Faure Gnassingbé, un donneur des leçons?

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« La Mission a reçu plusieurs listes de victimes et de blessés, ainsi que de disparitions. La Mission outre ces données, a reçu des témoignages particulièrement crédibles indiquant que le nombre de personnes décédées se situe entre 400 à 500. Selon la mission, les données concernant les exécutions sommaires n’ont pas été suffisamment prises en compte. Or, la Mission a été informée des cas d’exécutions sommaires notamment à Atakpamé et à Aného sans oublier Lomé. Par ailleurs, le médecin légiste de la Mission a constaté des incohérences et des contradictions entre les informations orales obtenues de sources officielles et les données figurant dans les registres des morgues ou transportées dans les centres hospitaliers. La Mission a été informée par des sources crédibles de l’existence de commandos de l’armée chargés avec des véhicules préparés à cet effet non seulement d’écraser des manifestants et des militants mais également de ramasser et de faire disparaître systématiquement les cadavres, pour éviter entre autres un comptage des victimes par les services de secours. Enfin, la mission a été informée par de nombreuses sources de l’existence de fosses communes où de nombreuses personnes seraient enterrées notamment dans la Préfecture de l’Ogou », épinglait le Haut-Commissariat des Nations Unies dans un rapport publié le 26 septembre 2005.

Retour sur les errements d’un Chef d’Etat en perte de crédibilité

Le désastre qui a conduit Faure Gnassingbé au pouvoir, n’a jamais été arrêté malgré son fameux « plus jamais ça » avec des larmes de crocodile à Atakpamé à l’époque. Près d’une dizaine d’enfants ont été assassinés en toute impunité durant 13 ans de règne, sans compter jeunes, vieux et femmes.

C’est donc ce Faure Gnassingbé qui, dans son interview fleuve à Jeune Afrique, joue au donneur de leçons démocratiques en ces termes : « L’opposition n’a pas de leçons de démocratie et de respect des droits de l’homme à me donner. J’ai pensé que la conquête et la préservation du pouvoir ne pouvaient pas tout autoriser, qu’il y avait des lignes rouges à ne pas franchir ».

Il n’y a pas que les adversaires politiques qui tombent des nues face à ce déni des réalités au haut sommet de l’Etat.

La société civile, en l’occurrence le mouvement citoyen Togo Debout, l’a bien remarqué. Le chef de l’Etat verse dans une totale « ignorance du profond malaise social et politique », selon les terme du mouvement.

N’eut été le mouvements populaires ces derniers temps, Faure Gnassingbé se retrouverait-il à sillonner le Togo ? Ce n’est pas dans ses habitudes. Il est un homme mordu de luxe, de vêtements chers, équipements chers, hôtels et palaces huppés comme à ses habitudes de jeunesse. Jeune Afrique le dévoilait dans une de ses publications de cette année consacrée à la Jeunesse de certains chefs d’Etats africains dont le Faure Gnassingbé qui a su couler la vie rose aux USA à la sueur du front du contribuable togolais au moment où son père Gnassingbé Eyadéma, menait la vie dure aux populations.

En analysant son interview, Togo Debout adresse cette réponse à Faure Gnassingbé : « Si la conquête du pouvoir se fait à travers les urnes, sachez que pour ce qui vous concerne, vous avez franchi la ligne rouge à maintes reprises…Nous vous prions de reconnaître que vous êtes le problème à la crise et…d’en tenir compte dans les discussions qui vont bientôt s’ouvrir, en vue d’une sortie pacifique, durable et définitive de cette crise ».

Malheureusement, quand on en arrive à ce stade de la crise, obnubulé par le pouvoir, on perd le bon sens, et on pense éperdument avoir raison. Surtout, lorsqu’on a le soutien d’un homme d’affaires de la trempe de Vincent Bolloré.

Ce Breton forme avec Faure Gnassingbé, un duo infernal d’hommes d’affaires qui savent monter les bons coups qui rapportent gros; assez gros comme 35 ans de contrat pour le port autonome de Lomé, dans la plus grande opacité. En 2014, ils ont ensemble berné les Togolais au sujet d’hypothétiques trains à bord desquels femmes, hommes et enfants pouvaient voyager.

Pour corroborer ce subterfuge, ils ont bandi de vieux trains pris on ne sait où pour en faire des inaugurations à grandes pompes à Lomé, comme ils savent toujours bien le faire. Mais des trains transportant des personnes, il n’y en aura jamais, ni à Lomé, ni nulle part au Togo. C’était pour berner les populations, se réserver un troisième mandat en 2015. Ainsi, Vincent Bolloré s’assure que ses 35 ans d’hégémonie au port autonome de Lomé, ne seraient perturbés.

A force de multiplier des fausses promesses pour son pays, Faure Gnassingbé perd le courage de regarder les médias, les députés et même son électorat en face pour leur exprimer à nouveau un quelconque engagement, d’où son légendaire intérêt aux médias étrangers où, il peut dans une certaine mesure, se cacher pour pondre des « propos en déphasage avec la réalité », selon les termes d’un leader de l’opposition.

C’est sûr, Faure Gnassingbé a trouvé un allier dans les médias étrangers.
En 2007, il déclarait sur Rfi : « Faure Gnassingbé, ce sont les réformes politiques, la méthode du dialogue et la réconciliation », c’était au lendemain de l’Accord Politique Global (APG). Quelques années plus tard, il ira débiter sur Deutsche Welle en Allemagne : «…Nous n’avons pas de limitation de mandats, mais nous avons une réforme politique qui est programmée et prévue et au cours de laquelle nous allons débattre de ces questions-là». C’était en juin 2016.

Bref, après 13 ans de règne, la principale promesse de Faure Gnassingbé n’est plus au programme. Aucun bilan ne lui est favorable. La preuve : les enseignants, les greffiers, l’administration publique, les professionnels de santé, même les gardes pénitentiaires entrent régulièrement en grève. La grogne est générale.

Pendant ce temps, obsédé par le pouvoir, il pense que c’est seulement son fauteuil présidentiel à lui qui compte et qu’il faut préserver à tout prix au point de se plaindre dans son interview dans Jeune Afrique : « Ce à quoi nous avons assisté ensuite n’était rien d’autre qu’une tentative de prise du pouvoir par la rue ».

Comment un chef d’Etat, incapable de défendre son programme d’Action gouvernemental devant une Assemblée nationale où son parti est majoritaire, peut prétendre gouverner dans la transparence au point de donner des leçons démocratique ? Au début de son règne, il déclarait : « 40 ans (Ndlr- au pouvoir), telle n’est pas mon ambition. Vous savez que l’espérance de vie en Afrique, c’est 50 ans. Et j’en ai 40 ».

Né en Juin 1966, Faure Gnassingbé a eu ses 51 ans en juin 2017. Il est toujours au pouvoir, prêt à tout pour y rester pour une période indéfinie. Ici, on ne parle pas de réformes, pas constitution : Mais de la parole donnée et jamais tenue.

A télécharger ici le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies sur les massacres de 2005 au Togo: http://www1.rfi.fr/actufr/articles/069/article_38809.asp

A. Lemou

Source : www.icilome.com