L’opposition Togolaise à la Croisée des Chemins : Illusion des locales ou révolution? 20 mai 2019

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L’opposition Togolaise à la Croisée des Chemins : Illusion des locales ou révolution?                                                                            20 mai 2019

Par Samari Tchadjobo, Allemagne
Nous ne le dirons jamais assez: une révolution populaire pour chasser Faure Gnassingbé du pouvoir est toujours possible. Nous tenons notre affirmation du fait qu´aucune dictature, soit elle militaire, tribale, clanique ou familiale, ne peut résister face à aucun peuple en colère et debout. La formation de la coalition des 14 partis de l’opposition qui avait suivi le soulèvement du 19 Août 2017 offrait une chance en or aux Togolais de s’organiser autour de leurs leaders pour venir à bout de ce régime par la rue. Et les débuts furent promettants jusqu’à ce que les vieux démons qui ont pour noms: hypocrisie, recherche de l’intèrêt personnel, repli exagéré de chacun sur son parti, viennent comme toujours plomber l’efficacité du regroupement et faire éclater la C14.

«…Malheureusement toutes les forces dites démocratiques n’ont pas les mêmes motivations. Et voilà pourquoi notre pays peine à se libérer. Sinon comment comprendre ce raccourci que veulent emprunter aujourd’hui certains politiciens ? A une certaine période des contestations toutes les conditions étaient réunies pour arracher notre liberté, à l’exemple de ce jour immémorial quand la C14 lança une de ses manifestations et à la surprise générale seules les villes de Tchamba, Mango , Anie , Kpalime, Bafilo et Sokode étaient debout pour répondre à l’appel et aux vœux de stratégie de maillage des villes de Tikpi. Les autres partis n’ont pas daigné à l’époque contribuer à cette dynamique et leurs fiefs comme Lomé, Atakpamé , Vogan , Tabligo , Tsévié , Aného.. sont restés passifs laissant leurs autres frères et sœurs à la merci de la répression barbare. Même les villes assiégées avaient défié la dictature pour répondre à cet appel ultime…»

Voilà un extrait du journal «L’Alternative» qui met le doigt sur les incohérences et surtout les bizarreries qui ont cours au sein de l’opposition togolaise. D’une part on crie sur tous les toits qu’on a marre de la gestion catastrophique du pays par le régime Gnassingbé, d’autre part on se mélange les pédales, ou on est en désaccord sur la meilleure stratégie, toutes les fois que les conditions d’une victoire du peuple semblent être réunies. Le comportement de l’attaquant qui, après avoir réussi à dribbler toute la défense adverse, se trouve nez à nez avec le gardien, mais décide de ramener la balle au centre du terrain.

Quand à l’époque nous relayions les appels des responsables du PNP sur la nécessité de réveiller les contrées de notre pays qui dorment encore, afin que toutes les populations du Togo fussent à même de se soulever le moment venu pour asphyxier le dictateur, on nous avait traité de tous les noms : communautariste, tribaliste, régionaliste et que sais-je encore. Non seulement ils n’avaient pas été capables de mobiliser, mais voilà plusieurs mois que la C14 appartient à l’histoire; aucun mouvement mobilisateur digne de ce nom, à se mettre sous la dent, venant de la part de ceux-là qui ne manquent pas l’occasion de se vanter d’être opposants depuis très longtemps, comme si être opposant était une fin en soi.

Pire, on nous brandit aujourd’hui le recensement et les locales comme une nouvelle trouvaille de l’opposition pour mettre une fois pour toutes le régime Gnassingbé hors d’état de nuire. Que le pouvoir de Lomé soit de mauvaise foi et n’ait pas la bonne volonté politique pour faire de sérieuses réformes n’est plus un secret pour personne, et c’est pourquoi le comportement de l’opposition participationniste est d’autant plus surprenant.

Non, on n’a pas le droit de marcher sur ses principes pour participer à des élections qui n’avancent en rien la lutte, mais font le jeu du pouvoir. On n’a pas le droit de toujours commettre les mêmes erreurs pour les mêmes résultats. À force de continuer à avoir le même comportement démobilisateur malgré l’évidence, on finit par être suspect et les mauvaises langues ont vite fait de vous accuser de rouler pour le régime que vous prétendez combattre. C’est pourquoi il est plus sage de rester cohérent avec soi-même. C’est pourquoi il faut éviter de dénoncer une chose aujourd’hui et la trouver acceptable le lendemain. Monsieur Jean-Pierre Fabre dénonce le processus électoral, exige sa remise à plat avant toute participation aux locales et plus tard aux présidentielles; quelques jours après, au meeting de Tsévié, sans que ses revendications soient satisfaites, il annonce que sa formation politique ANC participera au scrutin municipal du 20 Juin prochain !

L’activisme politique qui surprend le plus ces dernières semaines est celui de Mgr Fanoko Kpodzro. Certes, son engagement pour dénoncer la violation des droits de l’homme, pour faire pression sur le régime incarné par Faure Gnassingbé afin qu’il fasse les réformes est louable. Mais quand ses sorties deviennent théâtrales, quand le vieux prélat va sensibiliser les femmes du marché à la criée pour qu’elles aillent se faire recenser pour participer aux élections locales, comme si c’était un scrutin qui nous amènerait l’alternance, nous sommes en droit de nous poser des questions. On aurait applaudi si Mgr Fanoko Kpodzro avait sillonné les principaux quartiers de Lomé et certaines villes dormantes pour sensibiliser les populations pour sortir massivement dans le cadre des marches de la C14.

Les élections locales sont-elles vraiment plus importantes que s’organiser pour empêcher Faure Gnassinbgé d’être candidat en 2020, ou le forcer à faire des réformes qui ouvriraient la voie à des élections vraiment libres? Nous estimons que les partis politiques et les leaders de la société civile qui ont fait le choix d’aller se faire recenser pour les locales, fuient le vrai combat et font gagner du temps à l’adversaire politique d’en face. Après l’échec de la coalition de l’opposition, la C14, tout n’est pas perdu. L’opposition, ou ce qu’il en reste, devrait rapidement trouver la meilleure stratégie pour préparer le peuple au combat de 2020. Le refus du régime d’enregistrer des togolais supposés de l’opposition au cours des trois jours de recensement, fait partie de sa stratégie du double langage, de mauvaise foi et de volonté de fermer le jeu politique aux adversaires sérieux. Les leaders des formations politiques et les leaders de la société civile participationnistes ont-ils encore besoin d´y aller avant de le savoir?

Togo-Online.net