Nigeria – Dangote tout-puissant : héros de toute l’Afrique et homme d’affaires impitoyable

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En passe de multiplier ses revenus par cinq à l’horizon 2021 grâce à son double projet de raffinerie et d’usine de fertilisants, l’homme le plus riche d’Afrique poursuit son irrésistible ascension, sans qu’il soit certain qu’elle profite au plus grand nombre. Portrait d’un capitaine d’industrie prêt à tout pour étendre son empire.

«Dangote, Dangote, Dangote still dey find money o… » Le petit prince de l’afro-fusion nigériane, Burna Boy, n’a pas manqué l’occasion de faire le buzz en croquant l’icône. Sorti en mars, le titre Dangote consacre une nouvelle fois la figure héroïque du milliardaire originaire de Kano, symbole de la réussite au pays de l’argent roi, phare lointain dans la nuit des classes laborieuses. Mais sans manquer de l’écorner. En filigrane, Burna Boy pose la question qui fâche : comment peut-on être si riche dans un pays où – record mondial – près de 87 millions de personnes (sur)vivent en situation d’extrême pauvreté ?

C’est là tout le paradoxe Aliko Dangote, que nous avons rencontré à Paris en janvier puis à Abidjan en avril, mais qui ne nous a pas accordé d’interview formelle pour cet article. L’homme le plus riche du continent (sa fortune est estimée à 16,7 milliards de dollars par Bloomberg, à 10,3 milliards par Forbes) est un personnage complexe et ambivalent. À la fois héros de toute l’Afrique et homme d’affaires impitoyable, « fils de » et self-made-man, grand avocat de l’ouverture des marchés africains à son ciment et opposant inlassable à la concurrence au Nigeria, philanthrope et économe, promoteur de la fierté africaine en quête de reconnaissance du business mondialisé…

À 62 ans, son ascension paraît plus que jamais irrésistible. Quasi inconnu hors du Nigeria il y a dix ans, le Haoussa aux yeux clairs jouit désormais d’un statut digne d’un chef d’État – il dispose d’un passeport estampillé Union africaine –, et son aura dépasse allégrement les frontières du continent.

« Il me fait un peu penser à ce qu’était devenu Mandela. Quand un grand de ce monde vient aujourd’hui en Afrique, et a fortiori au Nigeria, il veut absolument le rencontrer », confie un proche. Stakhanoviste et affable, le « prince de Kano » n’hésite pas, en ces occasions, à emmener son hôte en visite à Lekki, là où son royaume devient empire.

Un investissement de plus de 15 milliards de dollars

Sur le chantier de la raffinerie Dangote, à Lekki, au Nigeria, en juillet 2018. © REUTERS/Akintunde Akinleye

Tout, à propos de cette raffinerie, est immense

Sur cette bande de terre gorgée d’eau, à l’est de Lagos, s’échafaude depuis 2014 le projet le plus ambitieux en cours en Afrique. Les chiffres seuls donnent le vertige. Plus de 15 milliards de dollars d’investissement estimés pour une raffinerie de pétrole (10 milliards minimum), une usine de fertilisants (3 milliards) et des kilomètres de pipelines (2,5 milliards).

« Tout, à propos de cette raffinerie, est immense », sourit-il lui-même. Pour ce faire, Aliko Dangote a acquis 2,7 millions de m2 de terrain en friche. Une « jungle » et des « marais » concède-t-il, qu’il a recouverts de 365 millions de m3 de sable excavés depuis les côtes nigérianes.

« Nous avons dû construire 136 km de routes et notre propre port afin de pouvoir réceptionner et transporter les gigantesques machines nécessaires », énumérait-il de sa voix basse, presque timide, en avril, à Abidjan, lors de la conférence annuelle organisée par son ami milliardaire Mo Ibrahim.

Avec une capacité de 650 000 barils par jour, cette mégaraffinerie est destinée à transformer à elle seule un tiers de toute la production du Nigeria. Quant à l’usine de fertilisants, d’une capacité de 3 millions de tonnes par an, elle exportera de l’ammoniaque et de l’urée, probablement jusqu’en Amérique du Sud.

Un chantier titanesque, « fou » pour certains « quand on connaît le pays ». « Imaginer construire une telle usine près de Lagos… Qui d’autre aurait l’audace d’entreprendre ce projet au Nigeria ? » interpelle un banquier européen qui a travaillé avec lui.

Si la structure de financement n’a pas été divulguée, selon différentes sources, Aliko Dangote aurait engagé entre 5 et 6 milliards de dollars de sa propre poche pour rendre le projet réalisable. À l’image de ce qu’il appelle encore aujourd’hui « la meilleure décision de sa carrière » lorsque, en 2005, pour construire sa première cimenterie, il avait personnellement investi 319 millions de dollars au côté d’un prêt de 479 millions de dollars de la Banque mondiale.

L’équivalent du budget d’un État

Aliko Dangote, lors du CEO Forum à Abidjan en 2016. © ERIC LARRAYADIEU/AFRICA CEO FORUM/JA

Les revenus de Dangote Group passeront de 5 à 28 milliards de dollars, soit l’équivalent du budget de l’État en 2018

D’après Aliko Dangote, dès l’année d’entrée en production de ce projet, « les revenus de Dangote Group passeront de 5 à 28 milliards de dollars ». Soit un peu plus de 7 % du PIB du Nigeria et l’équivalent du budget de l’État en 2018.

Son holding regroupe une bonne dizaine d’entreprises dont quatre sont cotées à la Bourse de Lagos : Dangote Cement, Dangote Sugar, Dangote Flour Mills (DFM) et National Salt Company of Nigeria. Le cœur du réacteur en demeure le ciment, qui génère la majorité de ses revenus (2,5 milliards de dollars en 2018) et l’essentiel de ses bénéfices (1,2 milliard de dollars en 2018). Une société devenue panafricaine ces dix dernières années avec l’extension de ses activités au Ghana (2011), en Afrique du Sud (2014), au Cameroun, en Zambie, en Éthiopie et au Sénégal (2015), en Tanzanie (2016), au Congo et en Sierra Leone (2017).

Mais l’hypercroissance du groupe ne se déroule pas sans heurts. À l’origine prévue pour 2018, la raffinerie n’est plus désormais annoncée par lui-même qu’en 2020… et certains observateurs tablent plutôt sur 2021. Des délais qui, compte tenu de la taille du projet, lui ont déjà coûté plusieurs centaines de millions de dollars. C’est sans doute à cette aune qu’il faut interpréter les différentes cessions d’actifs réalisées ces dernières années ou toujours en cours.

« Entre 2015 et 2018, Dangote a procédé à la vente de plus de 10 % de ses actions dans Dangote Cement (passant de 95 % à 85 %), équivalant à près de 550 millions de dollars, avance un analyste de la place à Lagos. Cette année, il devrait se séparer de DFM, la branche minoterie de son groupe, pour laquelle le groupe Olam a offert en avril 363 millions de dollars. » De l’argent frais pour financer Lekki.

Ultracompétiteur et en permanence aux manettes

Aliko Dangote, à Lagos en 2012. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Si vous n’avez pas d’ambition, vous ne devriez pas être en vie

Réputé près de ses sous, l’homme d’affaires, qui vit à Victoria Island, enclave huppée de Lagos, ne recule devant rien quand il s’agit de business. « Le pétrole est un défi colossal, rappelle notre analyste. Ce n’est pas du tout son domaine. Mais avec lui, tout est possible. Au départ novice dans le ciment, il est devenu numéro un. Dans le sucre, pareil… Quand il choisit une cible, c’est pour tout emporter. »

Une inclination pour le risque confortée par un savoir-faire et une implication hors du commun. « Ce qui fait la différence, c’est sa capacité d’exécution, observe un banquier qui a travaillé avec lui. Certes, il est minutieux, visionnaire, mais sa capacité à maîtriser le risque vient de son implication dans l’exécution. Pour la raffinerie, par exemple, c’est lui qui négocie en direct avec les fournisseurs, comme il le faisait pour ses cimenteries. »

Décrit par un homme politique africain qui le connaît bien comme un « ultracompétiteur qui n’accepte pas d’être numéro deux », « constamment ambitieux quel que soit le niveau de sa fortune » et « au fait des moindres détails de son business », le « roi du ciment » est « tout entier consacré à ces affaires » selon un homme d’affaires africain proche de la famille. « À tel point qu’il peut en être ennuyeux… Il est difficile de lui trouver une autre passion que le travail, et ses conversations tournent rarement autour d’autre chose. Il se lève avant 6 heures du matin et se couche relativement tard. Il n’est pas rare de le voir arriver à un dîner à 22 heures, pour le quitter à peine une heure après et se rendre à une réunion… »

En permanence aux manettes de son empire, bien qu’il ne cesse de répéter qu’il devrait déléguer davantage, l’homme le plus riche d’Afrique ne manque d’ailleurs jamais d’exalter lui-même ce caractère à grand renfort d’aphorismes : « Si vous n’avez pas d’ambition, vous ne devriez pas être en vie » ; « Je ne me repose jamais avant d’avoir accompli quelque chose », etc.

Protéger ses affaires grâce aux appuis politiques

Aliko Dangote, ici aux côtés du président ivoirien Alassane Ouattara, s’est rendu à Abidjan pour la quatrième édition du Africa CEO Forum. © Africa CEO Forum

Dangote a depuis longtemps la réputation de s’appuyer sur ses relations politiques pour bénéficier de rentes de situation

Musulman pieux – il a effectué plusieurs fois le pèlerinage à La Mecque, observe le ramadan et prie cinq fois par jour –, « Alhaji » mène ainsi une vie qualifiée d’« austère, presque monacale », selon quelqu’un qui l’a côtoyé.

Mais cette dévotion au travail est loin d’expliquer à elle seule sa réussite. À la moindre occasion, Aliko Dangote cherche à évoluer dans un environnement non concurrentiel, faisant montre d’un opportunisme féroce, voire brutal. Que ce soit dans le sucre ou le ciment, il a su investir dans des secteurs où il s’est retrouvé d’emblée en situation monopolistique ou quasi monopolistique.

Son meilleur ennemi, le milliardaire Abdul Samad Rabiu, fondateur du groupe BUA, nous confiait, un brin amusé, lors du Africa CEO Forum de Kigali en mars : « Aliko n’aime rien tant que le monopole. Il est prêt à tout pour protéger ses affaires. […] Que vous soyez son ami, son cousin, son frère ou sa fille n’a aucune importance, il défendra ses intérêts de la même façon. C’est dans son sang. »

Proche de l’ex-président Olusegun Obasanjo, dont il finança la campagne de réélection en 2003, comme de l’actuel vice-président du Nigeria, Yémi Osinbajo, de l’ancien gouverneur de Lagos (1999-2007), Bola Tinubu, ou de l’ex-président de la Banque centrale du Nigeria et actuel émir de Kano, Sanusi Lamido Sanusi (dit Muhammadu Sanusi II), Aliko Dangote a depuis longtemps la réputation de s’appuyer sur ses relations politiques pour bénéficier de rentes de situation. Il y a quinze ans déjà, Wikileaks révélait des câbles américains très critiques.

« Pour ses soutiens, il symbolise un Nigeria capable de s’industrialiser et de faire autre chose que du simple commerce. Ses détracteurs prétendent que c’est un prédateur utilisant ses connexions dans une économie corrompue pour faire pencher la balance en sa faveur et écarter les concurrents. La vérité réside entre ces deux caricatures. […] Ce n’est pas un hasard si de nombreux produits bannis à l’importation au Nigeria sont des marchés dans lesquels il a des intérêts. »

Proximité avec les présidents nigérians

L’ancien président Goodluck Jonathan lors d’une réunion dans un hôtel d »Abuja, la capitale nigériane, en mars 2015. © Ben Curtis/AP/SIPA

Soit Aliko Dangote est un génie sans égal dans le monde, soit le système l’aide

Entre 2010 et 2015, Aliko Dangote fut aussi conseiller économique du président Goodluck Jonathan. « Ce n’est pas qu’il fasse quoi que ce soit d’illégal, souffle un éminent banquier nigérian, il tire simplement le maximum des avantages que lui procure le système. À son propre profit. Regardez le prix du ciment au Nigeria, il est deux à trois fois plus élevé qu’ailleurs. Cela signifie des coûts plus importants pour tous les travaux d’infrastructures. Je trouve que l’image dont il bénéficie dans les médias manque de recul. La question que l’on devrait se poser est “quelle utilité apporte-t-il aux citoyens nigérians ? ” »

En 2016, un rapport de Bloomberg Intelligence avait mis en exergue les bénéfices incroyables réalisés par Dangote Cement, qui détient 65 % du marché du ciment nigérian, comparés aux autres cimentiers mondiaux. En 2015, les marges bénéficiaires de la compagnie étaient de 42,3 %, contre 17,2 % en moyenne dans le monde.

Un autre rapport de la Banque mondiale, également paru en 2016, montre comment le gouvernement nigérian a progressivement supprimé les licences d’importation de ciment à partir de 2012, au moment justement où Dangote Cement intensifiait sa production.

« Il n’y a qu’une seule alternative, commente notre banquier nigérian, soit Aliko Dangote est un génie sans égal dans le monde, soit le système l’aide. » La réussite mitigée des filiales africaines de Dangote Cement renforce cette impression d’un Nigeria particulièrement favorable au milliardaire. En production dans neuf pays d’Afrique, la compagnie a réalisé en 2018 un bénéfice de 1,36 milliard de dollars au Nigeria, contre une perte nette cumulée de 242 millions de dollars hors de ses bases.

Muhammadu Buhari, le 25 février à Abuja. © Bayo Omoboriowo/AP/SIPA

Sur la dévaluation du naira, la position du président Buhari a longtemps été favorable à Dangote

Pas de quoi cependant dissuader « le roi du ciment » de poursuivre son africanisation : en plus d’une quatrième cimenterie en cours de construction au Nigeria, deux nouvelles usines de production d’or gris sont programmées en Côte d’Ivoire et en Afrique du Sud. Mais son influence et sa hargne ne sont pas toujours récompensées, même au Nigeria.

« Pendant la crise de change, en 2015, raconte notre banquier nigérian, Aliko a tout fait pour que Buhari ne dévalue pas le naira. Pour le projet de Lekki, il a emprunté des milliards qu’il doit rembourser en dollars, et une dévaluation constituait un gros risque. »

La position du président Buhari lui a longtemps été favorable. Contre l’avis de nombreux économistes, entre mars 2015 et juin 2016, le chef de l’État a fait pression pour maintenir le taux de change officiel, considérant qu’une dévaluation « tuerait » la devise nationale. Las, il cédera finalement face à l’évidence.

« Too big to fail ? »

À Mfila, le nigérian Dangote a récemment ouvert la plus grande cimenterie d’Afrique centrale. © Muriel Devey Malu Malu pour JA

Les banques ont mis trop d’argent, et le gouvernement est trop désireux que la raffinerie entre en production

La place qu’il a acquise auprès des « gens qui comptent » à Lagos n’allait pourtant pas de soi pour cet enfant du Nord. Même pour le petit-fils de Sanusi Dantata (1919-1997), grand commerçant de Kano. Élevé à la mort de son père, à l’âge de 8 ans, par ce grand-père maternel, Aliko Dangote s’est lancé dans le transport de denrées alimentaires dès l’obtention de son diplôme de commerce de l’université al-Azhar (Égypte).

Au début des années 1980, il va réussir à acquérir une licence d’importation de ciment et émigrer dans la capitale économique. Mais Dangote mettra plus de vingt ans à opérer le tournant industriel qui le fera passer de riche commerçant à milliardaire, en visant les marchés d’importation pour les substituer à de la production locale.

D’abord dans le sucre, puis dans l’or gris. On sait toutefois, par l’intermédiaire d’un accident funeste, que dès le milieu des années 1990 il était parvenu à pénétrer le premier cercle du pouvoir à Abuja : en janvier 1996, son jeune frère, Bello Dangote (dont Aliko adoptera la fille par la suite), meurt dans un accident d’avion privé au côté du fils du général Sani Abacha, alors chef de l’État.

Aujourd’hui consacré « homme le plus puissant du Nigeria » et engagé dans des entreprises considérées comme « stratégiques » par son pays, le célibataire le plus prisé de Lagos ne semble plus avoir de limites. « L’usine de fertilisants va lui rapporter un argent monstrueux, anticipe un expert du business des engrais. L’intrant de base de l’urée et de l’ammoniaque est le gaz. Et il va toucher ce gaz au prix le plus compétitif du monde. Il est sûr de gagner. »

Quant à la raffinerie, « n’est-elle pas too big to fail ? se demande notre banquier nigérian. Les banques ont mis trop d’argent, et le gouvernement est trop désireux que la raffinerie entre en production… Je ne crois plus qu’il puisse perdre. »

Nigeria – Dangote tout-puissant : héros de toute l’Afrique et homme d’affaires impitoyable

 Il est aujourd’hui bien mieux entouré qu’il ne l’était auparavant

Reste que Lekki n’est pas la seule ambition qui l’empêche de dormir. Parallèlement, Aliko poursuit un autre objectif qui ferait figure de couronnement : l’introduction de Dangote Cement à la Bourse de Londres. « C’est un peu le pinacle de tout ce qu’il entreprend depuis des années », assure un banquier qui l’a côtoyé.

La reconnaissance ultime, celle qui le fera définitivement appartenir au gotha mondial et non plus “seulement” africain. Le rachat du club de football anglais Arsenal, pour lequel il a manifesté de l’intérêt à plusieurs reprises, peut également se lire comme une quête similaire, davantage que comme le prolongement de sa passion pour le football. Même si un proche ose : « Je ne l’imagine pas dépenser un dollar dans un investissement non productif… »

S’il s’est très tôt entouré d’un management international, et notamment indien, une nouvelle étape a été franchie entre la fin de 2017 et le début de 2018 avec l’enrôlement de véritables têtes d’affiche du monde des affaires venues notamment d’Europe. « Il est aujourd’hui bien mieux entouré qu’il ne l’était auparavant, observe un autre financier, qui a travaillé avec lui durant la dernière décennie. Et c’est logique. La taille de son empire est plus grande qu’il ne l’avait jamais imaginée et l’oblige à investir à l’étranger pour diversifier les risques et, en conséquence, à adopter de nouveaux standards en matière de gouvernance. […] Au bout de ce chemin, il y a l’introduction à Londres. »

Philanthropie et arrière-pensées politiques

Des nominations qui ne modifieront cependant pas un organigramme dominé par des Dangote : son frère, Sani, à son côté depuis le tout début, est vice-président et « numéro deux » du groupe et son cousin, Abdu Dantata, est directeur exécutif chargé de la logistique et de la distribution et « numéro quatre ». Mais celle qui attire tous les regards est sa fille, Halima. De plus en plus présente aux côtés de son père, elle est entrée dans le groupe en 2008 pour en devenir aujourd’hui le « numéro trois ». Une trajectoire qui en fait logiquement sa successeure naturelle aux yeux de différents observateurs.

De ce grand pouvoir conquis et à conquérir découlent de grandes responsabilités. L’homme le plus riche d’Afrique le sait. à l’instar des riches nigérians Jim Ovia, Gilbert Chagoury et Herbert Wigwe, qui figurent tous parmi ses intimes, Aliko Dangote possède sa propre fondation. Créée en 1994, elle est la plus importante d’Afrique subsaharienne selon ses dires . En 2014, il a annoncé lui céder des actions de la société Dangote Cement pour une valeur de 1,25 milliard de dollars, dont elle peut utiliser les dividendes.

Parmi ses actions emblématiques, le programme d’éradication de la poliomyélite au côté de la Bill & Melinda Gates Foundation lancé en 2013. Cultivée par ses soins, cette image de bienfaiteur national et d’afrocapitaliste philanthrope, ajoutée à sa casquette de capitaine d’industrie aux accents protectionnistes, lui confère désormais une aura que beaucoup jalousent dans un pays où la gabegie le dispute à la corruption. Dans son entourage, ils sont aujourd’hui nombreux à rêver pour lui d’un destin présidentiel en 2023. Mais il sera difficile à convaincre… Après tout, ne possède-t-il pas déjà plus de pouvoir que le président lui-même ?


Sa région natale, première bénéficiaire de la Fondation

Dirigée par la Nigériano-Nigérienne Zouera Youssoufou, très proche collaboratrice du milliardaire, la Dangote Foundation a une propension à privilégier les opérations dans le nord du Nigeria et, en particulier, dans la région d’origine de Dangote, Kano. L’organisation y a construit des unités de soins et y mène un programme alimentaire.

Elle a financé la rénovation et l’amélioration des infrastructures des universités Ahmadu-Bello (Zaria), Bayero (Kano), Kano State (Wudil), et d’Ibadan pour plus de 3 milliards de nairas (7,5 millions d’euros).

Selon Mme Youssoufou, la fondation « dépense entre 50 et 100 millions de dollars par an », faisant d’Aliko Dangote le plus grand philanthrope en Afrique, loin devant son compatriote Mike Adenuga, les Sud-Africains Patrice Motsepe et Nicky Oppenheimer ou même l’ensemble de la famille égyptienne Sawiris. à titre de comparaison, la fourchette donnée par la présidente de la fondation ferait de Dangote un membre du top 40 des milliardaires les plus généreux aux états-Unis.


Des vip au conseil d’administration

Aliko Dangote a effectué ces deux dernières années une série de recrutements de niveau international. Les Britanniques Cherie Blair, avocate et épouse de l’ancien Premier ministre Tony Blair, et Sir Michael Davis, ex-PDG d’Xstrata, et l’Indien Viswanathan Shankar, ancien membre du board de Standard Chartered, ont tous été nommés au poste de directeur non exécutif de Dangote Cement. En février, c’est le Français Guillaume Moyen, passé par Areva et OLA, qui est embauché comme directeur financier.

Jeune Afrique