Des présidents des institutions d’Etat et des ministres dans les rues :Une démonstration d’une république à la renverse

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Depuis l’annonce de la manifestation du Parti National Panafricain du 19 aout dernier, une certaine agitation s’est emparée du pouvoir en place qui dans cette atmosphère fébrile a fini par révéler aux yeux de tous sa véritable nature. Entre interdiction voilée, menaces, intimidations et répression, Tikpi Atchadam et ses militants ont gagné le pari de la mobilisation. Cette manifestation qui a eu lieu dans des circonstances particulières a eu le mérite de provoquer la sympathie et l’adhésion tacite aux méthodes du PNP, entrainant de facto une forme de mutualisation des forces démocratiques. Au sein du parti au pouvoir, la tournure qu’a prise la situation qui selon les caciques du RPT-UNIR était une gesticulation, a fini par inquiéter sérieusement les plus courageux. Ainsi naquit l’idée d’une réplique qui s’est avérée non seulement maladroite mais aussi révélatrice des non-dits qui se tramaient sur le dos du peuple togolais

Location de pseudo-militants, services publics vidés de leur personnel,…une opération qui décrédibilise le «parti-Etat»

Union pour la République, parti au pouvoir au Togo a appelé ses militants et sympathisants à une marche dite pour la paix à travers les rues de Lomé ce mardi 29 aout 2017. Parti du rond-point de Tokoin-Trésor, le cortège des manifestants a atterri à la plage de Lomé où une déclaration a été lue, suivie d’une motion de soutien, le tout agrémenté par des prestations d’artistes. Ce qu’il faut savoir de cette manifestation du parti au pouvoir, c’est d’abord les personnalités qui y ont pris part. Le Premier Ministre Selom Komi Klassou, chef du gouvernement, accompagné de son directeur cabinet Simfeitcheou Pré en tête, le Président de l’Assemblée Nationale Dama Dramani, les membres du gouvernement, des députés du parti au pouvoir, les directeurs généraux des sociétés d’Etat, les conseillers à la Présidence et tout ce que le parti de Faure Gnassingbé comporte comme éléments dans les sphères de l’appareil de l’Etat étaient présents. L’on a même aperçu un membre du Conseil Supérieur de la Magistrature, Méimounatou Ibrahima.

A ces invétérés du pouvoir Rpt-Unir s’ajoutent des fonctionnaires de l’administration publique débauchés à leurs obligations pour cette journée, des employés des sociétés étatiques et ceux des entreprises appartenant à des proches de Faure Gnassingbé. Il y a aussi des jeunes gens désœuvrés qui ont été mobilisés à travers les quartiers de Lomé et de ses environs à coups de billets de banques. On ne peut non plus passer sous silence les moyens de l’Etat qui ont été mis à contribution dans une manifestation politique : l’on a vu des autorités se mettre dans la peau de militant mais ayant fait le déplacement avec leurs véhicules de fonction qui appartiennent à l’Etat. L’on sait par habitude que le parti au pouvoir a toujours confondu ses propres moyens et ceux de l’Etat togolais dans l’exercice de ses activités politiques. Sur un autre plan, l’impact économique de cette manifestation n’est pas négligeable.

On se souvient que lors de la manifestation du PNP, parmi le catalogue de raisons évoquées par le Ministre Yark Damehame de la Sécurité et Protection Civile, figurait les perturbations qu’occasionnerait la marche du 19 août 2017 sur les activités des opérateurs économiques. Or, c’était un week-end. Mais quand il s’est agi du parti au pouvoir, l’on a curieusement assisté à un silence total en ce qui concerne les éventuelles déconvenues que pourraient subir les gens qui vivent quotidiennement de leurs activités. En dehors de l’encombrement des commerçants installés le long des artères empruntés pour la marche de mardi dernier, les bouleversements de la circulation pour tous les usagers de la route, à combien peut se chiffrer le manque à gagner pour l’Etat lorsqu’on fait référence à l’abandon des services publics au nom de la marche de l’UNIR ? Selom Klassou et son gouvernement n’ont pas pensé à ça, parce qu’il s’agissait d’eux-mêmes.

Pour quelles raisons UNIR était-elle dans les rues ?

Pour certains participants, le Togo serait en danger et c’est la raison pour laquelle il est important que cette manifestation se tienne pour réaffirmer les idéaux de paix dont le Togo a toujours été le chantre depuis des années. Mais selon les organisateurs de cette manifestation, il s’est agi pour les militants de réaffirmer leurs convictions et exprimer leur profond attachement aux valeurs républicaines, afficher leur adhésion sans équivoque aux idéaux et principes de la démocratie et de l’Etat de droit de même que leur soutien constant aux institutions qui les incarnent. D’où vient le danger et en quoi les principes de la démocratie seraient-ils menacés ?

Au Togo, la démocratique a une définition selon le bord où l’on se trouve. Pour ceux qui sont au pouvoir, toutes les méthodes qui peuvent contribuer à la pérennisation de leur règne sont placées sous le sceau de la démocratie, de la souveraineté et de l’indépendance des institutions de la République. La justice aux ordres du pouvoir, les institutions inféodées à Faure Gnassingbé, l’interprétation et l’application partielle et partisane des dispositions règlementaires… sont assimilées à des principes démocratiques. Bref, la démocratie au Togo, c’est la volonté du parti au pouvoir et de ses sbires. Il est donc aisé de conclure que le parti RPT devenu est le seul responsable de la situation qu’il semble décrier à ce jour. Le refus de mettre en application des dispositions consensuelles en est une preuve.

La paix par les réformes
C’est le moins qu’on peut dire. La situation actuelle est sans aucun doute la résultante des coups de force successifs perpétrés par le régime de Faure Gnassingbé. C’est donc tout simplement ridicule de voir un régime dans les rues sous le prétexte qu’il défend les institutions sur lesquelles il est assis, en riposte aux vœux de la majorité des citoyens. Le PNP a réclamé deux choses : le retour à la Constitution de 1992 et le vote de la diaspora. Les Togolais dans leur immense majorité ont fait comprendre à la Commission d’Awa Nana qu’ils veulent un retour à la Constitution de 1992.

En sortant dans les rues après les multiples explications bancales des Professeurs Kokoroko et Kpodar au sujet de l’impossibilité d’un retour à la Constitution de 92, UNIR est-elle en train de soutenir que la sérénité sociale serait de mise après des séries de manifestations artificielles ? La paix sociale passera par les réformes au lieu d’une démonstration d’une république à la renverse.

Kossi Ekpé

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