Elections locales : Ce qui va changer

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Elections locales : Ce qui va changer

Plus de trente ans après, le Togo va organiser le 30 juin prochain des élections locales. Contrairement aux législatives de décembre dernier boycottées par une partie de l’opposition, celles-ci verront la participation de la quasi-totalité de la classe politique, à l’exception du Parti National Panafricain (PNP) et du Parti des Togolais. A quelques semaines du scrutin, FOCUS INFOS revient sur les grandes lignes de la loi sur la décentralisation et pose les enjeux d’une consultation dont l’opinion semble attendre beaucoup.

C’est le 26 janvier 2018 que les députés ont adopté le projet de loi portant modification de la loi n° 2007-011 du 13 mars 2007 relative à la décentralisation et aux libertés locales. Elle sera promulguée cinq jours plus tard. Les principales modifications portent sur le nombre de conseillers par commune, par préfecture et par région, l’intercommunalité comme mode de coopération obligatoire entre les communes d’une même préfecture, de même que pour les communes du grand Lomé composé des préfectures d’Agoè-Nyivé et du Golfe, la composition de son organe délibérant et la présidence de son exécutif, la possibilité de création du district autonome du Grand Lomé, la nouvelle répartition des compétences entre compétences propres, compétences partagées et compétences transférées, la limitation des mandats des élus locaux à deux (02) au maximum et la prise en compte des nouvelles dispositions relatives à l’organisation financière des collectivités locales.

Développement local

Lorsqu’on interroge les citoyens sur ce à quoi ils associent les élections locales, ce qui vient régulièrement est le développement local. De fait, selon les dispositions de la loi, les collectivités territoriales ont pour mission la conception, la programmation et l’exécution des actions de développement d’intérêt local de leur ressort territorial, en particulier dans les domaines économique, social et culturel. Elle prévoit 3 types de collectivités : la commune dirigée par les élus locaux qui constituent le conseil municipal, la préfecture et la région. Pourtant, d’après une enquête de terrain menée en 2017 et dont nous avons déjà publié les résultats, les cibles manquent globalement d’informations sur la décentralisation.

Ainsi, les cibles primaires composées des citadins n’ont pas une idée claire sur la décentralisation dans sa définition et dans ses contours. Les cibles secondaires regroupant les associations, les ONG et les syndicats ont des notions vagues et superficielles des textes de la décentralisation. « Les acteurs de la décentralisation ont une faible connaissance des textes » reconnait volontairement un responsable d’une association qui travaille dans le domaine de la collecte des ordures. C’est dire que le débat sur la question est faiblement mené même dans la capitale. « La décentralisation ; il s’agit pour moi de promouvoir le développement local et de mieux responsabiliser les collectivités locales ou les diverses cellules de la communauté. Cependant, je ne sais même pas si un débat a été mené. Cela montre bien que si jamais il l’a été, cela a été fait tellement mal qu’on ne s’en rend pas compte. Les populations ne sont pas informées et par conséquent elles ne peuvent s’en approprier » ajoute un autre militant des droits de l’homme. Les cibles tertiaires composées des partis politiques, des décideurs ou des personnes situées au niveau de prise de décision n’appréhendent pas le processus de décentralisation de la même façon du fait des divergences politiques. Le pouvoir malgré les difficultés politiques, considère que le processus est lancé et est correctement mené. Pour l’opposition, « il n’y a pas d’indication claire dans la mise en œuvre de la politique de décentralisation. Même si les élections locales sont prévues, il n’est pas certain que les mesures d’accompagnement aient été prévues et que les populations aient été suffisamment sensibilisées sur la décentralisation. En plus du fait que les populations n’aient pas été suffisamment sensibilisées, il n’est pas certain que les acteurs (fonctionnaires, futurs élus notamment) connaissent assez bien les responsabilités qui les attendent. Les chefs traditionnels sont-ils sensibilisés sur les changements qui vont s’opérer ? » souligne le premier responsable d’un parti politique de l’opposition.

Transfert des compétences

Aux termes de la loi sur la décentralisation, l’Etat devrait transférer aux collectivités territoriales, dans leur ressort territorial respectif, des compétences dans les matières suivantes : développement local et aménagement du territoire, urbanisme et habitat, infrastructures, équipements, transports et voies de communication, énergie et hydraulique, assainissement , gestion des ressources naturelles et protection de l’environnement, commerce et artisanat, éducation et formation professionnelle, santé population, action sociale et protection civile, sports, loisirs, tourisme et action culturelle. Sont exclus de tout transfert, les compétences de l’Etat relevant des domaines tels que la défense et la sécurité, les affaires étrangères et les relations extérieures, la justice, la monnaie, les postes et télécommunications, les mines, à l’exception des carrières de matériaux de construction etc.

Ressources :

Les compétences transférées par l’Etat aux collectivités se feront concomitamment avec des mesures d’accompagnement en matière de ressources humaines, financières et matérielles. Celles-ci, outre la dotation budgétaire de l’Etat, disposeront d’autres ressources endogènes à travers la fiscalité locale. Elles pourraient également bénéficier de l’appui de partenaires. En somme, les communes auront plusieurs sources de financement.

De fait, l’un des défis majeurs post élections locales auxquels seront confrontées les collectivités, sera l’appropriation et la capacité des communautés de gérer avec le conseil qu’elles auront élu. Par ailleurs, après avoir boycotté les élections législatives et se retrouvant quasi absents dans les différentes institutions républicaines, l’opposition aura à cœur de sortir victorieuse du scrutin du 30 juin, en termes d’élus locaux ; ce qui serait pour elle un symbole politique fort à moins d’un an de l’élection présidentielle. Quant au pouvoir qui cherchera à maintenir ses positions et à démontrer son implantation nationale, il sera surtout attendu sur la transparence et la crédibilité du scrutin ; plus de 30 ans après le dernier et dans un contexte où une partie de l’opposition traditionnelle est absente de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) chargée d’organiser la consultation.

Source : www.icilome.com