LE PEUPLE EST DEBOUT ! QUI EST LE PEUPLE ? 27 janvier 2018

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LE PEUPLE EST DEBOUT ! QUI EST LE PEUPLE ?                                                                             27 janvier 2018
Michel KINVI

Par Michel KINVI – New York, le 25 Janvier 2018

“QUI EST LE PEUPLE?” La question est brève et parait simple. Pourtant elle est chargée d’un lourd transfert de responsabilité à celui qui voudrait y répondre. On oserait dire avec raison que cette question est du même registre que la suivante: « Qui est Dieu ?».

Mais pour les besoins de l’actualité, laissons Dieu aux dévots qui aspirent vers le paradis du Ciel et voyons plutôt, proche de nous, le peuple en acte sur terre. Il nous faut rappeler d’abord un principe de langage, dire ensuite ce que le peuple n’est pas et exposer après ce que le peuple est véritablement.

1- Principe : Le Langage Peut Devenir Sacré

Souvent le langage ordinaire se donne la largesse de mélanger et confondre le Peuple avec la population. Cette permissivité ou tolérance dans le langage ordinaire peut se comprendre. Car un tel mélange ne se soucie pas de quelques conséquences graves sur les résultats des conversations courtoises ou désinvoltes de tous les jours. Cela va de soi puisque les conversations ordinaires de tous les jours parlent souvent de choses simples, ou discutent de sujets banals avec des enjeux de moindre prix à payer ; soit-il un prix moral ou un prix marchand.

Mais lorsque la conversation devient un Dialogue qui explore le champ de la vérité, ou s’engage dans un débat d’idées entre des points de vue opposés qui poursuivent la lumière et cherchent à faire triompher la justice, l’échange verbal à ce niveau devient le domaine d’un acte sacré ou du moins consacré. Nous donnerons des exemples dans la suite du propos. Restons dans le principe pour le moment.

Par conséquent dans un tel contexte lorsqu’un locuteur fait mauvais usage des notions dans la recherche de solution à un état de mal social total ou à un Etat en crise, ce locuteur devient lui-même un vecteur de crise. Il échoue à sanctifier le vocabulaire pratique et technique et demeure incapable de s’éloigner du vulgaire bavardage, il reste coincé dans le propos banal, source de confusions graves. Prenons en exemple notre cas d’actualité du Togo en crise.

2- Le Togo Est En Crise ; Mais Le Peuple Ne Saura Etre La Population Ni L’ensemble Des Citoyens

Listons des exemples de confusion. Au point culminant de la crise togolaise, le 14 Septembre 2017 au cours d’un débat public sur la chaine télévisée Voice Of America (VAO) dans l’émission Washington Forum animée par Jacques Aristide et consacrée au Togo, le docteur Nicolas Babina avec son titre académique en exergue a gravement confondu le peuple à la population générale du Togo. Il déclarait en ces termes :

« … Quand on parle, quand on dit ‘’le peuple veut’’, quand on dit ‘’les populations veulent’’, je veux bien. Il y a une manifestation qui a rassemblé quelques partis des membres et sympathisants de l’opposition. Le gouvernement, le parti d’UNIR a organisé aussi une marche dont il faut tenir aussi compte de ceux qui étaient dans la rue, qui ont marché. Donc quand une partie de la population manifeste, il faut aussi considérer qu’il y a une majorité silencieuse. Et il y a des sympathisants du parti au pouvoir qui n’ont pas pris part à la marche, il y a une partie qui ne prend pas part totalement ni pour l’un ni pour l’autre. Donc il faut considérer ces populations-là aussi… »

Nous voyons que dans ces propos, tenus par un citoyen de formation universitaire portant titre de doctorat et représentant une institution, un parti politique, la confusion de la notion de Peuple avec celle de population est vite faite. Le docteur nomme et fait jouer sans différenciation et sans nuance les mêmes rôles sociopolitiques au Peuple et à la population. Ce mélange est grave en temps de crise car il embrouille l’intellect dans ce contexte précis de recherche de la vérité, de la justice et du bien général. C’est de la maladresse pédagogique.

La même maladresse de confusion entre Peuple et population se répète avec une autre figure bien instruite, un universitaire enseignant. Ce fut dans l’émission Rencontre et Echange, sur la chaine RTDS, animée par Gérard Wilson le 13 décembre 2017 sur le thème « La Loi Fondamentale Togolaise Décryptée par le professeur François Kossi Hounaké ». Dans son exposé le professeur a extrapolé le peuple togolais à toute la population togolaise. Et de ce geste il efface toute la substance qualitative qui fonde l’esprit d’un peuple ; il le réduit à la matérialité quantitative, à la somme mathématique des habitants. Il dit que « le peuple togolais est fait de six millions cinq cent mille personnes ». Ce qui n’est pas scientifiquement exact en normes d’éthique et politique. Un tel chiffre pour la population, oui, mais pour le peuple, non ! Il y a nuance.

A l’image de ces deux cas, beaucoup de locuteurs qui font pourtant office d’administrateurs publics ou de maîtres convoyeurs de savoir et d’opinions pour défendre diverses causes dans le contexte de crise politique échouent au devoir de sanctifier le langage.

Pour le cas précis de la notion de Peuple, s’il est bien évident pour tout le monde que le peuple d’un pays n’est pas l’ensemble des habitants de son territoire, il n’est pas au contraire évident pour tout le monde que le peuple véritable n’est pas non plus l’ensemble des citoyens. Le peuple véritable diffère des simples citoyens de droit.

3- Ce Que Le Peuple Est

En terme strict, le peuple est une catégorie de citoyens qui vouent dévotion et gardent fidélité à la patrie. Le peuple ainsi dit est le cercle des fils de la nation qui restent imprégnés de l’esprit des pères fondateurs et cultivent la vision identitaire originelle des premiers patriotes géniteurs.

En précision, le statut sacré et restrictif de fils de la patrie, progéniture du peuple, n’est pas de facto un héritage simplement biologique ou ethnique, mais il est plutôt une appropriation éthique, une imprégnation morale, une acquisition spirituelle laborieuse. Un citoyen peut naître d’un brave père patriote mais dégénérer lui-même en un vulgaire jouisseur couard sans aucun souci de la destinée de la nation et, pire, devenir un traître. Un tel citoyen ne pourra pas répondre à l’appel du Peuple.

Cependant, un citoyen peu naître d’un père étranger ou indifférent mais peut s’éduquer à devenir un enfant de la patrie, une progéniture du Peuple. De là, devenu adulte il ne se contentera pas d’être un simple jouisseur du droit de sol, de la citoyenneté et des avantages généraux y afférents. Il s’auto oint comme enfant de la patrie en toute indépendance de son lignage biologique et de son groupe ethnique.

Ainsi mieux défini, le peuple est le ralliement des vrais fils de la patrie, la phalange des patriotes. Ces fils véritables de la patrie se distinguent des simples citoyens de droit par leurs choix de comportement par rapport aux valeurs contenues dans les idéaux des pères fondateurs. Ils nourrissent la conscience du bien collectif et recherchent en tout moment l’intérêt général de la nation.

Pour illustrer avec de grands exemples modernes connus, nous dirons que sous les Nazi en 1939-44, la France occupée ne comptait pas parmi ses vrais fils de la patrie ceux qui collaboraient avec l’envahisseur. Ceux qui avaient mis les biens de l’Etat au service de l’occupant tyran, ceux qui offraient et fournissaient des prestations de services de tous genres à l’oppresseur du moment, celles qui devenaient des copines et maitresses des envahisseurs allemands n’étaient vus que comme des citoyens ‘dégénérés’ qui s’activaient égoïstement à la marge de l’esprit résistant du peuple en lutte vers la libération.

Et avant cette période éprouvante en France, loin dans l’histoire, deux cents ans auparavant, quand il fallait renverser la monarchie pour établir la république, c’était uniquement tous ceux qui réclamaient l’abolition des privilèges indus, revendiquaient la proclamation des droits universels de l’homme qui étaient désignés Peuple. Tout le reste, les loyalistes qui affichaient leur subordination à la monarchie, bien que citoyens de la France, ne faisaient pas partie du peuple en acte. Le même schéma est vérifié pour la révolution américaine en 1776 contre la monarchie anglaise avant celle des Français de 1789.

Donc en temps particulier de changement radical de la trajectoire politique nationale ce sont ceux qui portent l’esprit mouvant de la volonté générale légitime qui constituent le Peuple. Par contre les factions égoïstes et sectaires calculateurs qui retardent le changement ne sont que des citoyens inadaptés à voir la lumière rapprochée du futur collectif imminent. Bien que bénéficiant des droits généraux, ces récalcitrants échouent à se hisser au rang des fils élus du Peuple, des patriotes.

Conclure

Le peuple est toujours l’esprit national fondateur réincarné en souffle de vie dans l’âme de certains citoyens qui s’auto-choisissent dans une prise de conscience. Ladite prise de conscience particulière est faite de la souvenance du passé prophétique des aïeuls, des ancêtres inspirateurs. Ce groupe élu, cette masse de citoyens auto-choisis forme le peuple et représente l’esprit national en labeur vers un futur glorieux, une prospérité nationale qui n’est qu’un bien commun général.

Le choix, l’élection de soi pour appartenir à cette masse ‘ré-incarnatrice’ de l’Esprit qui renouvelle la promesse ancestrale à travers une transformation socio-culturelle, mieux une révolution politique est un geste salvateur cyclique qui revient de génération en génération.

Le peuple en définitif ce n’est pas le ramassis indistinct de la population entière ni l’agrégat dissolu de tous les citoyens de droit. Par contre Le Peuple c’est l’Esprit renouvelé des ancêtres en quelques-uns mis en marche vers la promesse initiale, vers la vision originelle. Et pour le Peuple du Togo la promesse ancestrale originelle et fondatrice est l’OR DE L’HUMANITE.

Togo-Online.co.uk