Gerry Taama agressé ou un cœur blessé se Moque de la Démocratie

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L’image et les vidéos seront sans doute les plus commentées sur la toile togolaise les jours à venir. Gerry Taama, président de Nouvel Engagement togolais, NET, parti politique qui se définit comme centriste, agressé à Bruxelles, chassé par des jets d’œufs durant une conférence qu’il animait devant une dizaine de Togolais.

Gerry Taama agressé ou un cœur blessé se Moque de la Démocratie

Depuis la publication des premières images, les commentaires se sont multipliés. Si la majorité des internautes, même sur la propre page Facebook de l’intéressé, semblent d’accord avec l’acte, quelques-uns le condamnent au nom de la démocratie et la liberté d’expression. Deux positions non conciliables qui ne sont que la matérialisation de ce que ce pays est devenu depuis des lustres : un champ de bataille fratricide.

Il est risible, hypocrite et cynique de continuer à utiliser des termes comme démocratie, liberté d’expression… pour expliquer les actes des citoyens dans un pays qui depuis des décennies est devenu un cauchemar pour l’écrasante majorité de ses fils. Le jour où, en 2005, devant mes yeux, des miliciens de Faure Gnassingbé ont abattu, en plein midi, à Adidogomé, un jeune homme qu’ils accusaient du crime d’être un militant de l’opposition, la première chose à laquelle j’ai pensé n’était pas une discussion avec ces miliciens, mais la vengeance. Quand, quelques jours après, à Tsévié, on m’a montré une femme devenue presque folle parce que son fils unique a été décapité à Bè par les militaires, ce n’est pas à une conférence avec ces assassins que j’ai pensé. Quand nous voyons les brimades que subissent les Togolais de Sokodé, de Mango, de Bafilo, de Kpalimé, de Bè depuis août 2017, la démocratie et la liberté d’expression ne sont pas les premiers mots auxquels nous pensons.

Ceux qui ont lancé ces œufs hier à Bruxelles n’ont que faire de la démocratie et de la liberté d’expression. Et c’est normal : un cœur blessé, vraiment blessé, se fout de la démocratie, il cherche à se venger. Ces manifestants ont vu en Gerry Taama une béquille du pouvoir qui a brisé leur vie en les envoyant à un douloureux et humiliant exil dont, peut-être, ils ne se remettront plus jamais. Ils ont pensé à leurs proches tués, emprisonnés, torturés et mutilés au Togo. Nos leçons de démocratie et de liberté d’expression n’y changeront rien.

Gerry Taama est un homme avec beaucoup de qualités, dont je peux témoigner, à travers au moins deux expériences que j’ai eues avec lui, du bon cœur. Mais il faut qu’il comprenne désormais que ses choix politiques, dont je suis l’un des premiers pourfendeurs, l’exposent à l’ire d’une grande partie du peuple brisé et poussé jusqu’à l’inhumanité ou plutôt à sa vraie humanité.

Il a été, hier, Dieu merci, sauvé par d’autres compatriotes. Mais ceci est un avertissement. Le mal, la dictature des Gnassingbé, a réussi à semer en nous tous les graines de la vengeance et de la haine, et nous en sommes victimes, de tous les bords politiques. Un avertissement : ceci fut un avertissement.

David Yao Kpelly

27Avril.com