togo déclarait que « quand le climat change, cela a un impact sur l’agriculture. Puisque l’agriculture dans un pays en voie de développement comme le Togo, est une agriculture pluviale. Quand il pleut trop ou pas du tout ou encore lorsqu’il ne faut pas qu’il pleuve, on a des problèmes. Il faut développer des mécanismes de résilience et d’atténuations des effets climatiques ».

« Il arrive que si nous semons très tôt et qu’il y a crue de la rivière cela emporte nos cultures » explique Tchass jeune jardinier qui pour profiter de l’eau fait son jardin sur les rives de la rivière Kara. A 15 km de là, Pastor également raconte: « Si j’ai des plantes de laitue, de choux ou du poivron et qu’il y a mévente, il n’y a rien à faire. C’est une perte. Puisque qu’on n’a pas de chambre froide pour les conserver le temps de les revendre « 

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Or, selon la FAO, des émissions de gaz à effet de serre dues à la nourriture en décomposition dans les décharges émettent du méthane, un gaz à effet de serre environ 25 fois plus toxique que le dioxyde de carbone et chaque année les pertes et les gaspillages alimentaires génèrent 8% des émissions de Gaz à effet de serre.

Les émissions mondiales de gaz dues aux pertes et au gaspillage alimentaire sont presque égales à celles provoquées par le transport routier ce qui accélère les changements climatiques tout en engendrant l’insécurité alimentaire.

Les pertes et les gaspillages alimentaire constituent un coup dur à l’Objectif 2 des 17 Objectifs de Développement Durable qui préconise l’élimination de la faim dans le monde. A cette allure, il est impossible d’anéantir la faim sur la planète d’ici à 2030.

La transformation et la conservation des produits agricoles: Une des solutions envisageables

Afin de limiter les pertes alimentaires, un jeune togolais a eu l’ingénieuse idée de transformer les tomates, de les embouteiller et de les conserver pour un usage plus ou moins à long terme et à convenance.
 » Notre objectif premier est effectivement de lutter contre le gaspillage et la perte des revenus des agriculteurs parce qu’effectivement quand le paysan produit et qu’il n’arrive pas à vendre c’est une perte. On lui propose de nous les vendre à un bon prix pour lui et pour nous. Nous les s conservons ensuite. Ça lui évite des pertes post récoltes. Nous voudrions également livrer ce produit à la population à un prix stable en période de pénurie et d’abondance  » a expliqué Ismaël Tanko, promoteur de Togo Timati (Tomates togolaises).

Avant cela, les paysans n’avaient qu’une seule option: Vendre la marchandise à vil prix sans compter, les prix des intrants (engrais) et tout ce qui va avec l’entretien. Un manque à gagner.

Et Pastor d’ajouter :  » Soit pour la tomate, la solution est d’extraire les graines, les conserver et les revendre à la nouvelle saison ou les réutiliser soi-même ».

Il est évident que les personnes victimes de sous-alimentation dans le monde sont des petits agriculteurs. Ils sont aussi vulnérables à la hausse des températures et autres catastrophes liés aux aléas climatiques. Il faut des actions concertées pour renforcer la résilience autrement, les populations les plus pauvres vivront davantage dans l’incapacité de produire et de générer des revenus destinés à se prendre en charge.

Magnim

Source : www.icilome.com