Il y a cinq ans, la journaliste et le réalisateur de RFI Ghislaine Dupont et Claude Verlon étaient assassinés à Kidal, au Mali, alors qu’ils étaient en reportage. Un hommage leur a été rendu samedi 27 octobre à la Maison de la Poésie à Paris en présence d’artistes, mais aussi de leurs amis et confrères.
Poésie, musique africaine et française, mais aussi des souvenirs de leurs proches ont alterné 2 heures durant pour raviver la mémoire de nos reporters. Sur le mode de Je me souviens de Georges Perec, les proches et confrères de Ghislaine Dupont et Claude Verlon ont égrené leurs souvenirs.
« Je me souviens qu’elle voulait m’emmener dans la région des Grands Lacs d’Afrique centrale et qu’elle me disait « tu verras, là-bas, le temps ne passe pas pareil » », se rappelle une proche de Ghislaine Dupont. « Je me souviens que personne n’aurait pu te retenir, Claude, ceux qui t’aimaient ne pouvaient le vouloir. Tu guettais l’actualité et la moindre place dans les avions militaires », relate un proche de Claude Verlon.
Opacité
Un baume pour la famille qui se bat depuis cinq ans contre l’opacité qui entoure ce crime. « Comme depuis 5 ans, comme depuis la première minute où j’ai appris leurs morts, j’attends la vérité, de mettre un visage sur les gens qui ont tenu les armes pour les abattre », s’impatiente Apolline Verlon, fille du réalisateur de RFI.
« Je voudrais savoir qui sont les commanditaires, pourquoi, et surtout pourquoi on nous a raconté tout et son contraire ? Moi je me dis qu’on nous ment, ou qu’il y a vraiment quelque chose à cacher », s’interroge Marie-Solange Poinsot, mère de la journaliste.
L’association Ghislaine Dupont et Claude Verlon ne compte pas baisser les bras et entend poursuivre le travail de recherche de la vérité. « Les tueurs, certains ont été identifiés, d’autres sont dans la nature, a priori aucun mandat d’arrêt n’a été annoncé, alors y a-t-il des gens que l’on protège ? Y a-t-il des gens qui bénéficient d’une impunité alors qu’on pourrait les rattraper ? Est-ce que c’est parce qu’ils sont en Algérie ? Ou leur arrestation pourrait causer un certain nombre de problèmes ? Nous, nous voulons des procès, nous voulons que ces gens soient arrêtés et jugés, il nous semble que c’est possible. Quelle est la réalité des circonstances de l’enlèvement et de l’assassinat ? Il est évident que certains savent donc pour cela nous demandons la levée du secret défense », rappelle Pierre-Yves Schneider, porte-parole de l’association.
De plus en plus de femmes journalistes assassinées
En cet anniversaire, une soixantaine de femmes grands reporters à travers le monde ont signé une lettre dénonçant l’assassinat de femmes journalistes.
« Visiblement nous sommes entrés dans une nouvelle ère, auparavant, lorsqu’une femme journaliste reporter était tuée au combat, ça voulait dire qu’elle avait pris le risque d’aller sur un terrain de guerre et malheureusement elle pouvait tomber dans une embuscade sous les bombes ou autre, explique Laurence Lacour, vice-présidente de l’association Ghislaine Dupont et Claude Verlon et l’une des signataires de ce manifeste. Nous constatons que depuis la mort d’Anna Politkovskaïa en 2006, les femmes, les journalistes, sont assassinées.
C’est-à-dire que leurs exécutants, les exécutants de cette hache macabre, obéissent à des ordres, qui sont souvent gouvernementaux, même si ce sont évidemment des responsabilités difficiles à cerner. Et en listant malheureusement les noms des dernières victimes – notre consœur maltaise, une consœur indienne qui a été tuée également l’année dernière de plusieurs balles dans la tête, Ghislaine bien sûr, Marie Colvin l’Américaine qui a été exécuté sur ordre du gouvernement syrien – il nous a semblé qu’il était important de souligner ces deux éléments. »
Source : www.cameroonweb.com