L’axe Lomé – Cotonou à l’épreuve de Reckya Madougou

0
750
Patrice Talon Reckya Madougou Faure Gnassingbé

Pour affronter Patrice Talon, le Président sortant, en avril prochain, le choix du parti « Les Démocrates » de l’ancien Président Yayi Boni s’est porté sur une femme. Reckya Madougou, 46 ans, ancienne ministre de la Justice de Boni Yayi et actuelle conseillère spéciale du président togolais Faure Gnassingbé. Avant même sa désignation, depuis Lomé, la candidate ne rate aucune occasion pour lancer des pics à l’endroit de Patrice Talon et son régime. Quitte à complexifier les relations entre les deux voisins.

Personne ne l’a presque vu venir. Au terme de longues tractations au sein du parti « Les Démocrates », c’est finalement Reckya Madougou qui a été désignée candidate de cette formation politique au scrutin présidentiel du 11 avril 2021. Elle a été préférée aux autres prétendants à l’investiture du parti dont l’ancien député Eric Houndeté. L’ancienne ministre, pour affronter Patrice Talon a, à ses côtés Patrick Djivo, candidat au poste de vice-président.

Madougou tacle Talon par derrière…

Reckya Madougou n’a pas mis beaucoup de temps pour se mettre dans le bain de la campagne. Profitant de l’actualité «d’une tentative d’assassinat » de l’un des vingt candidats à l’élection présidentielle d’avril prochain, Ganiou Soglo, la candidate du parti « Les Démocrates » s’est encore violemment attaquée au régime de Patrice Talon. « Participer à l’élection présidentielle, aujourd’hui, au BENIN, relève du cauchemar. Des honteuses manœuvres d’exclusion aux tentatives d’assassinat, en passant par les menaces », a posté l’ex-ministre de la justice de Boni Yayi, avant d’ajouter « rien ne nous fera reculer ».

Depuis l’arrivée de Patrice Talon au Palais de la Marina, Reckya Madougou affiche publiquement sa déception face à la gouvernance du président béninois. Déjà en avril 2018 elle accusait le président béninois pour son ethnocentrisme et son mépris pour les femmes. « Les deux problèmes que j’ai relevés dès le début, c’est le sort réservé aux femmes, et le repli ethnique. La réponse m’a davantage fracassé, quand j’ai entendu le président lui-même justifier son choix par le fait que faire la promotion de la femme, ce n’est pas faire la promotion du mérite. J’ai failli l’appeler pour dire quand il a fallu trouver une personne capable de te faire rentrer, il se fait comme par hasard, que c’est une femme », avait indiqué l’auteure de « Mon combat pour la parole ».

Cette autre déclaration de Rekya Madougou a fait réagir bon nombre de togolais et béninois. « J’élève ma voix contre cette tentative de réduire les jeunes au musellement et de les contraindre à se résigner et à vivre leur chômage, leur misère et leur dénuement social en silence », a-t-elle, effet, déclaré à la suite de l’arrestation de certains jeunes pour «des faits d’incitation à la haine et à la violence, incitation à la rébellion, injures avec une motivation raciste diffusés sur les réseaux sociaux » dans le cadre d’une initiative dite « Initiative de Nikki ». Les morceaux du genre, on pourrait les multiplier. Passons !

Aujourd’hui, candidate, Reckya Madougou préparait ainsi son affaire depuis sa seconde base, Lomé, où elle occupe une fonction de haut rang.

Avec la bénédiction de Lomé…

Conseillère spéciale de Faure Gnassingbé depuis quelques années, Reckya Madougou lance aussi ses piques depuis le Togo où elle occupe donc une place de choix. Par conséquent, selon certains observateurs avisés, elle ne peut adopter une telle posture sans l’aval de Lomé. « C’est une femme intelligente. Du moment où Patrice Talon n’a pas voulu d’elle, elle se console au Togo en déversant son venin sur le président Talon et son régime. Elle ne peut pas faire autant de critique à l’endroit d’un régime sans l’accord de Lomé », a expliqué un analyste béninois.

Ce point de vue est partagé par d’autres observateurs qui voient dans les agissements de la Ministre de Yayi Boni, « une manière aussi pour Lomé de régler ses comptes avec le président béninois. C’est un secret de polichinelle que les relations n’ont jamais été au beau fixe entre Cotonou et Lomé depuis l’arrivée de Patrice Talon. Le Togo aurait plus aimé avoir un président adepte du coup d’état constitutionnel à l’est. Malheureusement, la tentative de Yayi Boni s’est soldée par un échec », a-t-il analysé.

Malgré tout, durant sa mandature le Président béninois a montré toute sa disponibilité à renforcer les relations entre les deux voisins. Il s’est notamment déplacé plusieurs fois à Lomé. Mais Faure Gnassingbé n’a trouvé aucune occasion pour se rendre chez son voisin. Alors que sous le mandat du prédécesseur de Patrice Talon, le numéro 1 togolais s’est rendu à diverses occasions dans la capitale béninoise. Un manque de réciprocité dans les relations qui confirment les tensions latentes entre les deux pays.

Selon une source proche de la Présidence béninoise qui a requis l’anonymat, les deux chefs d’Etat se parlent rarement. La dernière visite officielle du président Talon au Togo date de novembre 2018. « Dès son arrivée au pouvoir, le Président Talon a voulu renforcer les relations avec le Togo. Mais sa démarche n’a pas été accueillie avec enthousiasme par les officiels togolais. Pis, Lomé déroule pratiquement le tapis rouge à l’un de ses principaux challengers. Aujourd’hui, il est évident que le pouvoir de Lomé jouait un rôle clair-obscur mettant les relations entre les deux voisins en difficulté », a confié notre source.

Sans nul doute que les résultats de la prochaine élection présidentielle jouerait un rôle important dans l’apaisement ou non des relations devenues complexes entre les deux voisins.

Source : Fraternité

Source : 27Avril.com