Gerry Taama : « Le goût de la rue que prennent nos jeunes est une grave menace pour la paix sociale »

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Le président du Nouvel engagement togolais (NET) reste préoccupé par la tournure que prennent les mouvements des élèves dans les rues. Il appelle Faure Gnassingbé à « faire quelque chose » pour remédier à la situation. Pour cela, il fait trois propositions pour une sortie de crise. Lisez plutôt !

Monsieur le Président, il faut faire quelque chose.

C’est d’abord en tant que citoyen et parent que je vous écris cette lettre ouverte. Et je choisis pour ce faire de passer par un média que vous affectionnez pour vous adresser aux Togolais : Facebook.

Monsieur le président, voici plusieurs jours que nous assistons, dans presque toutes les rues des grandes villes togolaises, à un spectacle affligeant : des enfants, en uniformes, occupant la place publique au motif de grève des enseignants. Hier, j’ai été bloqué à Lomé par plusieurs groupes d’enfants, parfois âgés de moins de 10 ans, armés de bâtons qui interdisaient le passage sur la route, invectivant, menaçant, grisés par une insolence nouvelle et hors toute règle morale, de tout encadrement. D’après les informations qui me sont parvenues, d’autres auraient saccagés des édifices publics. J’en ai vu, personnellement, affronter les forces de l’ordre, jeter des cailloux. A moins de 10 ans, ils ont affronté des policiers, gendarmes et militaires, et parfois, ils ont pris le dessus.

Ces enfants, monsieur le Président, sont pourtant, pour la plus part en tout cas, bien éduqués chez leurs parents, respectueux à l’école de l’autorité des enseignants, mais lâchés comme des fauves dans la rue, ils sont en train de goutter à une liberté vénéneuse, et ceci en fait des citoyens incertains demain.

Personnellement, entre les enseignants et le gouvernement, je n’ai pas de parti pris. Le rôle des syndicats est de lutter pour l’amélioration des conditions de vie de leurs membres. Si autant d’enseignants suivent les mots d’ordre des syndicats, c’est qu’il y a un problème de fond que vous devez résoudre. Et en toute chose, l’important n’est pas d’avoir raison, mais de faire entendre raison à son protagoniste. Dans ce cas de figure, ni vos ministres concernés (qui ont eu tendance à jeter de l’huile sur le feu au lieu de faire preuve d’empathie), ni votre premier ministre n’ont manifestement pas encore trouvé le bon angle d’attaque.

Monsieur le Président, il faut faire quelque chose. Il faut agir. Des pistes sont pourtant là. Et je vous en propose trois.

La première est de rencontrer dans les plus brefs délais tous les syndicats des enseignants. Vous avez, en plus de la légalité que vous confère votre statut de président de la République, la légitimité des urnes. Et les enseignants ont été vos troupes les plus industrieuses lors des élections dernières. J’en sais quelque chose. Rencontrez les syndicats et discutez avec eux à huis clos.

Mettez ensuite un moratoire sur les précomptes, avec remboursement immédiat des sommes retenues, et ce jusqu’à la mise en œuvre du statut particulier des personnels de l’éducation. Ce statut particulier est capital pour le bon fonctionnement des personnels de l’éducation. Monsieur le président, un fonctionnaire qui grève peut voir son travail réalisé par quelqu’un d’autre, ou il peut le reprendre là où il l’avait laissé. Un enseignant travaille sur un programme définit dès le premier jour de l’année scolaire. S’il manque une journée de cours et que l’Etat refuse de le payer pour cette journée manquée, il lui est loisible de considérer lui aussi que le travail pour lequel l’Etat refuse de le payer n’a pas à être fait. Seul un statut particulier peut régler cette situation qui est singulière à l’éducation. Faites ce moratoire pour ramener les élèves dans les écoles. Ce pourquoi nos enfants manifestent, c’est pour ces cours considérés comme faits, et ces cours le sont ainsi parce que les précomptes ont été appliqués, souvent avec maladresse, et des enseignants qui n’ont pas grevé se retrouvent même sur la liste.

La troisième solution est la tenue, avant la fin de l’année 2017, des états généraux de l’éducation tels qu’ils avaient été programmés mais jamais organisés. Le problème de l’éducation dans notre pays dépasse le seuil spartiate du confort des enseignants. Il concerne le niveau général des élèves, qui baisse d’années en années. Ma mère a été une enseignante redoutable d’efficacité avec un niveau de lycée. Aujourd’hui, elle corrige les fautes de français d’étudiants en master. C’est le niveau général des générations futures qui est inquiétant.

Monsieur le Président, le goût de la rue que prennent nos jeunes est une grave menace pour la paix sociale. La baisse de niveau est encore plus dangereuse : c’est un risque sérieux pour l’essor de la nation togolaise. Faites quelque chose. Agissez, Monsieur le Président.

Gerry TAAMA

www.icilome.com