Dossier Kodjo: la diplomatie de l’ombre désormais enclenchée!

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« La balle se trouve dans votre camp… Si à 6 heures le 22 février vous vous levez et à 7h vous accomplissez massivement le vote, à midi, nous serons en mesure de vous ramener la victoire », dixit Gabriel Messan Agbéyomé Kodjo pendant la campagne électorale, avant de se raviser quelques heures plus tard, indiquant plutôt que la victoire sera au journal télévisé de 20 heures au soir du scrutin.

Proclamé deuxième avec un score de 19, 65%, l’ancien premier ministre tombe finalement dans le classique propre à tous les légendaires opposants du continent, en s’autoproclamant président démocratiquement élu à l’affût de subterfuges et d’interminables conférences de presse.

Engagé depuis le 22 février dans un bras de fer de contestation électorale allant jusqu’à défier le pouvoir en place, le candidat du Mouvement Patriotique pour la Démocratie et le Développement (MPDD) et de la dynamique Monseigneur Kpodzro essuie les revers d’un excès d’euphorie en campagne électorale.

Parti sur l’argumentaire selon lequel ses confrères de l’opposition n’avaient d’aura diplomatique nécessaire, la communication du député Kodjo a surfé sur des éléments aussi sensibles que les manifestations post électorales, ridiculisant certaines grandes figures comme Jean-Pierre Fabre à l’idée que lui, du haut de son expérience d’ancien premier ministre, ancien président de l’Assemblée Nationale et même ministre de l’intérieur, serait nanti du poids diplomatique requis pour débouter le régime cinquantenaire des Gnassingbé de toute velléité de fraudes et d’irrégularités électorales.

Des étapes brûlées

Dès lors, l’homme de Tokpli et son équipe de campagne ont sauté des procédures, y compris la nécessité incontournable de mobiliser les moyens pour :

– Se parer à prouver systématiquement toute action d’intimidation de leurs représentants même dans le bureau de vote le plus reculé du Togo ;

– mobiliser les ressources pour avoir des éléments de preuve de toute irrégularité dans les bureaux de vote ;

– mobiliser les alliances électorales nécessaires avec toute figure de l’opposition ou de la société (puisque la dynamique Kpodzro était dans la logique principale de fédérer les énergies) ;

– Se préparer à l’éventualité de la coupure et du brouillage d’internet et de tout réseau de communication et de télécommunication etc.

Tout ça n’est pourtant pas de la mer à boire pour un homme d’expérience et de relations comme Agbéyomé Messan Kodjo. Mais le constat sur la réalité est lamentable, et force est de noter que tous ceux qui arborent la thèse des fraudes électorales au Togo, sont tout de même conscients que le plus grand travail à faire est d’arriver à prouver par moyens légaux et pacifiques l’existence de la fraude.

Au pire des cas, l’opposition aurait mieux fait de concentrer ses efforts de veille citoyenne et électorale des votes sur l’intérieur du pays puisque la plupart des efforts volontaires de veille sont restés concentrés sur Lomé, plus accessible et moins dangereux.

Diplomatie: le mérite d’Agbéyomé Kodjo

Promettre de veiller à la vérité des urnes aura selon plusieurs observateurs fait grimper le taux de participation à 76%, un taux qui oscillait en dessous de 60% si l’on s’en tient aux élections passées. Il faut croire que la carrure de l’Homme, son passé politique et ses soutiens de dernières heures ont probablement inspiré une bonne frange de l’électorat.

Mais gober cette thèse, pose des difficultés à expliquer le score minable de 19,65% remporté par Agbéyomé selon les institutions électorales nationales, sauf s’il faut compter avec la thèse des fraudes jusqu’alors difficiles à prouver.

Autre fait marquant, l’ancien premier ministre a réussi à infecter la santé diplomatique du parti au pouvoir. Il faut noter qu’au lendemain des soulèvements de 2017, Faure Gnassingbé ont été très bien nourris des soutiens diplomatiques de la communauté internationale en l’occurrence le groupe des 5 (USA, France, Allemagne, Union Européenne et Système de Nations Unies).

Ceux-ci se contentaient aux temps forts de la crise 2017- 2018 d’appeler “toutes les parties au calme et à la nonviolence” malgré le sang et les vies surtout des enfants perdus sur la route des manifestations.

Les appels à la justice et au respect des Droits de l’Homme furent aussi complaisants que passifs. Mais plusieurs semaines après le scrutin et la brillante victoire de Faure Gnassingbé brandie par son camp, le pouvoir est tout de même confronté à une indifférence générale du Groupe des 5 et même d’une réponse flagrante de la France: « On a pris note comme d’autres du score annoncé, qui vient d’être confirmé par la Cour constitutionnelle togolaise », avait lancé timidement la présidence française qui de renchérir : « On a obtenu dans le cadre de ce dialogue certaines avancées, certaines garanties. D’autres n’ont pas été mises en place et cela donne le résultat qu’on constate aujourd’hui ».

Pas de félicitation, ni toute autre forme de commentaire. A cela s’ajoute la sortie des USA qui souhaitaient une publication détaillée des résultats. Bien sûr, le refus catégorique de Lomé n’est pas passé inaperçu devant la première puissance du monde qui sait bien interpréter ce genre d’”affront”.

En clair, une nouvelle crise ne verra pas la communauté internationale dans sa position d’antan (depuis 2005 – 2019) et le régime de Lomé l’a très bien compris, traînant les pas et préférant menacer Agbéyomé Kodjo que de passer à son emprisonnement en vitesse de croisière comme d’habitude.

Pendant ce temps, ce dernier multiplie les provocations dans l’espoir de faire mordre l’hameçon à ses adversaires politiques.

Menaces de levée d’immunité parlementaire

Nomination d’un chef de gouvernement, adresses à la Nation, mise en place de canaux de communication au nom de la présidence… Dr Gabriel Messan Agbéyomé Kodjo multiplie les actions et surtout la communication pour revendiquer sa victoire.

Ce qui n’est pas du goût du pouvoir qui menace de lui retirer son immunité parlementaire pour le faire passer devant la justice avec en amont l’effectivité de mise en état de siège du domicile de l’ancien premier ministre où ce dernier organise toute sa stratégie avec son équipe.

Le procureur de la République n’a pas hésité à évoquer « l’atteinte à la sûreté de l’État ». Alors que ses collègues se réunissent ce lundi en session pour décider de son sort, le candidat du MPDD leur adresse un message patriotique: « Aujourd’hui, c’est mon tour. Demain, à qui le tour ? Je loue l’éternel, c’est lui le maître de l’histoire, il fera jaillir la vérité ».

Le soutien de Kpodzro et la diplomatie dans l’ombre

Pour jouer ainsi contre les nerfs du gouvernement qui souhaite tourner définitivement la page électorale et avancer sur les programmes de gouvernance, Agbéyomé Kodjo doit avoir des soutiens tapis dans l’ombre.

Et bien évidemment, on devrait pouvoir compter avec les réseaux du prélat qui aura investi lui-même le candidat dit ” du peuple “, dans une église catholique.

« Les deux récalcitrant »  pour avoir tous été acteurs clés de certains grands moments de l’histoire du Togo, ont bien l’appui de certains réseaux diplomatique qui souhaitent bien avoir la tête du régime au pouvoir.

D’ailleurs, c’est avec tant de mal que les USA cachent cette intention, pour avoir réussi à fermer le robinet de félicitations occidentales dont Faure Gnassingbé a besoin pour réitérer ses cartes de gouvernance, en dépit du corona virus 2019, qui aura également le mérite de plomber médiatiquement, la crise électorale au Togo.

Quoiqu’il en soit, Agbéyomé Kodjo semble plus endurant qu’on l’aurait cru, quitte à défier les institutions de la République. Pourrait-il arracher le pouvoir à son adversaire sans la rue comme il l’avait promis?

Déjà, le délai qu’il a donné est déjà passé, et ce n’est pas l’ANC de Jean-Pierre Fabre qui serait heureuse de voir Kodjo devenir président du Togo.

Canal D No 065

Source : Togoweb.net