Je me suis donné le temps de lire le rapport, moins de 100 pages, produit par la Cour des comptes au sujet du fonds de riposte et de solidarité covid-19 (FRSC). Le rapport n’a porté que sur les dépenses engagées en 2020, sachant que la riposte s’est poursuivie bien au-delà. Une lecture très instructive qui m’amène à partager avec vous quelques-uns de ses éléments essentiels.
Disons-le net, la Cour des comptes s’est donné la peine d’être délicate et prudente, en enrobant ses propos dans des formules policées pour ne froisser personne. Ce qui n’enlève rien au fond du dossier. Mais elle a fait son travail correctement. Elle a dit les choses telles qu’elles se présentent. Elle a relevé des anomalies, des irrégularités des procédures non-conformes aux dispositions légales. Tous les vices de forme relevés dans le rapport portent sur environ trente-neuf milliards trois cent cinquante-sept millions neuf cent quarante-neuf mille sept cent cinquante-sept (39.357.949.757) francs CFA. (Oui, j’ai fait les calculs).Quatre cents (400) milliards étaient prévus sur plusieurs années.
Il faut savoir que le montant total destiné à la riposte Covid en 2020 est de cent quatre-vingt-trois milliards quatre cent quatre-vingt-quatorze millions six cent vingt mille huit cent quatre-vingt-deux (183.494.620.882) francs CFA. Ce qui veut dire que les 39.357.949.757, c’est plus de 21% du montant total alloué à la riposte Covid en 2020, sont dépensés en dehors des procédures régulières d’engagement des deniers publics. C’est considérable.
Ces vices de forme se résument essentiellement à : • des achats sont effectués sans qu’une lettre de commande ou un contrat ne soit établi ; • à la réception des commandes, une seule personne du ministère signe le procès-verbal, alors que selon la procédure normale plusieurs personnes doivent signer ;• certains prestataires ne disposent pas de carte d’opérateur économique ni de quitus fiscal, alors que c’est exigé par les textes ;• des dépenses sont effectuées sans pièce justificatives ;• des achats sont effectués sans aucun document de commande ;• des livraisons sont faites sans procès-verbal de réception ;• des fournisseurs ont produit des factures non certifiées ;• des gratifications, telles que des primes mensuelles, sont payées directement par le Trésor ou au niveau de la Coordination Nationale, sans base juridique, c’est-à-dire que ce sont les responsables qui décident seuls selon leurs désirs de distribuer cet argent ;• des marchés sont passés par entente directe, parfois avec l’autorisation de la Direction Nationale du contrôle des marchés publics (DNCMP) ou celle des partenaires techniques et financiers, alors que c’est la procédure de demande de cotation qui est prévue par le décret présidentiel ;• des marchés sont passés sans les descriptions techniques des produits et des services commandés, c’est comme si on passe commande d’une voiture sans dire si c’est une Mercedes ou une deux-chevaux qu’on veut acheter, et sans préciser la quantité ;• des gens ont bénéficié du transfert Novissi, alors qu’ils n’ont pas droit à cet argent.
Justement, Novissi a bénéficié de treize milliards cent soixante-neuf millions neuf cent cinquante-et-un mille sept cent quarante-six (13.169.951.746) frans cfa. Le rapport indique aussi que sur toute la somme allouée à ce programme, il reste un reliquat de sept cent soixante-dix-neuf (779) millions qui ne sont pas restitués à l’Etat.
Où se trouve cet argent ? Quelle destination a-t-on donnée à cet argent ?Attention, il faut le préciser, le rapport ne formule aucune allégation de corruption incriminant directement un responsable. Qui est fou ?
En revanche, le rapport écrit clairement ce qui suit, au sujet des commandes passées sans tenir compte des formalités légales prévues par la réglementation en vigueur :« Des vérifications réalisées par la Cour, il ressort que ces autorités contractantes ont passé ces commandes payées en totalité, de façon verbale avec les prestataires. La CNGR COVID-19 a essayé de régulariser ses commandes mais cette régularisation n’a respecté ni la procédure de demande de cotation, ni celle d’entente directe. Cette manière de procéder ouvre la voie à toutes sortes de dérives à savoir l’absence de spécifications techniques et des quantités à livrer, le non- respect du principe qualité/coût, la mauvaise exécution de la commande, la surfacturation, la corruption occasionnant ainsi l’inefficacité de la commande publique. »
Les observations de la Cour suscitent des interrogations légitimes. Les Togolais sont en droit de savoir si les vices de forme relevés par la Cour sont constitutifs ou non d’actes de corruption. Qui situera les Togolais ? Le chef de l’Etat, prendra-t-il les dispositions qui s’imposent pour clarifier les choses et situer les responsabilités ? Les Togolais attendent, ils veulent savoir, ils en ont le droit !Une bonne partie de l’argent dépensé est un prêt accordé au Togo. Il va falloir le rembourser intégralement. Même si c’était un don, il fallait le gérer avec beaucoup plus de sérieux et de rigueur.
On ne peut pas continuer à endetter les Togolais et à dépenser l’argent reçu des créanciers comme si ces fonds appartenaient à ceux qui sont chargés de sa gestion. Trop de gens s’enrichissent sur le dos des Togolais.
Ça suffit !
Gamesu
Nathaniel Olympio
Président du Parti des Togolais
Source : Icilome
Source : Togoweb.net