Le Togo, la Guinée Conakry puis la Côte d’Ivoire… Mine de rien, la pandémie du troisième mandat et plus fait sa route. Partant de Lomé, ce virus se propage à une vitesse de croisière dans la sous-région ouest africaine. Nécessitant, par conséquent, de profondes réflexions pour une thérapie de choc.
Ouattara : un revirement spectaculaire de situation
Le jeudi 6 août dernier, dans une adresse solennelle à la Nation, à la veille du soixantième anniversaire de l’indépendance du pays, le Président ivoirien, Alassane Dramane Ouattara (Ado) a annoncé sa candidature pour la présidentielle du 31 octobre prochain en Côte d’Ivoire. Pour ce faire, Ado justifie cette nouvelle candidature qui scellera son troisième mandat à la tête du pays depuis son accession au pouvoir en 2010, par le décès tragique de l’ex Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, son dauphin choisi. « En face de ce cas de force majeure, et pour éviter de remettre à plat tous les efforts et réalisations que nous avons faits, j’ai décidé donc d’être candidat à la présidentielle du 31 octobre prochain. Je suis donc candidat !», dixit Ado, renonçant ainsi à sa parole précédemment donnée, celle de ne pas briguer un troisième mandat et passer la main à une jeune génération.
Un revirement spectaculaire de situation qui suscite, depuis lors, tant de réactions. Aussi bien en Côte d’Ivoire que dans la diaspora, nombreux sont les ivoiriens qui, à travers déclarations et manifestations contestent publiquement ce qu’ils estiment une violation flagrante de la constitution ivoirienne qui n’offre pas plus de deux mandats présidentiels à un Chef d’État. Faux, rétorque le régime d’Abidjan qui, par des tours de passe-passes et subterfuges, y voit plutôt le tout premier mandat qu’offre la loi fondamentale à Ado. Ceci, à la faveur de la dernière réforme constitutionnelle.
Condé, la confirmation
Comme par enchantement, réunis en congrès à Conakry, les différentes fédérations du parti présidentiel désignent, de leur côté, le Prof Alpha Condé comme leur porte étendard à la prochaine présidentielle en Guinée prévue pour le 18 octobre 2020. Et comme l’on s’y attendait, ce dernier, sans surprise, en a pris acte. Il fallait donc ça pour attester que plus que jamais, les derniers développements de l’actualité politique dans l’espace communautaire corroborent la thèse d’une Cedeao des chefs d’État syndiqués au détriment de celle des peuple s’avère.
Lomé, l’épicentre d’un mal qui gangrène la sous région
En effet, il se souvient que ce virus de manipuler les consciences et tripatouiller la Constitution aux fins d’offrir plus de deux mandats à un Chef d’État en exercice a été détecté à Lomé. Ceci, par les faveurs d’une Assemblée nationale de copains et coquins plutôt nommés qu’élus et d’une Cour constitutionnelle aux ordres. Deux institutions phagocytées qui remettent en scelle Faure Gnassingbé qui était pourtant en difficulté sans pareille en 2017 et dont le régime n’a survécu que grâce à la médiation biaisée de la Cedeao. Dès lors, c’est à juste titre qu’elles ont fait annuler par perte à profit au Prince de Pya, ses trois mandats cumulés entre 2005 et 2020.
C’est donc sans surprise que cette épidémie dont Alpha Condé et Alassane Ouattara se trouve être deux des laborantins ayant fortement travaillé à la fabrication des molécules du virus pathogène atteigne Conakry et Abidjan. Les faits donnent ainsi raison aux observateurs et analystes qui ont toujours vu en la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest, un syndicat des chefs d’État plus soucieux de leurs fauteuils présidentiels et des intérêts qui en découlent que du bien-être de leurs communautés.
L’Afrique francophone aux mains des vallées de l’Occident
Cette obsession à s’accrocher indéfiniment au pouvoir, nonobstant les barrières constitutionnelles et paroles données tend, au fil des années, à s’institutionnaliser au point de craindre une contamination des États anglophones jusque-là exemplaires. Plus curieux, elle est l’œuvre d’une nouvelle génération de dirigeants pourtant pris pour des démocrates, intellectuels, nationalistes et modèles mais qui, à l’arrivée, sont loin de l’être. Tout porte à croire qu’ils sont pire que leurs devanciers généralement pris pour garçons de course de la métropole qui profitent de leur limite intellectuelle pour continuer par contrôler les États africains et les dépouiller de leurs richesses en contrepartie du pouvoir et l’honneur pour les sous-fifres geôliers de la France-Afrique. Une servitude qui déjà coûté à des dirigeants nationalistes et panafricanistes comme Sylvanus Olympio du Togo, Thomas Sankara du Burkina Faso et Patrice Lumumba du Congo. Pour ne citer que quelques-uns de ceux-là qui avaient osé remettre en cause l’ordre établie par la métropole.
Et depuis lors, les peuples d’Afrique francophone, loin de leur vote, voient leur sort remis entre les mains d’un syndicat de dirigeants à la solde de leurs bienfaiteurs dont Alassane Dramane Ouattara en est une illustration parfaite. En témoignent d’abord la présence de Jean Yves le Drian, le Chef de la diplomatie française à Abidjan au lendemain du décès de Amadou Gon Coulibaly, ensuite le silence bruissant du président français, Emmanuel Macron face au revirement de situation du président ivoirien. Contrairement à la célérité avec laquelle celui-ci a salué la promesse de Ouattara de ne point briguer un troisième mandat.
Refonder la Cedeao
Face à cette anomalie diplomatique qui tend à ronger de plus belle l’Afrique francophone, il sonne dès lors l’urgente nécessité d’une révolution sous régionale concertée pour instaurer la vraie Cedeao des peuples. Les peuples des pays aujourd’hui sur la sellette du 3e mandat et plus doivent se concerter rapidement pour endiguer ce virus pernicieux et non se contenter d’une lutte simplement nationale. En effet, c’est un secret de polichinelle que par essence, ce regroupement politico économique est aujourd’hui complètement dérouté de sa feuille de route, celle d’asseoir un véritable espace communautaire des peuples où on est censé promouvoir le bien-être social et la libre circulation des personnes et des biens. Mais que nenni. C’est finalement un vœu pieux des pères fondateurs qui ont péché de léguer la sous-région à des héritiers aliénés et peu nationalistes.
Cette bataille de restauration de la Cedeao, pour toute fin utile, devra donc s’inscrire dans le schéma de la pyramide renversée. Autrement, portée, à bout de bras, par les peuples eux-mêmes à la base au travers des organisations de la société civile qui font de la défense des causes justes, leur leitmotiv.
Le NDI, l’espoir de toute une communauté
Au-devant de cette bataille futuriste de changement de mentalité qui s’impose, s’émergent des organisations qui impactent déjà par leur sérieux et intégrité comme le NDI qui s’offre désormais comme l’espoir d’une communauté africaine éprise de justice, de démocratie et de bonne gouvernance. Et pour cause, le National democratic institut s’est déjà illustrée positivement par le passé en allumant, par-exemple en décembre 2019, à Niamey, ensemble avec des anciens Chefs d’État de la sous-région autour du Président nigérien Mouammadou Issoufou qui dit non à un troisième mandat, la flamme d’une «Afrique sans troisième mandat» pour les chefs d’État.
Cette organisation américaine de promotion de la démocratie et de la gouvernance s’est ensuite illustré positivement plus au Togo dans la foulée de la présidentielle de février 2020. Son sérieux en faveur de la vérité des urnes a provoqué le courroux du pouvoir de Lomé qui l’a vite déchue de son accréditation au profit d’autres organisations plus malléables et marionnettes.
Pour éviter que ce virus n’atteigne finalement le Sénégal et dans un risque non nul le Bénin, cette caravane de «salubrité publique» doit impérativement sillonner toute l’Afrique, surtout celle francophone pour y semer, les graines du respect scrupuleux du principe sacro-saint de la loi fondamentale. Laquelle ne doit point être modifiée pour simple désir de s’accrocher au pouvoir.
Source : Fraternité
Source : 27Avril.com