« La bonne opinion que j’ai de mes semblables sans exception est corrigée par cette idée qu’ils sont capables de faire les imbéciles, et longtemps, s’ils en font le stupide pari ». Dans Histoire de mes pensées, ALAIN s’insurge avec une rare véhémence contre les torpilleurs du bon sens. Ils n’accouchent que des absurdités pour obstruer les voies de la raison en exhibant parfois leur carton de parchemin et en pensant qu’il tient lieu d’une expertise des compétences.
Le Togo est un petit pays intellectuellement bien vieux pour frémir de complexe face à des coups exhibitionnistes de quelques ronflants titres des mauvais joueurs qui, à la criée, se vantent et s’exposent sans s’imposer à la lucidité multiséculaire d’un peuple qui dispose d’un fond aiguisé et impérissable de jugement pointu. Le regard introverti des Togolais leur confère une sérénité que personne ne peut renverser de ses simagrées.
Sur la crise togolaise, on peut tout déverser, même du haut de sa chair, sans émouvoir ce peuple acquis à la cause de réhabilitation de notre Constitution, marquée d’un sceau référendaire qui culmine à 97,4% de l’assentiment populaire. Cette Constitution a été éviscérée, expurgée abusivement par des représentants parcellaires et monocolores qui se sont octroyés des titres de la majorité pour servir exclusivement un individu qui, par dessus tout, n’a jamais réussi à avoir le gain d’une élection. Il lui a fallu un carnage d’un millier de Togolais pour conquérir le pouvoir en 2005 selon l’identification sur la barbarie électorale établie par la CNDH. Les enquêtes onusiennes en dénombrent environ cinq cent victimes. En 2010, la récidive de la rapine électorale se confirme par une intrusion malveillante et criminelle des forces de la répression pour confisquer la logistique de centralisation des résultats de l’opposition ainsi que les procès verbaux. En 2O15, les ambitions perfides d’un faux champion en mal de prestidigitation électorale sont crûment dénoncées par le vice-président de la CENI. Les totaux des suffrages déclarés à la faveur du gagnant ne tombent jamais.
L’héritier dynastique qui ne se prive jamais des appareils de répression pour donner corps à son triple mandat usurpé ne se préoccupe guère de l’accord Politique Global (APG) pour remettre la République à la normalité démocratique et à la possibilité d’une alternance politique.
Comment excuser un homme qui a, au premier chef, la charge de faire appliquer un accord, un contrat républicain de restauration du vivre-ensemble et qui s’en moque ? Quel est ce diplômé qui fait semblant d’ignorer les conditions objectives de réclamation de la Constitution de 1992 par la grande majorité qui flambe le pavé jusqu’aux confins de la diaspora où qu’elle se trouve depuis sept mois?
Le droit peut-il servir à jouer avec des allumettes contre tout un peuple ou pour couvrir un usurpateur mêlé dans des crimes imprescriptibles?
Mais, le grillage de la loi sert-il seul à rendre justice sans des considérations annexes comme l’histoire personnelle des individus, la psychiâtrie, la médecine, la sociologie, la psychologie… ?
Comment ignorer que l’application du droit pour rendre la justice met l’accent sur l’équité?
1) A quoi sert le droit?
Le droit sert à réguler la vie en cité et à rendre la justice. Y a-t-il un esprit de justice dans une cité où, par la force, un individu refuse de se conformer à un contrat social, un accord républicain ou utilise visiblement tous les subterfuges pour s’y soustraire?
Quand on prétend enseigner, il faut être capable de savoir poser le problème face aux exigences d’éclaircissement qui sollicitent la compétence dont on se vante. Si le droit est l’ensemble des prescriptions, des lois qui organise les rapports entre les citoyens, la rectitude sans défaillance dans l’application des lois fait la justice
La justice ne peut pas s’accomoder à la déformation de la loi ou d’un contrat abusivement détourné parce qu’un tiers des contractants dispose de la force et se permet des parjures, jurant publiquement qu’il respectera strictement les termes d’un accord sans jamais se soumettre à ses engagements. Dans quelle faculté de droit et sous quelle version de doctorat, on peut s’évertuer à défendre la prime au parjure, à la rupture abusive d’un contat?
La honte est un principe d’éducation. Pour SARTRE, celui qui est d’une bonne éducation se sent emprisonné dans le regard des autres, c’est à dire, de la société au point que l’ignoble s’érige en une muraille infranchissable dans son âme, dans son psychisme. Être dans l’insensé ou s’en faire candidat au nom d’une compétence est un scandale à l’état pur. Charles De GAULLE, dans ses Mémoires de guerre se désole de l’ignoble de la raison lorsqu’il écrit: « L’impuissance de l’intelligence fait courir à l’homme le risque de tout perdre »
Notre personnalité est dans la qualité de nos pensées, de nos actes, dans la perspicacité de nos approches, dans l’éthique dont nous faisons rigueur. Elle n’est nullement dans la récitation écervelée de ce que nous avons ingurgité ou glané comme des connaissances premières. L’autorité intellectuelle n’est jamais dans la distorsion du bon sens encore moins, dans un désert éthique.
Nous avons cru entendre de la bouche du sieur Ekoué FOLLY sur les ondes que penser qu’il s’agit de la grande majorité des Togolais qui demande le retour à la Constitution de 92 est une appréciation subjective. De quelle expertise dispose-t-il d’une quantification scientifique sur le sujet? Les statistiques Afrobaromètre ont si longtemps confirmé le taux des opinions sur le sujet. On peut, peut-être arguer que les sondages ne sont pas toujours fiables. Mais, l’opinion peut-elle se passer des statistiques et des sondages?
L’échantillonnage et le recoupement dans un pays sont parfois si clairs que même les esprits tordus n’ont aucune contrariété à élever contre les principes de base de la réalité saillante. Le mouvement populaire de rayonnement frontal contre le règne du « Timoniertricule » est fortement ascendant qu’il dépasse de loin toutes les formes de mobilisations payantes dont s’autorise le régime cinquantenaire avec des fonds obscurs. L’échec de la rivalité RPT/UNIR face au reflux contestataire du régime par les Togolais ne peut être camouflé sous une lamelle fragmentaire de l’imagination d’un pauvre farceur
Le droit à la justice est un gage de l’équilibre social. Tout le Togo ou presque est debout pour réclamer justice pour un contrat social, pour un accord républicain sans un souffle de privilège à un usurpateur imbu de faux serments. Nous avons suivi Éboué FOLLY baver de conjecture dans un paralogisme ou peut-être dans un jeu de mauvaise conscience, en soulignant que si Faure renonçait à une candidature en 2020, ce serait une concession de taille. Ce songe juridique n’est que mensonge pour plaire à une frange de la minorité pileuse de nos ressources. On ne peut pas juridiquement abuser d’un accord, s’en éloigner et y être ramené de force pour s’en prévaloir avec une disposition des privilèges. Le champion a déjà outrepassé la temporalité d’exécution des réformes et ne peut plus en jouir comme si le gain du temps conquis par le parjure devrait lui servir à la prolongation des privilèges. Aucun droit n’accorde des primes à l’effraction, à la rapine, à la transgression autoritaire et au parjure. Seul le sectarisme juridique est susceptible de serpenter dans le clair-obscur pour des fins inavouées et défendre une telle parodie.
2 Le retard multiséculaire d’un professeur
Le problème togolais, il faut le savoir, n’est pas singulièrement une crise institutionnelle, constitutionnelle qui peut trouver résolution au banquet d’une récitation du droit. Faire comme s’il suffit de demeurer dans le cloisonnement du droit pour le résoudre serait manquer de grandeur d’esprit. La question togolaise est politique. Il n y a qu’un individu qui provoque des effractions de droit pour conquérir le pouvoir d’Etat et se maintenir sur le trône usurpé.
Dans l’hypothèse du pire raisonnement, si on veut être dans les cloisons étanches du droit pour penser la crise togolaise, il n’existe nulle part dans l’application de la loi une justice qui se passerait des circonstances particulières de faits. Il y a des siècles et des siècles que la question de droit se double de l’équité. Il faut adjoindre au droit l’éthique « Aucune loi ne saurait un jour capable d’embrasser avec certitude ce qui est à la fois le meilleur et le plus juste pour tous et prescrire à tous ce qui vaut le mieux » disait déjà Platon dans Le Politique.
Les faits dans leur complexité, échappent à la récitation de la loi. La mémoire littérale d’un professeur de droit est trop courte pour interpréter tous les contours. des transgressions autoritaires d’un homme, d’un régime. Aujourd’hui, le droit ne se permet plus son interprétation étriquée, squelettique et ravinée qui n’aboutit qu’à un desséchement de la raison du droit. L’entièreté de la question togolaise ne peut donc pas être ignorée par un esprit perroquet du droit qui tombe dans la caverne des tares. Toute pensée dans une caverne se transforme vite en zéro. Le droit s’est imposé une épistémologie, une science de la critique dans ses démarches et dans ses résultats. Qu’est-ce que Faure a fait de notre Constitution, des accords scellés pour sa réhabilitation et de ses promesses d’exécuter toutes les réformes de l’APG et des recommandations de la CVJR au nom de quel principe doit on lui accorder des récompenses supplémentaires de ses viols ?
L’intelligence du droit a si longtemps évoluée dans une dialectique ascendante qu’on ne peut plus la ramener dans les ravins de la singerie. La finalité de l’intelligence du droit, c’est la justice dans sa forme la plus totalisante, la plus globalisante en prenant en compte tous les éléments constitutifs de l’effraction ou de la faute et toute l’histoire des faits. Saint Thomas, dans La Somme théologique va plus loin dans l’esprit de justice lorsqu’il affirme : « La seule manière de rester fidèle à l’esprit de justice est de transgresser la lettre de la loi ». Les données de l’équité, des circonstances particulières sont si édifiantes que le sursis s’impose ou parfois la relaxe.
On peut recevoir des connaissances, mais on ne reçoit pas l’intelligence. On la conquiert par son propre parcours, sa culture, les objectifs qu’on se donne dans sa propre vie, la capacité combinatoire dont on fait preuve pour, à chaque circonstance, s’adapter avec méthode, rigueur, éthique, morale et humanité. Aucune intelligence n’est au stade des connaissances premières. Il faut être capable de la transcender, d’aller au-delà des carcans basiques et surtout pour rendre justice. On ne fait jamais une intrusion dans une crise avec des armes de la naïveté. Restaurer la justice dans ce pays est trop important pour les Togolais, ils veulent se relever. Comme l’écrit Jean PAULHAN dans sa Réponse à Martin Chauffier : « Une nation périclite quand l’esprit de justice se retire d’elle ».
Source : www.icilome.com