Nouvelle politique africaine d’Angela Merkel : Sans les réformes, l’Allemagne prendra désormais ses distances

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Nouvelle politique africaine d’Angela Merkel : Sans les réformes, l’Allemagne prendra désormais ses distances

En Afrique, l’Allemagne ne veut plus perdre son temps avec n’importe qui. La première puissance économique de l’Europe compte bien concentrer ses investissements sur des pays dits « réformateurs ». Le Togo devra donc attendre, peut-être longtemps encore !

Dans le document « L’Afrique et l’Europe : un nouveau partenariat pour le développement et la Paix » édité par le ministère de la Coopération allemande, on lit clairement que «2017 est l’année de l’Afrique en Allemagne et dans l’Union Européenne ». « L’Afrique est la priorité thématique de la présidence allemande du G20 », insiste le document dont le contenu démontre clairement un nouvel élan des autorités allemandes, et avec elles leurs collègues européennes, vis-à-vis de l’Afrique. Seulement, plus rien (ou presque) ne devra plus se faire comme avant.

Le pays d’Angela Merkel veut donner de nouvelles orientations à sa coopération avec l’Afrique. « Nous avons besoin d’un changement de paradigme dans la coopération avec nos partenaires africains (…) Nous ne devons pas tout modifier, mais améliorer un certain nombre de choses, les faire plus rapidement et de manière plus conséquente », avertit-on.

« Nous voulons abandonner le principe du saupoudrage pour aller vers un soutien ciblé des pays réformateurs », avertit le document de politique africaine d’Allemagne. « A l’avenir, nous coopérerons plus intensément avec les Etats réformateurs et qui le prouvent notamment à travers leur fiabilité, l’Etat de droit et la participation politique de leurs citoyens », poursuivent les Allemands.

« Conjointement avec les autres acteurs européens et internationaux, nous entendons fonder, avec les Etats africains les plus réformateurs, des partenariats réformateurs incitatifs, favorisant ainsi un développement durable accéléré. A cet effet, nous allons rendre plus flexibles les instruments de la politique de développement de manière à réagir plus vite et de manière plus ciblée aux mutations politiques », promet-on.

Mais l’Allemagne prévient : « A l’avenir, nous coopérerons plus intensément avec les Etats réformateurs et qui le prouvent notamment à travers leur fiabilité, l’Etat de droit et la participation politique de leurs citoyens ». C’est ici que les choses peuvent être plus compliquées pour certains pays africains comme le Togo qui sont carencés en principes démocratiques.

D’ailleurs l’Allemagne a déjà sélectionné un groupe très restreint de trois pays constitués du Ghana, de la Côte d’Ivoire et de la Tunisie avec qui elle lance ce qu’elle appelle « Plan Marshall pour l’Afrique ». Ces trois pays ont été retenus suivant les nouveaux critères définis par la diplomatie allemande qui insiste sur les réformes politiques et économiques.

La série de « Printemps » de la Coopération germano-togolaise dont le dernier date seulement de quelques mois n’ont pas suffi à propulser la Togo dans cette liste où se trouvent deux pays voisins. C’est aussi l’occasion de se rappeler les propos d’un certain Volke Berresheim qui en 2015, qui fit une déclaration persistante qui surprit le monde et provoqua l’hystérie de l’opposition qui n’a d’ailleurs pas manqué de le lui répondre. « Où en Afrique vous avez sur le plan politique, de la paix, du processus de démocratisation, du développement économique, un seul pays qui fait mieux que le Togo ? », laissait entendre cet ambassadeur dont, heureusement, le séjour a été bref sous nos cieux. Günter Nooke, Représentant personnel de la Chancelière pour l’Afrique, lui aussi se fendait dans les mêmes circonstances d’une déclaration similaire en estimant «le pays est sur le point de devenir un modèle pour la démocratisation en Afrique, et on ne peut qu’encourager ce processus qui est conduit sous l’impulsion du chef de l’Etat ».

Remarquez le « Sous l’impulsion du chef de l’Etat », dans le genre de ces discours de propagande dont les obligés de Faure Gnassingbé nous rebattent les oreilles au quotidien sur les canaux de propagande du régime. Bref, en les écoutant, on se croirait dans un paradis au Togo, le meilleur de toute l’Afrique. Et pourtant, le Togo, ancienne colonie allemande, n’a pas figuré parmi les trois premiers pays chéris du nouveau partenariat allemand en Afrique. Que s’est-il donc passé ? De deux choses l’une : soit, comme c’est parfois le cas avec certains diplomates, les diplomates allemands sont venus tenir des discours qui ne reflètent pas forcément la vraie vision que leur pays a des choses, mais l’ont quand même fait pour plaire à Faure Gnassingbé, tant pis pour la masse de bougnouls nègres qui, eux, ne seraient pas assez civilisés pour goûter à la démocratie dont eux-mêmes et leurs familles bénéficient chez eux en Allemagne.

Soit, il s’agit d’une hypocrisie diplomatique qui consisterait à éviter de dire ce qui fâche les pouvoirs publics, de peur de perdre le peu de concessions que ces derniers accordent aux entreprises allemandes. Dans les deux cas, plus aujourd’hui qu’hier, à la lumière des nouvelles positions de l’Allemagne, on ressent ces discours d’il y a deux ans comme de la pure provocation à l’égard du peuple togolais soumis à la deuxième plus vieille dictature au monde, derrière la Corée du Nord. Comment comprendre qu’on vienne insinuer qu’en Afrique, on ne puit trouver meilleur à vous et ne même daigner vous placer parmi les trois premiers qui devraient bénéficier chacun d’un chèque de 100 millions d’euros et d’autres accompagnements ?

En tout cas, on comprend désormais que pour l’Allemagne, le temps des aides au développement est en train d’être révolu et qu’il faille aider les Africains à créer un cadre sain pour attirer les investissements, et pourquoi pas d’hommes d’affaires allemands. Ce qui suppose que la justice doit être indépendante, la corruption combattue, les contre-pouvoirs efficaces et les partenaires sincères. Nous retenons que l’Allemagne est bien consciente qu’en Afrique, « nombreux sont les potentiels encore inexploités. Nous devons nommer les raisons. Dans un nombre élevé de pays africains, des élites corrompues exercent encore trop d’influences. Des élites qui préfèrent mettre leur argent à l’étranger plutôt que de l’investir sur place ; qui préfèrent vendre leurs surfaces agricoles et fonds de pêche à d’autres plutôt que de permettre de nourrir leur population ; qui autorisent des grands groupes à exploiter leurs ressources minières sans création de valeur ajoutée pour leur pays. De nombreuses populations africaines subissent une culture politique qui n’entend pas par « gouverner » le devoir de servir l’intérêt général, mais le droit de se servir soi-même. Ceci prive la jeunesse africaine de son avenir ».

Avec un tel niveau de connaissance des enjeux sur le continent africain, on ne peut plus tolérer à l’Allemagne des prises de positions complaisantes vis-à-vis de certains pays qui refusent à leurs peuples les droits fondamentaux dont jouissent les citoyens allemands. Et en Afrique, les dirigeants doivent eux aussi se rendre compte que le monde d’aujourd’hui n’est plus celui de 1967 ni même de 2005. Les paradigmes évoluent et le changement va davantage s’accélérer. Le pouvoir en 2007 ne peut plus être conçu de la même manière qu’il y a quelques années. Il reviendra, quoi qu’il en soit, aux citoyens africains d’être les garants de ces évolutions, de sorte à veiller que leurs pays ne puissent, cette fois encore, rater le tournant de la prospérité qui passe, forcément, par une gouvernance bien loin de celle qui est actuellement pratiquée dans plusieurs pays du continent africain. Les Allemands auront beau dire, il incombera aux Africains de veiller que les actes suivent la parole.

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