« Le mensonge est comme une blessure, quoiqu’elle guérisse, la cicatrice reste toujours » (Mocharrafoddin Saadi)
Le régime héréditaire au Togo est gagné par la mythomanie. Le mensonge est érigé en mode de gouvernance. Les tenants de l’ordre ancien ne s’embarrassent guère quand il s’agit de mentir. Effrontément. La contrevérité, le double langage, la fourberie, la promotion du faux et de la fraude sont les valeurs les mieux partagées au cénacle. Le ministre de la Sécurité, celui de la Fonction Publique et porte-parole du gouvernement, le ministre de l’Administration territoriale…autant qu’ils sont, ils sont pris d’une irrésistible envie de déformer les faits, de dissimuler la vérité. Ils continuent de fonder leur vision politique sur des contrevérités. Au point que les Togolais sont arrivés à la conclusion que la moralité a quitté le sommet de l’Etat depuis des lustres.
Depuis qu’il a atterri à la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), le Prof Kodjona Kadanga s’est mis dans la cadence et ment comme il respire. Son premier fait d’arme a été de faire croire à l’opinion que plus de trois millions de Togolais se sont fait enregistrer sur les listes électorales lors de l’opération de recensement qu’il s’est démené à mener tout seul et boudée par la grande majorité des Togolais.
Mais la tour de mensonge érigée par le président de la CENI s’est écroulée comme un château de cartes lors de la farce électorale du 20 décembre dernier où les Togolais ont infligé un cinglant désaveu à Faure Gnassingbé et les siens. Ce fut un Waterloo électoral. L’échec patent de l’imposture. Les salles de classe qui servaient de centres de vote étaient désespérément vides et les membres des bureaux de vote ont passé leur temps à s’assoupir, faute d’électeurs. Et un journaliste étranger de lancer que les observateurs électoraux et les agents des bureaux de vote étaient plus nombreux que les électeurs. C’était la triste réalité.
L’innovation et le courage n’étant pas les vertus cardinales des médias publics, il a fallu sortir le président de la CENI de son trou, lui tendre le micro et le laisser déclarer qu’« il y a foule » dans les bureaux de vote. Rien qu’à voir la façon dont il parlait, on pouvait aisément se rendre compte qu’il n’était guère convaincu de ce qu’il disait. Une fois encore, Kodjona Kadanga sera trahi par le dépouillement public. Les résultats affichés sur les tableaux que tout le monde a pu voir, étaient aux antipodes de l’enthousiasme affiché et de la « grande foule » annoncée par le président de la CENI.
Sur les 400 ou 500 inscrits dans la plupart des bureaux de vote autant à Lomé que dans certaines villes de l’intérieur du pays, le nombre de votants dépassait difficilement 100, avec une proportion incroyablement élevée de bulletins nuls. Certaines formations politiques -et elles sont nombreuses- s’en sont sorties avec des scores honorables de zéro voix. C’est dire que même les délégués dans les bureaux de vote n’ont pas voté pour leur parti.
Malgré ce désastre électoral, quelle ne fut la surprise des Togolais quand Kodjona Kadanga annonça un taux de participation fantaisiste de 59,9%. Un taux qui dépasse celui de la présidentielle de 2015 !
« Tu ne mentiras point », commande la Bible. Le Coran renchérit : « L’homme qui persévère sur le mensonge et qui cherche à mentir, sera inscrit selon le jugement de Allah au nombre des menteurs». Il est constant de voir nos gouvernants dans les églises ou dans les mosquées, adopter l’attitude d’hommes justes, en parfaite harmonie avec Dieu ou Allah. Une fois dehors, ceux-là qui sont censés servir de modèle pour leurs gouvernés arborent leurs vestes à mensonges. Ils peuvent tromper les Togolais, ils peuvent tromper les hommes, mais ils ne tromperont jamais Dieu.
Médard Amétépé
Source : [27/12/2018] Liberté
27Avril.com