L’électrification durable de l’Afrique subsaharienne est en marche et le potentiel des énergies renouvelables, notamment de l’énergie solaire, n’est plus à prouver.
Certains facteurs décisifs ont facilité leur développement, en particulier la baisse constante du prix des panneaux solaires, divisé par huit depuis l’an 2000.
L’autre bonne nouvelle, c’est que les investisseurs actifs dans la région se multiplient, notamment grâce à la sécurisation juridique croissante de leurs investissements. Par effet d’entraînement, lorsqu’un projet voit le jour, d’autres suivent très rapidement, comme cela a été le cas au Sénégal. Suite au lancement en octobre dernier de la centrale Senergy 2, à Bokhol, un deuxième projet a vu le jour à Malicounda tandis que quatre autres doivent être inaugurés en 2017.
Chaque point de croissance perdu faute d’électricité se traduit mécaniquement par des centaines de milliers d’emplois non créés.
S’il ne fait aucun doute que sur le long terme, les énergies renouvelables représentent une solution crédible et soutenable au déficit d’électrification du continent. Les 650 millions d’Africains n’ayant toujours pas accès à l’électricité en zone rurale ou périurbaine ne peuvent se contenter du rythme de progression actuel, et les acteurs industriels encore moins.
Chaque point de croissance perdu faute d’électricité se traduit mécaniquement par des centaines de milliers d’emplois non créés, de jeunes laissés en marge, de foyers dans lesquels l’éducation des enfants est compromise.
Un engagement étatique fort est nécessaire
L’urgence est là, les technologies accessibles et les investisseurs prêts à s’engager. Il faut désormais accélérer le déploiement des capitaux pour favoriser le décollage des projets d’énergies renouvelables.
Le premier levier d’action consiste à renforcer les capacités techniques et contractuelles des parties publiques, de manière à garantir la mise en place d’une politique énergétique propre et inclusive dans les pays concernés.
Il s’agit tout d’abord de cartographier précisément les infrastructures existantes, afin de définir une stratégie énergétique de long terme, en s’assurant de la cohérence des projets développés avec les plans de renforcement des réseaux de transport et de distribution électriques. Il s’agit également de donner aux États les capacités pour négocier des accords contractuels de long terme avec des partenaires privés sélectionnés pour leur fiabilité et leur expérience.
Les financements disponibles ne peuvent bien souvent être débloqués que si l’État apporte sa garantie souveraine à un projet.
Le succès de la mise en place de tels projets repose également sur le partenariat mis en place entre les producteurs indépendants et les États. L’énergie vendue aux sociétés nationales en situation de monopole, dans un secteur fortement régulé, doit impliquer un engagement fort des États au travers de mécanismes de garantie de l’investissement permettant de limiter le risque de ces investissements.
Les financements disponibles ne peuvent bien souvent être débloqués que si l’État apporte sa garantie souveraine au projet ou bien si le projet dispose d’une garantie de risque politique sollicitée auprès des bailleurs.
Or, ces instruments sont souvent complexes à mettre en œuvre pour les États et viennent également grever leur bilan. La mobilisation de ce type d’instrument peut ainsi s’avérer impossible. Favoriser la mobilisation de garanties souveraines à travers des mécanismes abordables est essentiel pour rassurer les investisseurs sans contraindre excessivement les comptes des États.
Les subventions aux hydrocarbures faussent le jeu
Enfin, le développement des énergies renouvelables est conditionné à la compétitivité économique et financière de l’électricité produite. Or, aujourd’hui, et cela même si le solaire et l’éolien figurent parmi les technologies les plus compétitives, les subventions accordées aux hydrocarbures (kérosène, diesel) pour la production d’électricité faussent les règles du jeu économique.
Dans le cas du Nigeria, le montant des subventions accordées aux hydrocarbures était estimé à 4,5 milliards de dollars en 2013, l’équivalent de la construction de 30 centrales solaires de 100 MW. À l’échelle de l’Afrique, cette somme atteignait 50 milliards de dollars en 2011, soit 333 centrales solaires de 100 MW !
Sur ces trois leviers d’action, nous avons plus que jamais besoin de la mobilisation des États et des bailleurs de fonds internationaux pour permettre d’accélérer le développement des nouveaux projets. Œuvrons aujourd’hui, ensemble, pour un développement économique inclusif et faible en carbone.
Jeune Afrique