Feu vert hors norme

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Une petite recherche a permis de savoir ce qu’il en est, en France, de la responsabilité et des conséquences pénales des crimes commis par le chef de l’État ou en son nom pendant l’exercice de son pouvoir. Le périmètre de sa responsabilité et de son irresponsabilité est bien précis. Seule la période couverte par son mandat au poste le dispense de poursuite. Les spécialistes de droit et politologues de UNIR sont-ils capables d’expliquer aux Togolais les réelles motivations de l’article 75 violemment inserré dans leur nouvelle constitution ?

En France, voici ce que dit la loi : « La responsabilité du président français est originale puisqu’il bénéficie d’une immunité pour les actes qu’il commet dans l’exercice de ses fonctions et d’une inviolabilité temporaire pour tous ses autres actes jusqu’à la fin de son mandat. En fait, le premier des français est irresponsable des actions accomplies dans l’exercice de ses fonctions, et pour ce qui est étranger à sa fonction, il bénéficie d’une suspension civile et pénale des procédures engagées contre lui jusqu’à la fin de son mandat. Seule une réunion du Parlement en Haute Cour peut le destituer s’il venait à manquer à ses devoirs de manière manifestement incompatible avec l’exercice de son poste…nul n’est au-dessus des lois, quels que soient sa fonction élective, administrative ou son niveau de notoriété sociale »

Lorsqu’on cherche plus loin, l’on découvre que même les rois de France ne jouissaient pas d’une immunité à vie. Ce blanc seing ne leur avait été accordé nulle, part écrit noir sur blanc. Comme cela se constate, aucun président français, de De Gaulle jusqu’à Sarkozy en passant par Pompidou, d’Estaing, Mittérand, Chirac, sachant que la justice l’attendra au bout de son mandat, ne peut s’arroger le droit de vie et de mort sur ses concitoyens ou disposer à sa guise des richesses de son pays pour le seul fait qu’il a été élu président. Les fautes graves et crimes commis durant son mandat sont pénalisables et peuvent être mis en jugement dès son départ du poste. Ici aux États-Unis comme partout dans le monde, les recherches sont formelles : un ancien président, en dehors du respect qui lui est dû en raison de ses hautes fonctions antérieures à la tête de l’Etat, ne peut être placé à vie au-dessus de la loi. Cette disposition est comme une balustrade au bord d’un pont, un garde-fou pour empêcher le détenteur du pouvoir suprême de tomber dans les abus et travers les plus monstrueux car, le pouvoir corrompt et celui qui l’exerce tend à se prendre pour un tout puissant et intouchable.

Le Togo a connu, entre 1967 et 1990, une dictature particulièrement meurtrière. D’où l’esprit et la lettre de la constitution de 1992. Toute loi fondamentale est inspirée par l’histoire du pays qui l’adopte. Elle protège les peuples contre leurs dirigeants et non le contraire. Alors, la question persiste : à quoi rime la constitution UNIR du 8 mai 2019 et qui protège t-elle ?

Et voilà une opposition togolaise qui, tout en dénonçant en bloc ce qu’on peut appeler une perversion constitutionnelle, accepte paradoxalement de prendre part à une élection couverte par le texte qu’elle rejette. C’est atypique, même comique, quand on se met gaillardement en rang pour aller piloter l’arrière train d’un système électoral illicite, défavorable d’où on est en plus absent. Là aussi, il faudra des spécialistes pour faire comprendre cette cacophonie politique à nos jeunes étudiants qui ont choisi d’étudier le droit et les sciences politiques.

Source : telegramme228.com