Le vendredi 15 février dernier, Faure Gnassingbé a procédé à la pose de la première pierre d’un hôpital dit de référence baptisé « Saint Pérégrin ». Pour la petite histoire, Pérégrin Laziosi est un religieux servite italien reconnu saint par l’Eglise catholique. Il est le saint patron des maladies incurables comme les cancers, le Sida, etc. Le fait de donner ce nom à une structure de référence n’augure pas forcément du bon.
Evaluée à 17 milliards de francs CFA, la construction de cet hôpital sera achevée dans un an. Ce projet est une initiative de la Caisse Nationale de Sécurité sociale (CNSS) avec à sa tête depuis quelque temps une certaine Ingrid Atafeinam Awade qu’on ne présente plus. Même si cette initiative est à saluer dans un pays où les structures sanitaires (hôpitaux, CMS et consorts ) sont devenus des porcheries, sinon des mouroirs décriés par les populations, il reste que le processus de sa réalisation pose un sérieux problème sur la gouvernance du pays.
La Caisse Nationale de Sécurité Sociale est une structure à trois entités, à savoir l’Etat, le Patronat et le syndicat des travailleurs. Sa mission première est de veiller au bien être des travailleurs et des retraités. Le Conseil d’Administration de cette structure est composé du ministre du Travail et de la Fonction publique, des délégués du patronat et des syndicats.
Les projets à réaliser sont validés par le Conseil d’Administration sur proposition de la Direction. Ce projet de construction de l’Hôpital Saint-Pérégrin d’un coût de 17 milliards francs cfa est entièrement financé par la CNSS. Les différentes composantes du Conseil d’Administration l’ont-elles validé ? Dans les coulisses, on apprend qu’en dehors du ministre du Travail et de la Fonction publique, les deux autres composantes, c’est-à-dire le Patronat et les syndicats n’ont pas donné leur quitus parce que l’argent des travailleurs et retraités doit servir à autre chose qu’à construire un hôpital. Y –va-t-il eu un concours pour sélectionner la meilleure maquette architecturale ? De toute évidence, non. Est-ce qu’il y a eu un appel d’offres pour sélectionner et retenir la ou les entreprises qui doit ou doivent réaliser l’ouvrage ? Il n’existe aucune trace de cet appel d’offres nulle part. On annonce la livraison des travaux dans douze (12 mois). S’agit-il de structures préfabriquées où c’est une construction normale ? Le ministère de la Santé a-t-il été associé à la conception du projet et à sa réalisation ? Qui a donné le nom « Saint-Pérégrin » à cette structure ? Cet hôpital est-il une simple structure de diagnostic ou une structure sanitaire complète digne de ce nom ? Voilà autant d’anomalies relevées dans la réalisation de ce projet.
Il est inadmissible qu’au Togo, certains individus, forts du pouvoir qu’ils ont, décident de privatiser le pays et d’en faire ce qu’ils veulent, en violation des règles et dispositions élémentaires de gestion.
Ingrid Awadé, Directrice Générale de la CNSS, n’a que faire de l’avis du Conseil d’administration. Elle a décidé toute seule de prendre l’argent des travailleurs et retraités pour construire un hôpital dit de référence. Et personne dans le pays ne peut lever le petit doigt pour dire que ce projet ne s’exécute pas dans les règles de l’art, dans le respect des finances publiques à l’heure où on évoque à gorge déployée la lutte contre la corruption et les infractions assimilées.
Comment peut-on comprendre qu’un projet de 17 milliards de francs CFA n’a pas connu d’appel d’offres? Comment comprendre qu’on n’associe pas le ministère de la Santé à la construction d’un ouvrage qui relève de son secteur, même si c’est la CNSS qui apporte le financement? Comment les travailleurs et retraités n’ont pas voix au chapitre pendant qu’on prend l’argent de leurs cotisations pour construire un hôpital dont peu d’entre eux auront accès aux soins? Ingrid Awadé gère la CNSS comme un business personnel, à l’instar de ce qu’elle a eu à faire à la Direction générale des impôts.
En quelques années ils sont plusieurs individus jadis connus comme des nécessiteux à devenir millionnaires dans la gestion de la DGI. La réalisation des projets de ce genre est devenue le plus grand circuit d’enrichissement illicite puisque ce sont les entreprises des mêmes individus ou proches qui livrent le sable, les graviers, les fers, bref tout le matériel de construction et de finition. Les fameuses directions régionales de la DGI construites à coup de centaines de millions étant jusqu’à une période récente abandonnées dans la brousse à la merci des reptiles et rongeurs, il n’est pas exclu que ce nouveau projet, comme celui des villas de plus d’un milliard de FCFA à la cité du Millénium, participe à cette logique.
Le problème est que sous la gouvernance de Faure Gnassingbé, ce sont ces femmes pompeusement appelées «Égéries » de la République qui papillonnent autour de la présidence avec leurs réseaux mafieux. Elles ont tellement pris d’importance à l’ombre de leur protecteur qu’elles sont devenues un frein majeur pour le développement du pays.
Prions vivement Saint-Pérégrin, le patron des maladies incurables, pour que le projet de construction de l’hôpital qui porte son nom au lieu d’un nom authentiquement togolais, ne débouche sur un nouveau fiasco. Que de pérégrinations et d’errances !
Source : www.icilome.com