Le gouvernement togolais a publié, le jeudi 29 octobre dernier, les résultats de l’enquête Harmonisée sur les conditions de vie des ménages (Ehcvm 2018-2019). Ce rapport concomitamment menée dans les autres états membres de l’Uemoa révèlent, dans ses résultats, des chiffres, à la limite clair-obscurs et des manquements suspects. Des indices qui jettent, après analyse, du discret sur la crédibilité de cette enquête.
Ehcvm 2018-2019: la quintessence
C’est un rapport qui, dans son ensemble, permet d’actualiser, dans une approche comparative, les indicateurs sur les conditions de vie des ménages et de pauvreté dans l’espace Uemoa. De façon technique et spécifique, elle relève l’indice de pauvreté, selon les régions, de même qu’elle classifie l’occupation du territoire national, selon le genre, les tranches d’âge, et le nombre de menages.
En clair, on retient qu’au Togo, l’indice de pauvreté se situe à 45,5% au niveau national en 2019 contre 58% en 2011 et 51% en 2015. Dans une proportion plus détaillée, ce classement est dominé par la région des Savanes qui a un indice de pauvreté le plus élevé du Togo avec 65%. Elle est suivie des régions centrale et des Plateaux qui ont des incidences de pauvreté relativement moyens avec respectivement 47% et 48%.
Touchant quelques 1.812.591 ménages, les résultats de cette enquête révèlent, par ailleurs, que la population urbaine représente 41% de la population totale estimée à 7.635.896 habitants. Ceci, pendant qu’avec 52% de femmes, la population togolaise est occupée à 43% par les moins de 15 ans, et 3,4% par les plus de 64 ans.
Des interrogations…
À l’analyse de ce rapport, sautent clairement aux yeux, des manquements et zones d’ombres qui suscitent réflexions. En effet, c’est déjà un secret de polichinelle que la région des Savanes est toujours classée par tous les rapports, tant nationaux qu’internationaux comme étant la région la plus pauvre du Togo. Et sur ce point, la Ehcvm 2018-2019 n’apprend rien aux togolais, si ce n’est l’indice de pauvreté est désormais évalué à 65%. Un détail qui se veut l’élément nouveau.
Toutefois, cela paraît tout de même curieux l’omission faite des régions Maritime et Kara, non mentionnées dans le rapport. Deux régions pourtant si importantes dans la géopolitique en ce sens qu’elles comprennent Lomé et Kara, les deux grandes villes prises pour capitales du pays. Mais comme par enchantement, il prend en compte l’agglomération de Lomé, pourtant partie prenante de la Région Maritime, qui connaît l’incidence de pauvreté la plus basse, avec une proportion de 22,3%. Plus loin, ce rapport fixe l’indice de pauvreté au Togo à 45,5%. Au lieu de son intégralité, on a choisit de laisser les populations mener, elles-mêmes, ou imaginer les données des deux régions omises. Un acte qui dépouille ce rapport de toute cohérence et sincérité. Un rapport donc manchot. Et à dessein certainement.
Une supercherie mise à nu
A l’analyse, ces données statistiques paraissent largement moins vraisemblables. Ceci, au regard des réalités sociales propres aux togolais qui cohabitent avec misère et pauvreté. Un exemple illustrateur des chiffres de ce rapport qui sont en déphasage avec la réalité du terrain, c’est le seuil de pauvreté qui, après calcul, est de 273.628 FCFA par personne et par an. Autrement dit, selon ce rapport, les togolais en majorité consomment 760 FCFA par jour. Soit 1,5 dollars US par personne.
Une réalité bien encore loin des rapports internationaux qui estiment plutôt le contraire. Même à supposer que la Ehcvm a plutôt utilisé le barème de 2 dollars utilisés par certains organismes pour calculer le seuil de la pauvreté, les 750 FCFA sont encore en deçà de la moyenne qui se situe normalement autour de 1500 FCFA Le cas du classement Indice du développement humain (Idh) 2019 du Pnud qui classe le Togo à la 204ème place sur 228 au total, avec un indice de 0,503. «… c’est dire donc que le Togo est encore à la traîne pour faire goûter à ses fils, la saveur du bonheur», analysions-nous. Et cela se révèle quand le gouvernement togolais lui-même, dans son programme de filets sociaux a instauré le transfert monétaire aux ménages dont la part individuelle revient à 155 FCFA par jour, cela sous entend que la réalité est que le togolais, à la base ne trouve même pas à manger pour 150 FCFA, toute la journée. Et quand aux fonctionnaires, lorsqu’on prend le salaire moyen d’un fonctionnaire cadre A, selon la convention collective interprofessionnelle, il revient moyennement avec 130.000 FCFA. Un revenu mensuel malheureusement avalé au trois quart (3/4) rien que par l’électricité, la location, le transport. On n’y intègre même pas les dépenses liées à la santé, les charges du panier de la ménagère, en plus des aides aux parents et amis qui sont des réalités qui caractérisent la solidarité africaine. Que dire donc de la plus grande majorité qui vivent au seuil du Smig qui est de 35.000 FCFA. Voilà autant de réalités techniques qui mettent à nu la supercherie cachée derrière ce rapport Ehcvm 2018-2019.
À l’arrivée, cela est, de toute évidence, suicidaire pour le pays quand on sait que le gouvernement entend se baser sur ces différents indicateurs et données statistiques relevés dans ce document pour une bonne conduite de ses politiques nationales de développement comme le PND, la déclaration de politique générale de développement et des Objectifs de développement durable (Odd), entre autres, qui seront suivis et évalués à partir de ces indicateurs.
Tout ressemble à une vile comédie sur les réalités de la pauvreté au Togo. Simplement regrettable.
Source : Fraternité
Source : 27Avril.com