Eglises dites réveillées au Togo : Des suppôts de la dictature

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Il est donné de constater malheureusement que les Africains, et plus particulièrement les Togolais, préfèrent passer des heures dans les églises que d’aller chercher du travail ou entreprendre quelque chose pour se mettre à l’abri du besoin. Véritable problème de société, la prolifération des églises éveillées ou de réveil est devenue aujourd’hui un phénomène qu’on rencontre un peu partout dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique. Au Togo, ces églises pullulent dans les coins de rues comme des champignons. A Lomé, il est facile de retrouver au moins cinq (05) églises dans un rayon d’un kilomètre.

Généralement ces églises, créées pour la plupart par des individus qui se font appeler pasteurs, prophètes, apôtres, docteurs ou évangélistes, sont des lieux par excellence de tapages et où la nuisance sonore règne en maître. Il n’est pas conseillé d’être voisin à ces églises. Les fidèles et leurs pasteurs sont tout le temps entre ces quatre murs pour crier, chanter, danser et pleurer à longueur de journée, devenant ainsi de véritables cauchemars pour les riverains qui n’arrivent pas à se reposer à cause du bruit qu’ils font propager dans les alentours. « Mais lorsque vous leur signifiez qu’ils font trop de bruit avec leurs micros et baffles, vous devenez l’agent de satan qui les persécute », a laissé entendre un habitant de Gbényédzi. Ce dernier indique avoir plusieurs fois interpellé le premier responsable de cette église (dont nous taisons le nom), mais peine perdue. Le problème continue de plus belle.

Le pire dans cette histoire, c’est que pour une chambre-salon transformée en lieu de culte avec à peine une centaine de personnes, on utilise des micros avec de gros baffles qui font d’énormes bruits. Et ceci, à des heures où les voisins ont besoin de repos. « Ils ont des programmes étalés sur toute la semaine ou presque. Certaines séances se font à des heures où nous avons besoin de nous reposer un peu. Par exemple, les vendredis, toute la nuit, ils font veillée. Nous sommes obligés de faire cette veillée avec eux, parce qu’on n’arrive pas à dormir. Parfois, c’est à midi qu’ils débutent leur prière. Tout ça là, il faut qu’on arrête ça », a ajouté notre interlocuteur.

Des messages choisis pour séduire les « clients »

Il faut le dire, c’est un véritable business que font ces personnes qui se font appeler pompeusement « hommes de Dieu ». Ils organisent des programmes au cours desquels les « fidèles-clients » sont amenés à cotiser tout au long de la rencontre. Séances de prière, délivrance, guérison, démonstration de prière dangereuse, heures de miracle, plein de noms sont donnés à ces rassemblements pour attirer un maximum de gens. Très rusés qu’ils sont, ces « hommes de Dieu » utilisent des discours séduisants qui ont trait au quotidien des gens qui les suivent. La maladie, la guérison, la sorcellerie, la prospérité, le voyage en Occident, les miracles sont les préoccupations de ces fidèles. Et les responsables de ces églises surfent sur ces réalités quotidiennes des populations pour arnaquer, leur promettant des prières spéciales pour « débloquer la situation ». Aujourd’hui des gens, surtout des femmes remplissent ces églises, à la recherche de maris, de prospérité dans le commerce, de solutions aux problèmes dans leur couple, etc.

Ces pseudo-pasteurs se rabattent sur certains éléments ou objets comme l’eau, l’huile, les mouchoirs, etc. qu’ils vendent chèrement aux fidèles. Ces objets « bénis par le pasteur » sont censés débloquer la situation du fidèle qui doit les emporter chez lui, faire des prières et quelques gestes incompréhensibles pour avoir les solutions à ses problèmes. Dans notre enquête, nous avons surpris dans une de ces églises située sur le boulevard Malfakassa (qui va du rond-point de Bè-Gakpoto à Adakpamé) le pasteur qui vendait des morceaux de sucre aux fidèles qui doivent les utiliser pour rendre agréable leur ménage ou couple. Et comme on pouvait l’imaginer, nombreux sont ceux qui se ruaient sur le pasteur pour se procurer ces sucres miraculeux à prix d’or. Une véritable arnaque en fait. On a été choqué de voir dans une autre, le responsable qui vendait du fil à tresser aux fidèles pour attacher satan. La scène paraissait surréaliste, mais c’est bien réel ce qui se passe là-bas.

Ces pasteurs, apôtres, prophètes et autres font et défont les couples. « Je n’aime pas revenir sur cette histoire. Dieu merci, j’ai refait ma vie avec une autre personne », a confié Charles qui s’est vu déposséder de sa femme pour un problème de sorcellerie évoqué par le responsable de l’église qu’il fréquentait. Malheureusement, notre interlocuteur n’a pas voulu nous en dire plus.

Eglises éveillées et dictature, une belle collaboration

A travers de faux miracles, ces pasteurs ont acquis une certaine notoriété auprès des populations qui se laissent berner. Ces « hommes de Dieu » ont aujourd’hui un certain pouvoir et sont craints de ces esprits faibles. C’est ce que ces pasteurs disent que les fidèles exécutent, surtout les femmes qui n’ont plus d’oreilles pour leurs maris à la maison. « Le pasteur a dit… », c’est le refrain qu’on entend à longueur de journée. Avec ce pouvoir, les pasteurs procèdent à un lavage de cerveau des fidèles. Ce qui empêche aujourd’hui les gens à se révolter contre les injustices sociales que crée la dictature cinquantenaire qui régente le Togo. On passe le temps à répéter aux Togolais dans ces églises que tout ce qui arrive émane de la volonté de Dieu. Et que le pouvoir c’est un ce dernier qui le donne, révolter contre ce pouvoir est un péché.

C’est pourquoi on voit aujourd’hui les barons de ce régime créer des églises un peu partout sur le territoire, à la recherche, dit-on, des « âmes pour Dieu ». Parce qu’ils savent que sur ce terrain, les populations sont dociles quand, au nom de Jésus-Christ, on leur donne quelques bols de riz, deux ou trois bidons d’huile, des biscuits pendant la période des fêtes de fin d’année ou quelques fournitures scolaires à la rentrée des classes. Nombreux sont ces ministres dans le gouvernement actuel qui ont ces églises qui pullulent dans les villes du Togo et qui de la manipulation de conscience. Le but, c’est d’empêcher ces populations de s soulever contre la dictature qu’ils servent et leur permettre de disposer des ressources du pays comme bon leur semble.

L’astuce est simple : au nom de ces églises, on fait semblant d’assister, d’accompagner et parfois de faire des promesses à ces populations, tout en prenant soin de montrer que les responsables de ces lieux de culte appartiennent au régime qui veut leur bien.

L’impartialité de la Police des cultes requise

Nombreuses sont ces personnes qui ont, pendant longtemps, demandé la fermeture de ces églises qui détruisent la société plutôt qu’elles ne la construisent. Même si c’est tard, la fermeture de dix (10) églises par la Police des cultes la semaine dernière annonce un début de soulagement pour les Togolais qui n’en ont que trop souffert. Mais cet organe est appelé à aller au-delà de ces actions. Il ne s’agit pas de faire deux poids deux mesures en s’attaquant seulement aux petites églises du quartier qui n’ont pas tellement d’influence. Il faut aussi être intransigeant avec ces lieux de culte créés par ces barons du régime et qui sont devenus des problèmes pour les populations dans leur quartier avec la nuisance sonore qu’elles produisent.

Il faut le reconnaître aussi que ce ne sont pas toutes les églises qui font dans l’escroquerie et du faux. Il y en a qui sont sérieuses, et leurs responsables crédibles. Mais plus de la moitié sont devenues des véritables problèmes sociaux dans ce pays. Et il faut les fermer pour permettre aux gens de respirer et envoyer ces pseudo-pasteurs chercher de l’emploi.

« Les églises qui sont fermées ne sont pas membres de notre syndicat. C’est pour voir les motifs sur lesquels la Police des cultes s’est basée pour fermer provisoirement ces lieux de culte. Ils nous ont expliqué qu’ils ne se sont pas levés du jour au lendemain pour procéder à la fermeture de ces églises. Il y a d’abord eu des plaintes des riverains suivies de plusieurs tentatives pour raisonner mais les pasteurs des églises concernées n’ont pas obtempéré », a indiqué le Secrétaire général du Syndicat des pasteurs We are one du Togo (SYNPAWAOTO), Dominique Koffi Totcha lors d’une rencontre avec les responsables de la Police des cultes. A l’en croire, les églises fermées ne disposent même pas d’une autorisation, donc sont en conflit avec la loi.

Source : www.icilome.com