Un talon d’Achille est le point faible de l’adversaire. Le talon de Faure Gnassingbé, le dictateur du Togo, est son goût immodéré pour le pouvoir à vie. Ce talon a été maintes fois attaqué sans succès mais depuis le 19 août 2017 il a servi de cible à trois flèches empoisonnées.
La première flèche a été décochée par Tikpi Atchadam, président du PNP : elle s’appelle Retour et application avec effet immédiat de la Constitution de 1992 (la C 92). La C 92 limite le pouvoir présidentiel à deux mandats. En 2017, Faure en était à son troisième. Son application le rend d’office hors-jeu. Pour sauver son fauteuil le dictateur a juré la perte de l’auteur de la flèche. Celui-ci ne doit sa vie qu’en se rendant invisible.
Quand le juridisme de la non-rétroactivité de la loi a failli prendre le dessus, l’activiste Folly Satchivi a pris les devants pour décocher une deuxième flèche en rappelant qu’« En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandat », la formule révolutionnaire de la C 92. Alors que le verrou de la non-rétroactivité était sur le point de tomber, de nouveau le pouvoir de Faure frappe. Il cueille le jeune activiste qui a fait de « EN AUCUN CAS » son crédo et le jette en prison. Il y est encore le malheureux.
La troisième flèche empoisonnée vient du désormais invisible (mais audible) Atchadam. Après que la CEDEAO soit venue soutenir et renforcer Faure par un soi-disant Dialogue et une prétendue Feuille de route, le pouvoir militaire avec à sa tête le fils du premier dictateur organise un retour en force au parti unique par de fausses élections législatives. Désormais, le quatrième mandat (et les suivants) ne devait être qu’une formalité. Le moment venu, ils organiseraient une grande kermesse pour annoncer solennellement la candidature de Faure pour le quatrième mandat. Ce qui devait être une mariée vierge à la nuit de noces a été déflorée par un slogan aussi simple que populaire : « NON AU 4e MANDAT DE FAURE ». Faute de se saisir de Atchadam, désormais invisible, le pouvoir se contente de son bras droit, Tchatikpi Ouro-Djikpa, qu’on a détenu illégalement pendant des mois ; devenu un pouvoir voyou il se fait casseur des meetings du parti d’Atchadam.
« Non au 4e mandat de Faure » est désormais le baromètre de l’opposition. Faure n’a pas droit à un quatrième mandant, pas plus que le troisième en cours d’achèvement. Ceux qui pensent qu’il faut laisser Faure se présenter de nouveau en 2020 sous prétexte qu’il y serait battu proprement et démocratiquement ne sont plus dans l’esprit de la C 92 et, donc, ne sont pas (ou plus) opposants. L’opposition à un régime n’est pas une attitude statique. On n’est pas opposant une fois pour toutes. On est opposant quand on adopte l’attitude adéquate du moment qui permet la réalisation du changement voulu. Si on est contre l’idée d’un quatrième mandant de Faure on doit l’empêcher de participer aux présidentielles de 2020 parce que s’il y participe, il gagnera à tous les coups. Plus de 50 ans d’histoire nous l’enseignent.
Zakari Tchagbalé
27Avril.com