Contrairement à ce que tentent de faire croire les autorités togolaises, en avançant des chiffres trouvés on ne sait où, ce sont plusieurs centaines de milliers de Togolais qui se sont retrouvés dans les rues au Togo les 4 et 5 octobre, à l’appel de la coalition des 14 partis politiques de l’opposition. Le constat est sans ambages, le peuple togolais est déterminé à en finir avec le régime cinquantenaire, autocratique et répressif RPT/UNIR.
A Lomé, la mobilisation de mercredi et jeudi a été surprenante. De Bè-Gakpoto et Atikoumé à la plage, en passant par Deckon et tous les autres points importants de la capitale, des centaines de milliers de manifestants, sous le chaud soleil, scandaient des slogans hostiles au régime Faure Gnassingbé. Sur les pancartes et banderoles, on peut lire des messages hostiles, non seulement au pouvoir, mais aussi à ses soutiens que sont le Représentant personnel du Secrétaire général des Nations Unies en Afrique de l’Ouest et au Sahel Mohamed Ibn Chambas, la chef de la délégation de l’OIF attendue à Lomé la semaine prochaine et les institutions sous-régionales comme la CEDEAO et l’UA. « Non à la démocratie de façade ! Retour à la Constitution de 1992 », « Mango, un terrorisme d’Etat… », « Faure, mon fils aussi veut devenir président, qu’en penses-tu ? », « Ibn Chambas, laisse l’affaire du Togo »… sont quelques messages brandis par les manifestants dans les rues.
Pour les responsables de la coalition de l’opposition, la mobilisation sera continuelle jusqu’à ce que Faure Gnassingbé soit décidé à satisfaire le peuple. Hier étant le jour commémoratif des événements du 5 octobre 1990, Nicodème Habia de Les Démocrates appelle les Togolais à la résistance. « J’appelle donc les Togolais à la PERSEVERANCE et à la RESISTANCE », a-t-il lancé. Pour Ouro Tchatikpi du PNP, Faure Gnassingbé doit accéder à la demande du peuple togolais ou tout simplement quitter le pouvoir.
« Je trouve la mobilisation d’aujourd’hui considérable. Cela montre que le peuple togolais est fatigué de ce régime. Je représente le PNP ici aujourd’hui. Et comme le Président national Me Atchadam le mentionne souvent, notre position n’a pas changé. C’est celle que nous avons affichée le 19 août 2017. C’est-à-dire le retour à la Constitution de 1992 dans sa version originelle avec toutes les conséquences que cela implique et puis l’effectivité du vote de la diaspora. Le chef de l’Etat doit respecter ces conditions-là. S’il n’est pas capable de le faire, il doit déguerpir », a-t-il déclaré. A l’en croire, l’opposition ne marchera pas éternellement, si Faure Gnassingbé ne persiste pas dans son silence. C’est pourquoi les manifestations de ces deux sont décisives. « Décisives parce que nous n’avons pas lancé le mouvement pour marcher éternellement. On ne va pas se donner mille mois pour marcher. C’est pour cela que ces manifestations des deux jours sont décisives. Nous allons essayer de rehausser le ton. Parce que lorsque vous criez dans l’oreille de quelqu’un qui fait le sourd, alors il faut crier davantage et plus fort », a-t-il ajouté.
S’agissant des médiations tous azimuts des institutions sous-régionales et internationales annoncées, la coalition dit ne pas être fermée aux discussions, mais les termes de ces discussions doivent être clairs. Certains sont allés jusqu’à récuser certaines personnalités qui figurent par exemple dans la délégation de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), à l’instar de Mme Aïchatou Mindaoudou Souleymane. « Nous sommes dans une coalition. Tout ce qui peut nous déstabiliser demain, on l’évitera. On n’a pas besoin que quelqu’un vienne ici nous amadouer pour nous amener dans le gouffre. Nous serons extrêmement vigilants. On ne refuse pas de discuter. On ne refuse pas le dialogue, mais on ne veut pas accepter que quelqu’un nous amène tout droit dans le mur », a indiqué Me Dodji Apévon des FDR à propos de la venue de la délégation de la Francophonie la semaine prochaine.
Pour Jean-Pierre Fabre, tous ces médiateurs annoncés par la communauté internationale ont été impolis envers le peuple togolais en 2005. Alors pas question pour l’opposition de se laisser entraîner dans leur piège cette fois-ci. « Pour Ibn Chambas, on en a assez parlé. On n’en veut pas. Pour Aïchatou, on n’en a pas encore discuté. Mais, je vous dis que personnellement, je vais la récuser. Parce qu’elle a joué un très mauvais rôle en 2005 lorsque Faure Gnassingbé avait perpétré son coup d’État. Abrité derrière le Col Tandja, elle est venue ici, et ils nous ont mal parlé. Ils ont été très impolis, très arrogants vis-à-vis de nous. Ils ont même imposé des stratégies qui nous déplaisent. Et donc aujourd’hui, je crois que nous ferons une erreur de l’accepter comme médiatrice ou je ne sais quoi. Personne, en tout cas moi, je ne cautionnerai pas, une décision qui consisterait à lui donner un quelconque rôle dans la crise actuelle », a-t-il souligné.
Mango, Bafilo et Sokodé toujours mobilisées malgré la répression
La grande mobilisation observée à Sokodé, Mango et Bafilo est appréciée par tous. Personne ne croyait plus en la détermination de ces populations, suite à la répression dont elles ont été victimes les 20 et 21 septembre derniers (et même jusqu’aujourd’hui, puisque les militaires continuent de circuler dans ces villes), avec des morts et des blessés. « Le 20 septembre dernier, je n’étais pas allé manifester. J’étais couché dans ma chambre quand les militaires sont venus casser ma porte et ont commencé par me tabasser. Aujourd’hui, je suis dans la rue, parce que ce qu’ils m’ont fait m’a plutôt galvanisé. Si je ne manifeste pas, je serai battu. Si je manifeste, je serai battu. Alors j’ai décidé de manifester », a déclaré un jeune mercredi à Bafilo. Comme à Lomé, ils sont plusieurs milliers de Togolais à descendre dans les rues pour réclamer le départ de Faure Gnassingbé.
Les manifestations d’avertissement au régime et de colère du peuple togolais les 4 et 5 octobre ont montré la détermination des populations à se libérer de la tyrannie cinquantenaire. Quand on voit des blessés des manifestations des 20 et 21 derniers encore dans les rues, on se dit que ce peuple a soif de liberté. La coalition s’apprête à lancer d’autres mouvements la semaine prochaine.
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