En place depuis un peu plus de trois mois, l’administration Weah n’aura pas connu d‘état de grâce avec les médias libériens. Face aux accusations de vouloir museler la presse, l’ancien footballeur a dû leur promettre une totale liberté de critique.
Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), une ONG basée à New York, a exprimé son inquiétude à la suite “de poursuites en diffamation d’1,8 million de dollars américains contre Front Page Africa, un journal libérien visé de longue date par des plaintes et harcèlements pour sa couverture critique des gouvernements successifs”.
Le ministère de l’Information a démenti toute implication du gouvernement ou du président Weah dans ces poursuites, qui portent sur un litige privé à la suite de la parution d’une annonce publicitaire.
Je vous promets 200 % de liberté de presse et d’expression sous mon gouvernement (…) Jamais je n’utiliserai ma position pour persécuter ceux qui me critiquent
Mais la direction de Front Page Africa et le CPJ attribuent ces tracasseries à des proches du pouvoir. Ils soulignent notamment la présence parmi les plaignants d’un membre jusqu‘à une date récente du parti de M. Weah et l’absence de poursuites contre d’autres médias mois critiques ayant publié la même annonce.
“Le Liberia a une regrettable tradition de poursuites en diffamation exorbitantes destinées uniquement à harceler et intimider les journalistes, qui se soldent par leur emprisonnement et la fermeture de nouveaux médias”, a souligné jeudi le CPJ dans un communiqué.
Lors d’une visite à Monrovia en mars, le rapporteur de l’ONU sur la liberté d’expression, David Kaye, avait appelé l’administration Weah à développer les acquis du Liberia dans ce domaine, insistant sur “la décriminalisation de la diffamation” et la “transformation du service de radiotélévision”.
Parallèlement à la plainte contre Front Page Africa, une passe d’armes a opposé M. Weah au correspondant de la BBC, Jonathan Paye-Layleh, qui a depuis quitté provisoirement le pays pour les Etats-Unis, disant craindre des représailles de la part des partisans du populaire président libérien.
L’incident s’est produit en mars pendant la visite de la secrétaire générale adjointe de l’ONU, Amina Mohammed, à la suite d’une question du journaliste sur le sujet sensible de la mise en place d’un tribunal pour les auteurs de crimes pendant la guerre civile (1989-2003).
Un très grand nombre de personnalités directement impliquées dans la guerre civile occupent toujours des positions importantes dans les sphères du pouvoir politique et économique au Liberia.
Liberté de blâmer
Quelques jours après, M. Weah a assuré ne nourrir aucune animosité à l‘égard du correspondant de la BBC et a protesté de son attachement à la liberté de la presse.
Mais lors d’une réunion la semaine dernière, les patrons de presse se sont dits “alarmés par la récente multiplication des menaces, des intimidations et harcèlements de journalistes”, selon le Syndicat des journalistes du Liberia (PUL).
“Depuis le départ de la mission de l’ONU au Liberia (le 30 mars, NDLR), le gouvernement est le principal acteur de l‘économie des médias”, a relevé le syndicat, soulignant les difficultés dues à la situation économique du pays et à la “volonté de certains responsables d‘étrangler les médias en les privant d’annonces publicitaires”.
George Weah a donc tenté une nouvelle fois d’apaiser les craintes de la profession, en recevant mercredi dans son bureau les responsables de tous les médias du pays.
“Je vous promets 200 % de liberté de presse et d’expression sous mon gouvernement”, leur a-t-il dit.
“Jamais je n’utiliserai ma position pour persécuter ceux qui me critiquent”, a-t-il assuré, se présentant comme “un homme au coeur tendre, d’origine modeste, avec des amis dans tout le pays”.
“S’il est vrai que les médias et les journalistes sont libres d‘écrire et de criquer comme ils l’entendent, les médias doivent aussi mentionner les succès du gouvernement”, a néanmoins estimé le président libérien.
“Je reste un grand partenaire de la presse”, a-t-il ajouté, soulignant qu’il possédait lui même un groupe de médias, Royal Communications Inc., propriétaire notamment de la radio King’s FM.
“Je ne peux donc pas m’en prendre aux journalistes”, a poursuivi George Weah, “au contraire, je continuerai à soutenir leur activité”.
Source : www.cameroonweb.com