Le 13 Janvier 1963, les Togolais assistent médusés à l’assassinat du seul et unique Président démocratiquement élu du Togo, son excellence le Président Sylvanus Olympio.
Aux petites heures du matin, il est lâchement abattu devant l’ambassade des États-Unis au Togo par des forces maléfiques.
Depuis ce jour, le peuple Togolais est privé de liberté et n’a plus eu l’opportunité d’élire un dirigeant politique dans des conditions crédibles et acceptables par tous. Tout est trafiqué. Les élections sont trafiquées, les comptes publics sont trafiqués, pillés et la misère noire est la chose la mieux partagée du peuple Togolais.
Suprême insulte, l’hôpital le plus sale et le plus désorganisé du Togo porte le nom de Sylvanus Olympio, un nom qui pourtant symbolise non seulement la liberté et la prospérité mais également la qualité et l’excellence.
Dans l’espace CEDEAO, il ne reste plus que le Togo, qui, comme dans la bande dessinée « Astérix et Obélix » reste le seul village Gaulois où à coups de potion magique préparé par quelques obscurs druides, on résiste encore et toujours à la démocratie.
Pour mémoire, Le Togo est membre fondateur de CEDEAO, représente 1% de la superficie et 2% de la population de la CEDEAO. Je ne vois pas comment et pour combien de temps il tiendra tête aux 15 autres États démocratiques de la CEDEAO.
En ce cinquante quatrième anniversaire de l’assassinat du père de l’indépendance, Sylvanus Olympio et cinquantième anniversaire de la confiscation du pouvoir par deux éléments d’une même famille biologique, il est légitime de se demander de quoi souffre le Togo ? Quel est le coût de cette situation et finalement, quelle solution pour le Togo ?
Je ne me lancerai pas dans une longue démonstration pour expliquer de quoi souffre le Togo.
Le Togo souffre de l’absence de légitimité de ses dirigeants et de ses institutions.
Autrement dit, les acteurs du pouvoir exécutif, législatif et par ricochet judiciaire sont issus d’élections frauduleuses. Les dirigeants actuels se sont emparés du pouvoir par la force brute et s’y maintiennent par la force, la fraude et des ruses d’un niveau médiocre.
Ils organisent des dialogues et crée des commissions pour se blaguer eux-mêmes, perdre du temps et essayer de nous convaincre que ces salades indigestes là leur confèrent une quelconque légitimité…
Leurs commissions sont comme des « poupées Russes », quand tu en ouvres une, ça mène à une autre, puis une autre…et puis le temps passe, et chaque année c’est des explications au lieu de résultats. Ils ne peuvent régler aucun problème sans en créer un plus gros.
Ces dernières années, le débat est animé sur des sujets comme sur le niveau élevé d’endettement du pays, le chômage chronique, les réformes institutionnelles et constitutionnelles, l’insalubrité des hôpitaux publics, l’absence d’élections municipales depuis 30 ans, la non limitation des mandats présidentiels…etc. Ces questions qui sont débattues sont des symptômes du mal qui ronge le pays et nous amènent à nous demander :
Quel est le coût de l’illégitimité des dirigeants et institutions du Togo depuis 54 ans ?
Au plan humain, ce régime a coûté au bas mot 5000 morts si on compte les assassinats politiques, les décès par chagrin ou maladie des membres de la famille des personnes assassinées, les blessés et amputés prématurément décédés résultant de la violence dont abusait les forces de l’ordre ; les morts lors des manifestations publiques, tous ceux-là qui décèdent dans l’anonymat faute d’un hôpital décent accessible à leur bourse dans le pays…
Au plan économique, la presse nous apprend que notre endettement représente 75% du PIB. Qui croirait que nous avons atteint le point d’achèvement de l’initiative PPTE il y a juste six ans ? En contrepartie, il y a les infrastructures qui ont été réfectionnées et Lomé est redevenue Lomé la belle grâce aux investissements massifs du gouvernement. De l’aéroport de Lomé à la plage en passant par Agoè, Lomé a bonne mine et il y fait bon vivre quand on en a les moyens… Mais à quel prix ?
L’absence de légitimité des dirigeants les obligent à laisser prospérer un groupe de Togolais qui pille le pays à tout vent. Ils volent au motif qu’ils doivent assurer leur avenir au cas où ça pète ? Ça ne pèterai pas si les institutions et les dirigeants étaient légitimes. Quand le chef de l’État parle d’une « minorité qui s’accapare des richesses du pays », il oublie de mentionner que cette minorité est son rempart contre le peuple… Il ne peut donc rien leur faire sans scier la branche sur laquelle il est assis. C’est un mal nécessaire pour sa survie politique tant qu’il opte de rester au pouvoir dans l’illégitimité…
Au plan social, il faut se demander de combien d’écoles, d’hôpitaux, de routes, de système de canalisation des eaux, d’infrastructures électriques, de cimetières et autres le Togo manque par la faute de la situation actuelle. Toutes ces structures relèvent des municipalités or on refuse d’organiser des locales pour que les municipalités puissent régler leurs problèmes à la base en prenant leur destin en main…
On préfère nommer des individus pour gérer les communautés et ils ne sont redevables qu’à qui les a nommés…
Le chômage de masse ne résulte d’aucune conjoncture mais d’un choix délibéré d’affamer les populations pour les garder docile. On a ainsi fabriqué une armée de chômeurs dont nombre sont devenus des alcooliques chroniques quand ils ne sont pas ingénieur en escroquerie et projets bidons. Combien de Togolais vivent mal en raison de l’absence de ces infrastructures et de politiques en total déphasage avec les besoins des populations ?
La centralisation du pouvoir politique et économique entre les mains d’un chef de l’État non élu et d’une poignée de citoyens qui ne doivent leur carrière qu’à une nomination sur des critères flous ou parfois objectifs privent près de 7 millions de Togolais de bonnes conditions de vie, du droit de choisir leur dirigeant, d’un système économique en phase avec les besoin des populations, d’une alternative à la situation actuelle et finalement met le pays dans une situation d’esclavage au plan national et international.
Un régime faible en légitimité au plan national, est obligé de s’appuyer sur d’autres puissances et réseaux pour survivre et faire des concessions sur des questions importantes dans les négociations au détriment de ses populations. Au plan extérieur par exemple, que peut un gouvernement illégitime dans un débat de fonds sur l’utilité du maintien du franc CFA, d’une intervention militaire en Gambie ou toute autre question où l’intérêt de ses populations est en jeu ? En mettant le peuple Togolais en esclavage, le régime s’est réduit lui-même à être un esclave de la communauté internationale ou des intérêts et lobbies qui le tolèrent ou le soutiennent.
Le coût de l’illégitimité est énorme et je ne saurai le chiffrer pour le moment…car si on peut trouver un chiffre approximatif pour les pertes tangibles et opportunités manquées, quid des pertes intangibles comme, le désengagement des populations des initiatives d’une administration illégitime ou l’incivisme qui se traduit par la non maintenance de tout ce qui est public, le taux d’abstention élevé à toute élection qu’on sait frauduleuse, ou encore tout le talent humain au plan politique, économique, social et culturel qui aurait éclos si le Togo avait des dirigeants de son choix…
Comme tous les chemins mènent à Rome, tous les problèmes du Togo mènent à l’illégitimité des dirigeants et des institutions en place.
Nous sommes à présent, le seul pays de la CEDEAO qui n’a pas un Président élu par les populations.
Nous sommes le seul peuple en esclavage volontaire dans la sous-région.
Voilà trente bonnes années qu’on a pas élu un seul maire au Togo faute de volonté d’organiser des élections municipales.
Les législatives, ce n’est pas plus brillant, le vote d’un Togolais du Nord vaut celui 4 Togolais du Sud et malgré ce déséquilibre, le pouvoir fraude encore les élections.
Dans ces conditions-là, lorsqu’on veut limiter le débat à des modalités d’accession au pouvoir et on nous parle d’Accord Politique Global (APG) et de réformes institutionnelles et constitutionnelles, nous refusons d’entrer dans ce schéma dans lequel il faut s’entendre pour modifier la loi fondamentale sur la base d’arrangements auxquels le peuple n’est pas ou n’a pas été directement consulté. Autrement dit, nous refusons de passer d’une république sur des béquilles à une république en fauteuil roulant. Si on veut sortir de la crise faisons les choses correctement.
Mon premier postulat est que les dirigeants actuels et les institutions actuelles sont illégitimes.
Mon second postulat est que le coût de cette illégitimité est énorme sur 50 ans. On ne saurait donc exclure les populations du règlement de crise politique, économique et sociale que vit le Togo. Le pouvoir n’appartient à aucune minorité que ce soit l’élite intellectuelle, militaire ou politique. Il faut consulter les populations et les impliquer dans tout processus qui les engage.
Quelle solution pour le Togo ?
La crise Togolaise a trop duré, les conditions sont plus que favorables pour un changement de système… pas simplement une alternance pour remplacer un homme par un autre. Nous ne voulons tout simplement plus de cette constitution qui exclut un tiers de la population qu’est la diaspora et permet une situation d’Apartheid dans laquelle la majorité est transformée en minorité par des textes préparés dans des officines douteuses.
Nous ne voulons pas non plus d’un remake de la cauchemardesque transition de 1991 au cours de laquelle une clique de citoyens inexpérimentés et en majorité non démocrates se sont auto-proclamés représentants du peuple au cours d’une conférence nationale dite « souveraine », qui, a accouché d’un gouvernement de transition et d’une nouvelle élite qui dans un temps record a ratiboisé plusieurs milliards d’épargne mis de côté par le régime précédent.
La loi qui gouverne le Togo doit émaner du peuple et ses dirigeants choisis par peuple. Le pouvoir au peuple… Si les populations ne sont pas impliquées, on obtiendra peut-être l’alternance mais pas une véritable démocratie et un développement parce que les populations n’ont aucun mécanisme de contrôle des dirigeants actuels et à venir.
La solution à la crise politique Togolaise est la mise en place d’une nouvelle République.
Une République dans laquelle la constitution émane du peuple, une république dans laquelle les dirigeants sont élus par les populations, une République dans laquelle un Togolais égal un vote.
Une République dans laquelle la diaspora a le droit de vote, une République dans laquelle ceux qui souhaitent être candidats peuvent se présenter car la constitution n’est pas taillée pour ou contre eux.
Dans la crise politique Togolaise, le cheminement est plus important que le but. Si c’est à coup de commissions sans légitimé mises en place par ceux qui volent les élections qu’on y va, on perd notre temps car on va devoir recommencer et le faire correctement.
Pour mettre en place une nouvelle République, il faut redonner la parole, le pouvoir au peuple…
Comment redonner le pouvoir au peuple ?
* Un dialogue entre les partis représentés au parlement
Il faut ouvrir un dialogue entre les partis représentés au parlement pour préparer une période de transition qui couvre la période 2017- 2020. Ce dialogue peut être conjointement dirigé par la médiatrice de la République, les religieux, l’armée avec le soutien des Nations Unies, L’Union Africaine, la CEDEAO, la Francophonie, de l’Union Européenne, la France, les USA, l’Allemagne. Le dialogue définira les modalités de la transition et les contours du gouvernement d’Union National de Transition.
* Gouvernement d’Union Nationale de Transition.
Nous proposons la mise en place d’un Gouvernement d’Union Nationale de Transition composé des partis représentés au parlement avec un quota de ministres au gouvernement déterminé non sur la base du nombre de députés obtenus mais sur la base des suffrages exprimées par les populations lors des élections législatives de 2013. Le gouvernement sera dirigé par un premier issu du parti ou regroupement de partis d’opposition ayant recueilli le plus grand nombre de suffrages.
* Une assemblée constituante.
Le GUNT aura pour mission principale d’organiser l’élection d’une assemblée constituante. La préparation de l’élection de l’assemblée constituante en Juillet 2018 inclura :
- Un nouveau recensement électoral incluant la diaspora,
- Un découpage électoral sur la base 1 voix= 1 vote,
- La mise en place d’une CENI technique dirigée par un représentant de l’ONU, secondé par l’UA et la CEDEAO.
L’assemblée constituante aura jusqu’en 2019- 2020 pour soumettre une nouvelle constitution aux populations pour approbation par référendum.
* 2020, la nouvelle République.
En 2020, le Togo organisera des élections législatives, municipales et présidentielles inclusives sur la base de la nouvelle constitution.
Dans ces conditions, le pouvoir du peuple lui sera restitué pacifiquement, les institutions seront légitimes et il n’y aura pas d’histoires de rétroactivité et de petits jeux malsains pour éliminer les membres des administrations passées etc.…Le président, les députés, les conseillers municipaux élus en 2020 auront les coudées franches pour mettre en œuvre leurs programmes de gouvernement.
Des pays ont connu pire que le Togo, le Nigeria, le Libéria et tout récemment la Côte d’Ivoire qui a connu une grave crise politique. Le président élu, le très compétent Dr Alassane Ouattara s’est mis au travail et aujourd’hui, la Cote d’Ivoire est debout et fait la fierté de l’Afrique, avec une nouvelle constitution, un vice-président etc.…une économie en plein essor.
Les structures politiques des 16 états de la CEDEAO sont démocratiques mais au niveau de la culture démocratique on est à 15 états sur 16… il reste le Togo. La culture démocratique a besoin d’être implantée et ancrée au Togo pour en faire le dernier État démocratique de la CEDEAO.
Cette lutte est notre lutte, elle est d’abord interne. Individuellement, il faut intégrer les valeurs démocratiques à notre comportement, aimer et accepter notre prochain, le valoriser, dialoguer, accepter la loi de la majorité et s’y plier, s’impliquer dans les affaires de la cité et finalement concentrer toute notre énergie sur un but à la fois et dans ce cas-ci, il faut aller à une transition, une constituante pour établir une nouvelle République.
Personne ne peut forcer le changement au Togo, les Togolais qui veulent le changement doivent s’organiser et explorer la piste que nous proposons sérieusement pour une transition pacifique vers la liberté et la démocratie. Jusqu’aux prochaines élections, ceux qui se réclament de l’opposition doivent taire leurs égos et travailler sous l’autorité du chef de l’opposition pour qu’on arrive à bon port.
Le chef de l’opposition a l’obligation de ratisser large, de faire la paix au besoin avec ses alliés d’hier, et de bâtir un projet de société avec les autres opposants pour proposer une alternative crédible au régime actuel. La Côte d’Ivoire avec la réconciliation Bédié-Ouattara ne donne-t-elle pas l’exemple ? Qu’est ce qui peut empêcher un père et son fils de se réconcilier quand l’intérêt de tout un pays est en jeu ? L’histoire du fils prodigue dans la bible est pleine d’enseignements à ce sujet…
Le pouvoir au peuple, les citoyens ont le droit de prendre leur destin en main et de bénéficier de leurs ressources.
D’autres solutions existent pour mettre un terme à la crise politique Togolaise, mais à cette étape, il me semble que c’est la voie la plus sage et la plus appropriée pour le pays afin qu’on capitalise également sur les acquis obtenus durant les 54 ans d’obscurité…Les acquis, il y en a, comme la paix et la sécurité par exemple…
Le Togo d’aujourd’hui a beaucoup progressé par rapport à il y a juste dix ans sans compter les progrès au niveau des droits de l’homme…Le président actuel n’est pas sanguinaire et a réussi là où l’opposition a échoué (dissoudre le RPT, remettre les militaires dans les casernes, mettre à la retraite les radicaux violents du régime etc.) … Notre problème est qu’il n’est pas élu, ne mène pas des politiques qui défendent les intérêts de la majorité et sa politique échappe à tout contrôle.
Nous devons donc rétablir le pouvoir du peuple, restaurer la légitimité des institutions et des dirigeants et ne pouvons donc pas troquer notre liberté pour les quelques progrès réalisés, il faut régler les questions de fonds comme le respect de la volonté populaire, il faut redonner la parole au peuple…
Le pouvoir au peuple… telle est la mission que nous nous assignons, telle est la démarche dans laquelle nous nous inscrivons pour la poursuite de la lutte pour la libération du dernier bastion d’obscurité de la CEDEAO. En réussissant une transition pacifique vers une nouvelle république, nous continuerons ensemble notre marche vers plus de liberté et de prospérité tel que l’aurait souhaité le Président Olympio et tel que le font déjà les 15 autres États de la CEDEAO.
Le pouvoir au peuple…
La lutte continue
Détia Kpoé le yi.
Séna Alipui
27Avril.com