Militaires attaqués: les incohérences dans la version du général Yark

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Attaquer des militaires – togolais, s’il vous plait – à l’aide de
machettes et de gourdins, leur arracher les fusils automatiques et
tenter d’organiser une insurrection armée ?! Vous n’êtes pas dans « Last
Empire War Z », « Game of War-Fire Age », bref un de ces jeux vidéo de
guerre, mais dans la réalité (sic). C’est le dernier punchline (sic) de
Son Altesse Généralissime Yark Damehame. C’est devant
une opinion hébétée que l’inénarrable ministre de la Sécurité et de la
Protection civile a exposé, samedi à la mi-journée, sur une certaine
insurrection armée déjouée, entre autres « YARKeries » servies. Et cela a
justifié la prise d’assaut de Sokodé, la terreur et des maltraitances
sur la population. Mais le bon sens appelle à un doute raisonnable sur
la version servie face aux incohérences XXL de sa sortie, aux
coïncidences suspectes…

Présumée insurrection déjouée

Cinq (05) gendarmes blessés, quatre (04) fusils AK47 emportés par les
assaillants, un camion clinker, un véhicule personnel d’un agent
brûlés…C’est le bilan présenté, samedi au cours d’un point de presse par
le ministre de la Sécurité et de la Protection civile Yark Damehame,
assisté de son collègue chargé des Droits de l’Homme et des Relations
avec les Institutions de la République Christian Trimua,
de ce qui est appelé une tentative de déstabilisation du Togo. A en
croire Yark Damehame, les agressions se sont déroulées à Lomé et à
Sokodé au petit matin de ce samedi. Dans la capitale, les assaillants se
seraient attaqués à une patrouille au niveau de l’échangeur et auraient
blessé au moins trois (03) éléments. « Ces insurgés se sont ensuite
transportés vers la banque Atlantique où deux gendarmes de garde qui s’y
trouvaient ont été violentés et leur armement emporté. Les malfrats ont
également tenté d’incendier le commissariat de police, malgré une
résistance avec les forces de l’ordre. Cela ne les a pas empêchés, avec
des cocktails Molotov, d’incendier la voiture d’un policier garée dans
la cour », a-t-il raconté par ailleurs dans son récit des faits.

Il s’agirait des assaillants « habillés en noir » et munis, excusez
du peu, de machettes et de gourdins, qui s’en seraient pris à des
patrouilles ou à des gendarmes en poste et armés, et réussi à arracher à
ces derniers leurs fusils automatiques. On vous épargne des autres
détails…Le ministre lie ces faits à de prétendus appels à une
insurrection armée lancés sur les réseaux sociaux sur ce samedi 23
novembre. Et il promet le feu et une tolérance zéro aux insurgés et à
leurs commanditaires. « La violence ne passera pas dans notre pays.
Faudrait pas qu’ils pensent qu’avec ces armes, ils pourront organiser
une insurrection. Qu’ils n’osent pas essayer. Ce que je leur conseille
est d’aller laisser ces armes quelque part. Sinon ils seront retrouvés
et nous les prendrons comme des poules. Même les commanditaires ne
seront pas épargnés », a menacé le ministre. Le commun des Togolais a
retrouvé, l’instant de cette sortie ce samedi, le Yark tout feu tout
flamme de la période des manifestations de 2017, qui promettait le
déluge aux manifestants, les militants du Parti national panafricain (PNP) notamment, menaçait de les exterminer s’ils osaient « faire wan-wan » (broncher).

Terreur, passage à tabac à Sokodé

A en croire le récit de Yark Damehame, c’est à Lomé que le gros des
événements s’est déroulé. Et c’est encore ici que trois (03) des cinq
(05) gendarmes blessés l’auraient été. En clair, c’est la capitale qui
devrait concentrer toute l’attention des autorités sécuritaires du pays.
En plus, toujours selon le ministre, d’autres villes telles que Kpalimé, Anié et Tchamba
étaient aussi dans le plan des insurgés (sic). Mais aussi curieux que
cela puisse paraitre, c’est Sokodé seule qui a encore concentré toutes
leurs énergies et payé le lourd tribut dans cette histoire.

A peine la lueur du jour était-elle perceptible ce samedi que la
ville a été prise d’assaut par l’armée. Les habitants se sont en fait
réveillés avec des chars et autres véhicules blindés remplis de
militaires armés jusqu’aux dents, positionnés à des endroits
stratégiques de la ville et d’autres circulant sur ses artères
principales. On croirait une scène de guerre ou une mission pour
débusquer des terroristes. Et ce qui devrait arriver, arriva. Comme ils
savent si bien le faire, les militaires rentraient dans les maisons,
forçaient les portes, passaient à tabac la maisonnée, soi-disant à la
recherche des armes emportées. Selon les témoins, personne n’était
épargné, même pas des acteurs politiques pourtant bien connus. Un
responsable fédéral d’un parti de l’opposition confie n’avoir été
épargné que grâce à un coup de fil passé au préfet du coin devant les
militaires tout excités prêts à les passer à tabac, lui et sa
famille…Durant cette journée du samedi 23 novembre particulièrement,
Sokodé et ses habitants ont re-goûté aux misères à eux faites au cours
de la répression des manifestations de contestation lors de la récente
crise, et Dieu seul sait si c’est fini…

Les incohérences signées Yark et les questions légitimes

Attaquer, à l’aide de machettes et de gourdins, des militaires
togolais réputés à la gâchette facile, armés d’AK47, en patrouille la
nuit et réussir à les en dépouiller ? Tenter de faire une insurrection
armée avec des armes blanches, face à des éléments d’une armée telle que
celle du Togo, qui savent tirer sans aucun remords et à bout portant,
même sur des enfants aux mains nues ? « Il faut bien avoir plusieurs vis
déréglées dans le cerveau et surtout fait son testament pour oser de
tels actes au Togo », a raillé un confrère. C’est en tout cas, ce qu’a
fait croire Yark Damehame par sa sortie.

« Nous avons suivi depuis quelques jours sur les réseaux sociaux, des
groupes d’individus qui se disent révolutionnaires et qui projettent
des actes de déstabilisation. Ces groupes se sont donné pour objectif, à
partir de ce 23 novembre, de s’attaquer aux édifices de l’État, aux
stations d’essence et de résister aux forces de l’ordre et de sécurité
par tous les moyens, avec pour intention finale de déboucher sur une
insurrection armée. Ils ont choisi des villes comme Lomé, Sokodé, Kpalimé, Anié, Tchamba et Mango
», a bredouillé Yark Damehame lors de son point de presse. Mais la
question de bon sens qui s’impose est celle-ci : pourquoi n’avoir pas
arrêté ces individus suivis depuis lors, mais les avoir laissés passer à
l’acte (sic) avant de monter au créneau ?

Autre curiosité, c’est le fait de s’en prendre aux populations de
Sokodé seules. «Les meneurs de ce groupe sont connus », a martelé le
ministre de la Sécurité. Avec les matériels d’écoute sophistiqués et
l’efficacité remarquable (sic) des services de renseignements togolais
(hum…), on ne saurait douter que ces présumés insurgés soient connus,
démantelés et appréhendés. Mais alors pourquoi s’acharner exclusivement
sur les populations de Sokodé, fracasser les portails et portes des
chambres, passer à tabac tout le monde, soi-disant à la recherche
d’armes emportées par des assaillants ? En plus, selon le récit de Yark,
c’est une seule arme qui l’a été dans cette ville, contre trois (03) à
Lomé. En clair, c’est dans la capitale que la fameuse recherche devrait
être plus rigoureuse. Mais aussi curieux que cela puisse paraitre, le
pouvoir a jugé de se rabattre sur Sokodé, pris d’assaut à peine la lueur
du jour apparue alors que les faits allégués se seraient déroulés vers 2
heures cette matinée de samedi. « Les armes emportées par les fameux
insurgés à Lomé ont-elles été envoyées par whatsapp à Sokodé ? », s’est
gaussé un concitoyen, qui croit à un assaut sur cette ville préparé
depuis longtemps.

Au demeurant, cette affaire se révèle une somme d’incohérences qui
appellent tout esprit sensé au doute légitime. Il en faut en tout cas
plus pour convaincre. Et le timing et les coïncidences (sic) avec
d’autres faits poussent davantage à la réserve. Cette fameuse tentative
de déstabilisation s’est déroulée seulement quelques jours ou même
heures après l’arrestation de présumés terroristes et la saisie d’armes
au cours d’une opération conjointe entre le Togo et le Ghana à la
frontière entre les deux pays, mais surtout au petit matin de ce samedi
où le Front citoyen Togo Debout organisait un meeting et appelait à une
marche quatre (04) jours plus tard pour une remobilisation des
populations dans la perspective de la présidentielle de 2020. Le pouvoir
cherche-t-il un prétexte pour semer la terreur et justifier le 4e
mandat de son « champion » ? La question est en tout cas loin d’être
farfelue.

Tino Kossi

Source : Liberté

Source : Togoweb.net