Le cirque des élections législatives du 20 décembre au Togo a connu une nouvelle séquence avec la proclamation des résultats provisoires attribués aux 30 Circonscriptions électorales dimanche 23 décembre dernier par le président de la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante), Kodjona Kadanga.
Et comme on pouvait s’y attendre, en l’absence des traditionnels partis de l’opposition regroupés au sein de la C14 face à des adversaires moins disant, le parti au pouvoir Union pour la République (UNIR) conserve sa majorité, avec 59 sièges. L’Union des Forces de Changement (UFC) est la deuxième force au Parlement avec seulement six sièges suivi du Nouvel Engagement Togolais (NET) de Gerry Taama et du MPDD de l’ancien Premier ministre, Messan Agbéyomé Kodjo et aussi de la liste indépendante, CRAD qui ont obtenu chacun, 3 sièges.
Alors vient le lot des listes indépendantes de deux sièges à savoir Bâtir, Dounényo, Alolédou, Hysope, Pour construire et LIR (Liste Indépendants pour la République). Dans le lot des partis et listes des Indépendants auxquels on a attribué un siège symbolique, il y a le PDP de Bassabi Kagbara, le MRC d’Abass Kaboua, Nouvelle Vision et Conscience Patriotique.
Pour ce scrutin, 850 candidats étaient en lice. 1 869 717 citoyens ont voté sur un total de 3155 837 inscrits, soit un taux de participation de 59,25% ; 1 751 110 de suffrages exprimés ont été enregistrés et 118 607 bulletins nuls comptabilisés selon la CENI. A la lumière des chiffres surréalistes publiés par la CENI bancale et jamais constituée jusque-là, tout saute aux yeux. Du taux de participation de 59,25% comme en temps normal et au vu du grand désert qu’a constitué le Togo le 20 décembre, il ne fait l’ombre d’aucun doute qu’il s’agit du traficotage.
Il en est de même pour les inscrits. Pourtant, beaucoup de Togolais avaient boycotté le recensement. Bien plus, lorsqu’on annonce des sièges remportés par certains partis totalement inconnus dans certains milieux, on est en droit de douter de tout. Et ceux qui estiment qu’il s’agit simplement de nomination de députés n’ont que trop raison. Les nouveaux opposants décrétés exultent La configuration de la nouvelle Assemblée truffée de frères, sœurs, copines et amis du président du « Grand Parti » (sic) révèle les opposants de l’opposition togolaise comme opposition parlementaire. Naturellement ceux qui dans les conditions normales n’ont jamais réussi à faire élire un seul député au nom de leur parti et qui ont pris jusqu’à trois dans cette comédie électorale, ne cachent pas leur satisfecit.
« Je suis satisfait des résultats provisoires de notre formation qui a fait sa mue il y a quelques mois avant les élections », a confié Agbéyomé Kodjo. De son côté, l’UFC qui a aussi bénéficié du partage du gâteau, donne l’air sérieux dans une partie de cette tragi- comédie. « Nous espérions avoir plus d’élus, nous sommes cependant satisfaits du résultat et ne comptons pas introduire un recours », a déclaré Ekoué Folly Gadah, conseiller spécial de Gilchrist Olympio, le président du parti. Doit-on en rire ou pleurer ?
Le Grand recul
Faire les élections sans les réformes, c’est faire un coup d’Etat. Et les élections législatives du 20 décembre dernier sont un nième « coup d’Etat », selon Magloire Kuakuvi. L’enseignant de Philosophie aux universités du Togo pense que le régime de Faure Gnassingbé a réussi parce que l’Organisation des Nations Unies (ONU) était dans le coup, la CEDEAO n’a rien fait pour l’empêcher et l’Union africaine (UA) fait pitié. Pour le coordonnateur du Conseil épiscopal Justice et paix de l’archidiocèse de Lomé, c’est la réussite de ce « coup » qui justifie l’humeur « souriante » du chef de l’Etat togolais à la 54ème Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO samedi dernier à Abuja au Nigeria.
« Lorsqu’une dictature décide de faire quelque chose et réussit la chose, il y a toujours des vautours pour la féliciter. C’est triste que le sort de l’Afrique soit confié à des gens comme ça. Ce qu’ils ont fait n’est pas bon. Les générations qui vont suivre seront plus exigeantes. Les hirondelles qui arrivent seront plus méchantes », a-t-il déclaré lundi 24 décembre sur Victoire FM. Pour cet acteur de la société civile togolaise, c’est pour préparer 2020 qu’on a voté dans la précipitation au Togo pour avoir une majorité à l’Assemblée nationale, faire comme en 2002 toutes les réformes qu’on veut en attendant tranquillement et en tournant les pouces derrière les soldats.
Le tableau tel que peint par le Professeur Kuakuvi illustre parfaitement le grand recul du Togo. Si après trois mandats, Gnassingbé Faure peut encore se permettre cette grande pagaille, le Togo se couvre bien de ridicule. Aujourd’hui, il a choisi ses adversaires au Parlement.
Malheureusement, la crise prend une nouvelle tournure avec un important lot de mécontents, d’aigris et de victimes tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Plus personne ne peut croire en M. Gnassingbé dans ses promesses de Gascon. Pendant que tous les chefs d’Etat de la sous-région en ont presque fini avec la guéguerre politique et engagé leur pays sur la voie du grand développement, voilà Gnassingbé Faure qui inaugure une nouvelle phase de crise.
Comment un chef d’Etat peut-il se contenter de gérer la crise politique qui apparaît d’ailleurs comme l’axe principal de son programme de gouvernance ? L’enfant, de Eyadèma a-t-il vraiment conscience du grand mal que lui et son père font au peuple togolais. Toute chose qui commence ayant toujours une fin, le Togo et les Togolais tôt ou tard sortiront de cet enfer terrestre à eux imposé.
Kokou AGBEMEBIO
Source : www.icilome.com