Jean Kissi : « Nous avons encore la chance de sauver les meubles si nous changeons le régime »

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Jean Kissi :

Le Secrétaire national du Comité d’action pour le renouveau (CAR), Jean Kissi analyse, à travers cette tribune, le quotidien des Togolais et montre l’échec de la gouvernance de Faure Gnassingbé. Pour lui, il faut changer ce régime pour espérer amorcer le développement du Togo.

Le Togo notre pays se trouve dans une situation délétère avec une crise socio-politique vieille de 30 ans qui engendre trop souvent des explosions sanglantes comme ce fut le cas en 1993 avec les événements de Fréau jardin, en mars et avril 2005 à la suite de la mort d’Eyadema Gnassingbé père et récemment en août 2017.
Ces explosions proviennent de la répression d’un peuple qui veut se libérer d’une dictature qui le gouverne depuis 60 ans, le Togo étant le seul pays de l’Afrique de l’ouest à n’avoir jamais connu d’alternance.

Au-delà de cette cocote politique bouillante, le Togo pourtant pays riche se trouve dans un état où les populations sont plongées dans une misère exécrable à cause du pillage des ressources, de la corruption et de la mal gouvernance d’un petit clan qui a fait main basse sur le pays.

Les infrastructures socio-éducatives et sanitaires sont dans le délabrement total. Nos hôpitaux, des mouroirs. Le niveau scolaire a drastiquement baissé et la formation dans nos universités, très encombrées, en totale inadéquation avec le marché de l’emploi.

Les infrastructures ferroviaires n’existent presque plus. Le peu de routes et de retenues d’eau mal construites, parce que les financements détournés, provoquent des inondations dès la première pluie. C’est le cas sur la route de Kpalimé devant le supermarché champion, la nouvelle voie Agoe Adidogonmé devant l’ancienne CECO BTP ou la route d’Aného au niveau du Port et de Baguida. Et ce sont là, les seuls axes bitumés existant à part le Grand contournement. Imaginez le cas des autres routes non goudronnées et sans rigoles.

Du coup, dans les quartiers, la moitié des populations de Lomé est obligée de rentrer dans les eaux sales et boueuses pour pouvoir les vider de leurs maisons avec tous les risques de choléras que cela comporte.

Les capitales régionales instituées par le régime n’échappent pas au délabrement relevé et ne sont même pas comparables à de gros villages de notre ère.

Les axes Lomé-Vogan –Anfoin, Kara-Pagouda et des portions entières de la Nationale N°1 sont une patente illustration de la décadence de la gouvernance dynastique Essozimna-Eyadéma.

Nous avons encore la chance de sauver les meubles si nous changeons le régime. C’est donc maintenant et non demain qu’il faut sauver le pays des mains du système et construire un Togo du 21ème siècle en refondant de fond en comble, l’État togolais.

I- LA NÉCESSAIRE REFONDATION DE LA RÉPUBLIQUE TOGOLAISE

L’analyse faite ci-dessus démontre que toutes les bases de l’Etat sont cassées. Tous les pouvoirs, toutes les institutions, toutes les richesses, toutes les régies financières, sont aux mains d’une minorité. Même le droit de prospérer dans l’entrepreneuriat est conditionné à l’allégeance au clan. Comme si cela ne leur suffisait pas, ils ont usé de tous les subterfuges pour s’accaparer des mairies. Ce n’est un secret pour personne que c’est à coup de fraudes et de bourrage systématiques d’urnes qu’ils se sont inconfortablement taillé la quasi-totalité des mairies.

Constatant que certaines mairies un peu nanties leur échappent à Lomé, ils utilisent leur Assemblée nommée pour arracher les compétences des maires au profit d’un district dont plus de la moitié des membres sont appelés à être nommés alors que les textes précisent que ‘’les collectivités territoriales s’administrent librement par des conseils élus’’. Quelqu’un disait à ce propos qu’ils ont tellement ramassé que même les miettes qui tombent par terre et que l’on veut récupérer pour le peuple, ils se bousculent encore pour s’en saisir. Si nous ne refondons pas cette manière de gouverner, comment pouvons-nous reconstruire une économie émergente et réduire la pauvreté?

Le mal qui frappe le Togo est très profond, c’est comme un cancer et ce n’est pas avec le doliprane qu’on va le guérir.

Du coup, l’impérieuse nécessité de la refondation de l’État togolais tout en demeurant une question politique, présente dans notre vision, un enjeu hautement économique avec pour objectif véritable de : ‘’réduire drastiquement le train de vie de l’État afin d’utiliser la plus-value pour rehausser le SMIG, financer les services sociaux de santé et de l’éducation et investir dans l’industrie et dans les économies locales’’.

Pour ce faire il faut :

Primo : Réduire la pléthore d’élections en une seule au bout de cinq ans

Nous constatons tous que chaque élection au Togo est entourée par 9 mois d’instabilité, de contestations et de violences mettant l’économie du pays sous anesthésie. Les 9 mois de ralentissement des activités économiques évaluées sur les 3 élections minimum que tient le Togo en cinq ans, font perdre pratiquement 27 mois à l’économie togolaise en chaque quinquennat.

Par conséquent, pour donner la chance à l’économie togolaise d’émerger et le temps nécessaire aux togolais de travailler, la première innovation à faire est de ramener le processus de dévolution des pouvoirs locaux, régionaux et de l’Etat à un seul scrutin au suffrage universel direct en cinq ans couplant les législatives et les locales.

Nous savons aussi que chaque élection bien organisée coûte entre douze et quinze milliard à notre pays, c’est à dire entre 36 et 45 milliard et au-delà si les régionales devaient être organisées à part.
Le fait de réduire tous ces processus à une élection législative couplée avec les locales ramène le coût de toutes ces élections à moins de 20 milliards faisant ainsi à l’Etat en cinq ans une économie de plus de 20 milliards à consacrer principalement à la santé, à l’éducation et à la production agroalimentaire et à l’amélioration des salaires.

Secundo : Réduire le nombre des institutions et des postes politiques

Il faut nécessairement balayer la maison politique togolaise.
Comment le Togo peut-il se permettre le luxe avec une population d’à peine 7 millions d’habitants, de reproduire, avec les incidences budgétaires que cela entraîne, le nombre des institutions et des postes qui existent dans les pays qui ont au-delà de 50 ou 80 millions de contribuables? On comprend dans ces conditions pourquoi tout quidam se donne le plaisir de créer un parti pour pouvoir négocier au moment opportun, l’un de ces postes auprès du régime sans jamais avoir obtenu un petit mandat auprès du peuple.

L’État et ses institutions ne peuvent constituer des bonbons qu’on offre à chaque paresseux qui vient jouer au courtisan.

Il faut donc assainir l’échiquier politique en améliorant et en appliquant avec plus de rigueur la charte des partis politiques et réduire le nombre de postes politiques à prendre en charge par les contribuables togolais aux suivants :

– au niveau local, les conseillers municipaux, les maires et leurs adjoints, les conseillers régionaux, les gouverneurs et leurs adjoints.
– au niveau national, en dehors du parlement mono ou bicaméral, du chef de l’exécutif à une seule tête et son gouvernement, du Conseil Supérieur de la Magistrature et sa cour suprême (avec en son sein une chambre constitutionnelle et administrative en dehors de la chambre judiciaire).

Comme autres institutions utiles, on conçoit aisément celle qui s’occupe des droits humains, économiques et sociaux auxquels il faut ajouter le volet protection des consommateurs et la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC).

Nous considérons en ce sens que l’État n’a pas besoin d’un Conseil économique et social et qu’il faut transférer ses compétences au Sénat qui doit devenir ainsi une chambre des communes, des us et coutumes et en même temps la chambre chargée des avis sur le volet économique et social de la gouvernance du pays.
Tertio : Faire de la cogestion, la base de la composition des pouvoirs et institutions

A l’instar de ce qui s’est passé en Afrique du sud à la suite des négociations initiées en décembre 1991 par la Convention pour une Afrique du Sud démocratique (CODESA) qui a garanti les libertés fondamentales et géré toutes les divergences ethniques par la cogestion du pouvoir, le Togo ne peut faire économie de cette expérience s’il veut parvenir à une démocratie stable et à l’unité nationale.

Autant les forces démocratiques ne peuvent plus se résoudre à laisser le pouvoir aux mains du clan qui pille le pays depuis 60 ans, autant il est évident que si l’opposition prend le pouvoir et veut en écarter les partisans du régime actuel, nous ne ferons pas six mois avant qu’ils ne cherchent à reprendre le pouvoir par la violence, puisque nous avons en face des gens qu’on a instrumentalisés en leur inculquant dans le cerveau que ce n’est que par les postes d’État, les institutions, les régies financières et les projets dont l’État bénéficie de la communauté internationale que eux aussi peuvent acquérir la puissance financière et l’ascension sociale.

C’est à cause de ces pesanteurs socioculturelles que le seul moyen de réaliser l’alternance et de garder le pays stable et uni, c’est la cogestion du pays.

Il faudra donc consacrer dans la constitution que : ‘’les membres du Gouvernement sont choisis au sein ou par cooptation des formations politiques en tenant compte de la répartition des sièges à la Chambre des députés. Toutefois, la formation politique majoritaire à la Chambre des députés ne peut avoir plus de cinquante pour cent (50%) des postes au Gouvernement.

Au Parlement et dans toutes les autres institutions de régulation, le principe de représentation des différentes entités est respecté en faisant en sorte que la principale institution anticorruption chargée de moraliser la vie publique soit logée au Congrès et composée de manière paritaire entre le pouvoir et l’opposition et présidée pour un mandat de ‘’un an’’ de manière alternée par les deux sensibilités.
Pour que la cogestion marche, il faut régler le problème de longévité au pouvoir et de concentration de pouvoir entre une seule main. Le principe de la cogestion ne peut s’accommoder d’une présidence à vie et induit automatiquement la question de l’alternance au pouvoir. On ne peut convaincre toutes les entités représentatives de co-gouverner avec un même Président que s’il est garanti qu’après deux mandats la voie sera libérée et que le Président sortant deviendra un arbitre qui ne sera plus dans la compétition, d’où l’impérium du respect scrupuleux de la limitation des mandats.

Dans la nouvelle formulation de l’Etat et des collectivités que nous proposons, les pouvoirs se déclinent et seront dévolus de la manière suivante :

A la suite des élections générales (présidentielle couplée avec les législatives et les locales) si la constitution prévoit que le président de la République soit élu au suffrage direct ou pour faire plus simple, scrutin unique (législatives couplées avec les locales) si la constitution prévoit que le parlement ou les grands électeurs élisent le président de la République comme en Afrique du sud ou aux États-Unis, chacun de ses conseils ou assemblée se réunit successivement pour élire les autres conseils ou exécutifs locaux régionaux et nationaux. Ainsi :

– les conseillers municipaux de chaque commune se réunissent pour élire les maires et un, deux ou au plus 3 adjoints;
– les conseillers municipaux de chaque préfecture se réunissent pour élire les conseillers régionaux et le sénateur à envoyer au Sénat ;
– les conseillers régionaux se réunissent pour élire le gouverneur et deux ou au plus 3 vice gouverneurs (à la mise en œuvre de la réforme, le Togo va être réorganisé en 7 régions administratives notamment la région des plateaux subdivisée en deux (plateaux ouest et plateaux Est) et le grand Lomé érigé en région).
– l’Assemblée nationale et le sénat se réunissent en Congrès pour élire le président de la République et approuver son équipe gouvernementale (seuls les citoyens qui ont un mandat parlementaire ou de chef d’exécutif régional ou local peuvent être nommés membres du gouvernement).

II- LA MARCHE RÉPUBLICAINE VERS L’ALTERNANCE

A voir la façon dont se prépare la présidentielle en face, il est clair que le pouvoir et une partie de la communauté internationale veulent encore nous conduire insidieusement vers une mascarade électorale qui maintienne le système en place. Nous n’en voulons pour preuve que le passage de la délégation conjointe de l’ONU et de la CEDEAO conduite dans notre pays début novembre par le représentant spécial de l’ONU en Afrique de l’Ouest Ibn Chambas pour s’enquérir de l’état de préparation des élections.

Mais en fait, ont-ils besoin de venir au Togo pour savoir le minimum à faire pour avoir une élection crédible et transparente?

N’est-ce pas la CEDEAO elle-même qui a compilé dans une feuille de route les conditions minimales qu’il faut pour une élection transparente ? Y figurent en bonne place :

1. La question du fichier électoral

Le fichier électoral pour être propre doit être conçu sur la base d’un recensement consensuel opéré de manière contradictoire et audité de manière transparente. Ce qui n’est pas le cas pour l’actuel fichier. Il y a donc lieu à défaut d’annuler et de reprendre le recensement unilatéral opéré par le gouvernement, de fournir à tous les acteurs politiques le rapport d’audit de la CEDEAO sur le fichier actuel pour que chacun puisse se prononcer !

2. Le déverrouillage des institutions

La feuille de route préconise la recomposition de la Cour constitutionnelle et le renforcement du processus électoral, notamment une CENI inclusive.

Cette demande de la CEDEAO à propos de la CENI rejoint ce que préconisait déjà l’APG, en l’occurrence une CENI composée de manière équilibrée entre le pouvoir et l’opposition.

Cela va de soi car c’est une logique universelle que lorsqu’on va à une compétition, l’arbitrage à défaut d’être neutre, doit être égalitaire entre les deux camps.

La parodie du 20 décembre 2018 et les alliances au sommet pour les élections des maires nous ont prouvé que l’Unir, l’UFC, le NET et le PDP constituent la mouvance du pouvoir face à l’opposition.

Si le pouvoir n’a pas la répétition de la fraude dans son plan et n’a pas peur d’une présidentielle transparente, il doit tenir compte de ces éléments pour recomposer la CENI et ses démembrements.

3. Le vote de la diaspora

En exigeant des membres de la diaspora une carte consulaire datant de 6 mois, le pouvoir construit des blocages au vote de la diaspora et viole ainsi les droits de nos concitoyens installés à l’extérieur qui contribuent massivement à l’économie nationale. Le recensement électoral doit se faire sur la même base pour tous et des CLC et bureaux de vote doivent être rapprochés au plus de 100 km de chaque électeur de la diaspora ou à défaut être installés dans tous les consulats.

Tous ces points essentiels de la feuille de route n’ont nullement été mis en œuvre à ce jour . La manière dont le régime en place se comporte depuis 60 ans nous démontre à satiété que ce pouvoir réfractaire au changement ne nous donnera même pas la démocratie sur un plateau de bronze.

Le comble, c’est quand nous nous enfermons dans la fatalité religieuse en disant que c’est Dieu lui-même qui viendra régler le problème togolais. Dieu ne descend pas du ciel en boubou blanc pour accomplir ses œuvres. Il passe par des hommes. Il passe par nous.

Je dis qu’il y a très longtemps que Dieu est accroupi à nos pieds les mains suspendues en l’air attendant que nous portions le fardeau juste aux genoux qu’il puisse nous le porter sur la tête mais nous continuons de rester sourds.

N’est-ce pas la même remarque que nos évêques qui ont pour premier devoir de nous dire la vérité nous font dans leur message à la nation togolaise de ce 21 novembre 2019, en nous disant être ‘’une opposition qui semble ne pas savoir ce qu’elle veut’’ et ‘’qu’à peine les dates des prochaines élections présidentielles annoncées, on assiste à une avalanche de déclarations de candidatures apparemment plus préoccupées les unes et les autres par des intérêts personnels que par une réelle volonté de conquérir et d’exercer le pouvoir pour le bien de toute la nation’’.

Il est souvent dit que le criminel, ce n’est pas seulement celui qui déverse des armes et des gourdins pour torturer, blesser et tuer la population mais le criminel, c’est aussi celui qui a la possibilité de contribuer au mouvement de libération du peuple mais qui pour des intérêts égoïstes et partisans refuse de le faire ou même compromet sciemment le mouvement en cours.

Oui notre problème dans l’opposition, c’est que nous sommes habités par des égos individuels et partisans très surdimensionnés. Le cancer qui gangrène l’opposition depuis le début du combat démocratique, c’est de considérer chaque compétition électorale comme un moyen d’écraser les autres pour démontrer qu’on est le plus fort de l’opposition de sorte que si on a l’impression qu’un autre pourrait nous dépasser, on manœuvre pour entraîner l’opposition au boycott.

Il faut un sursaut patriotique de tous les Leaders de l’opposition avec un immense esprit de sacrifice et un sens profond du sacerdoce pour construire une nouvelle dynamique, un nouveau mouvement d’ensemble très fort avec pour mission de se battre ensemble pour les conditions des élections, former nos membres des bureaux de vote ensemble, se battre ensemble dans les alentours des bureaux de vote pour empêcher la fraude puis, sauvegarder les résultats à rendre publics afin que les populations puissent défendre ensemble la victoire de l’opposition et se mobiliser pour que le vrai vainqueur des élections accède au pouvoir.

Sur le combat pour les conditions des élections, Mgr Kpodzro a déjà fait un grand travail, mais il faut maintenant aller plus loin et aborder la stratégie électorale en bloc.

Oui, c’est un combat bloc contre bloc, entendu que le bloc de l’opposition est un bloc pluraliste dont l’autre mission est d’harmoniser et d’accompagner les candidatures représentatives de l’opposition comme c’était le cas avec ‘’Y en a marre’’ et ‘’Benno siguil Sénégal’’ face à Wade ou à l’instar du RHDP en 2010 en Côte d’ivoire.

Tout doit se passer comme une corbeille dans laquelle chacune des forces démocratiques représentatives doit venir verser sa candidature ainsi que celles d’un certain nombre de personnalités politiques indépendantes :

– on imagine dans ce cas que le CAR qui a gagné ce régime aux législatives de 1994 et qui a continué par avoir un minimum de mandat à toutes les législatives est légitime d’y verser une candidature. ;
– l’ANC avec le nombre de sièges gardé après son départ de l’UFC, ses scores aux législatives de 2013 et aux dernières locales est légitime pour y verser un candidat ;
– l’ADDI avec ses mandats dans l’Assemblée de 2013 est légitime pour y verser un candidat ;
– nos frères qui sont restés à la C14 ont leur mot à dire
– le MPDD avec son positionnement dans les récentes alliances pour les mairies peut jouer dans cette corbeille.
– le Professeur Wolou dont le parti vient de quitter la C14 sur cette question de candidature doit être impliqué dans ce débat.
– le PNP s’il accepte participer à l’élection est légitime pour se retrouver dans cette corbeille.
On ne peut pas exclure de cette corbeille certaines personnalités dont le nom circule avec insistance comme celui de Kako NUBUKPO.

Il est un peu tard mais tout n’est pas perdu. En 2005, il a fallu juste deux mois et demi pour mettre le pouvoir en difficulté. Nous avons presque le même délai devant nous. Les choses doivent évoluer très vite. Il faut impérativement que toutes ces formations et personnalités déclarent leurs candidatures au plus tard le 05 décembre 2019 qui se situe exactement à 3 mois de la date limite avec pour précision utile que chacun inscrit sa candidature dans la dynamique unitaire.

Ensuite lors d’un processus regroupant les états-majors des principaux partis et regroupements politiques autour de ces candidats, il faut procéder à l’harmonisation des candidatures, en obtenant des désistements à la suite de concessions faites sur des responsabilités présentes et futures aux uns et aux autres afin de pouvoir ramener la liste à trois, deux candidatures stratégiques et même par miracle une candidature commune.

C’est le minimum que le peuple et la nature des événements nous commandent.

C’est le lieu de m’adresser à nos frères du PNP pour dire que je comprends et je partage leur position : ‘’ pas de quatrième mandat pour Faure’’.

Cette position se justifie d’autant plus que le peuple togolais, la seule fois qu’il s’est prononcé sur la constitution a posé un sacrément qu’aucun président quel qu’il soit ne fasse plus de deux mandats au pouvoir.

Quels que soient les faits historiques, juridiques ou sociaux, nous ne pouvons pas en tant que combattants de la démocratie, admettre que celui qui a déjà fait trois mandats en piétinant le sacrément du peuple, veuille encore se donner un quatrième mandat.

Mais faisons attention que cela ne se résume pas en un simple boycott de la présidentielle comme ce fut le cas pour la parodie du 20 décembre 2018.

Il me semble que c’est Ché Guévara qui disait que la révolution est comme un pédalage de vélo, quand tu t’arrêtes, tu tombes ! C’est pourquoi nous devons intégrer le fait que c’est mettre plusieurs cartes de notre côté que de démontrer que c’est la violation de leurs droits électoraux qui autorise les populations à se soulever légitimement sans pouvoir être critiquées ni par la CEDEAO ni par la communauté internationale en général. C’est ce levier qui a été utilisé en Gambie et récemment en Bolivie.

Nous savons par contre que chaque fois qu’un peuple s’enferme dans une posture révolutionnaire et fait la chaise vide dans le processus électoral, la communauté internationale dit au régime en place d’avancer et nous savons tous que dans ce monde où nous sommes, aucun pays ne peut évoluer en autarcie.

Les deux courants paraissant diamétralement opposés peuvent constituer les deux faces d’une même dynamique.

C’est-à-dire, si la dynamique de l’opposition constate malgré toutes ses actions que le pouvoir persiste dans la fraude et la parodie avec des résultats préparés d’avance et gardés en coffre-fort, c’est ensemble que nous devons décider de nous replier sur la rue, par contre si l’opposition constate qu’elle ne dispose d’aucun moyen pour arrêter le processus en cours mais que des efforts ont été faits pour limiter les dégâts, alors, que ceux du courant PNP se mobilisent ensemble avec les autres pour défendre la victoire de l’opposition.
En définitive, ce que je propose, c’est une Dynamique pour le Changement en 2020, je dirai une DC20 en m’inspirant de cette ancienne gloire de l’aéronautique appelée DC10.

J’interpelle ici mes aînés, car il y a péril en la demeure. Le combat dans lequel nous sommes engagés est un combat pour sauver le Togo. Ne faisons pas du ‘’chacun pour soi’’ ou du ‘’c’est nous le plus fort de l’opposition’’. On ne va pas à une pareille compétition avec pour objectif inavoué d’être le meilleur des recalés !

Aux forces démocratiques, je dis qu’Il n’y a pas de répit car le combat continue de plus belle. Tu dois choisir entre l’acceptation illimitée de la tyrannie et une résistance salvatrice pour toi et pour les générations à venir. Il n’y a point de dignité pour un peuple qui ne sait résister à la tyrannie.

Peuple Togolais, ton destin est entre tes mains.

Jean KISSI

Ancien député
Conseiller municipal de Golfe 5

Source : www.icilome.com