Agbéyomé et un autre baron du RPT en disgrâce avaient convaincu le vieux prélat, Mgr Kpodzro, pour l’enrôler dans une délicate mission dite divine qui consistait à vêtir de peau d’agneau un loup afin de le faire accepter dans la bergerie de l’opposition togolaise.
A midi et bien avant la fin du vote, Agbéyomé l’élu de Kpodzro présenté comme l’élu de Dieu était sensé apporter l’alternance à des leaders et militants qui dissent avoir presque tout essayé.
C’est ainsi que la pullule amère qui consistait à faire passer par la « Dynamique Kpodzro », le candidat Messan Agbéyomé Kodjo du MPDD comme celui de toute l’opposition togolaise, a été avalée non sans migraine. C’est ainsi que malgré eux, la quasitotalité des militants rescapés de l’ANC après le naufrage de la C14, ont tous migré ou presque vers le MPDD qui se retrouve, avec plus de 18% de l’électorat, propulsé loin devant l’ANC qui a capté à peine les 5% des votants sur le plan national.
Comment une telle situation est-elle survenue avec des acteurs que tout sépare et unit à la fois , selon les circonstances et les intérêts. Des acteurs politiques qui en définitive se connaissent de longue date avec des parcours différents, mais avec un dénominateur commun, celui de ne pas savoir se fixer des limites morales dans ce qu’ils entreprennent. Tous les trois ont en commun, la capacité et la facilité à se renier et au besoin à trahir.
Au lendemain de la présidentielle du 22 février 2020, scrutin historique dont les résultats définitifs consacreront sans doute, après l’avis de la Cour Constitutionnelle, l’écrasante victoire du Président Faure GNASSINGBE, le constat qui est constant chez les togolais dans leur diversité, est que de part son intrusion dans la vie politique togolaise, le vieil Evêque Kpodzro, ancien Président du Présidium de la Conférence nationale togolaise, a réussi avec l’aide d’Agbéyomé Kodjo, à « assassiner Fabre pour installer avec plus de légitimité le président sortant Faure GNASSINGBE» pour un quatrième mandat dont l’opposition n’en voulait pas.
Si le résultat final est décevant pour tous les militants et sympathisants désormais déboussolés qui ne savent plus à quel saint se vouer, sur le plan interne, la nouvelle figure qui tente de se lancer dans une très risquée aventure de revendication d’une victoire imaginaire, se réjouit d’avoir réussi, contre toute attente à éliminer l’opposition de souche pure pour se retrouver au second rang d’une compétition aux enjeux multiples.
Comment cette prouesse a-t-elle été possible ?
Usant d’un extraordinaire et malicieux forcing alors que les partis de l’opposition préalablement embarqués dans cette dynamique exigeaient plus de transparence dans la désignation de cette personnalité fédératrice des différentes forces et courants de l’opposition togolaise, la dynamique du vieux prélat a désigné, à la surprise générale, Agbéyomé Kodjo alors que nombreux dans l’opposition s’attendait à la désignation d’une personnalité de la société civile proche de l’opposition.
C’est ainsi que , comme un gros poils dans la soupe, l’ancien Archevêque de Lomé, qui perd temporairement et alternativement la lucidité du fait de son âge (90 ans Dieu merci) a imposé Agbéyomé comme candidat d’une opposition dont les leaders ne se reconnaissaient pas en cet ancien caciques du parti au pouvoir qui s’est retrouvé contraint de goûter aux affres de l’opposition après avoir tenté de se retourner contre l’ancien Président Eyadéma qui l’avait fabriqué de toute pièce.
Des électeurs de l’ANC obligés de migrer vers Agbéyomé
Pour réussir ce que bon nombre d’observateurs de la scène politiques togolaise, qualifie de grande escroquerie politique de cette année 2020, il fallait d’abord convaincre les quelques militants chrétiens catholiques de l’opposition et les esprits faibles que le choix d’un transfuge du pouvoir était « un plan de Dieu ». Ce que l’Archévêque s’emploiera de faire avec succès, il faut le reconnaître.
D’abord il invente la création du « Fonds KPODZRO » qui devrait être doté de 7 milliards de F CFA en vue du soutien de la campagne électorale de l’élu de Dieu. Un fonds dont la dotation en finances est entouré de la même opacité que le choix d’Agbéyomé luimême. Même après l’élection, seuls Kpodzro et Agbéyomé connaissent le montant des sommes d’argent récoltées. Après l’annonce de la création du fonds et face à certaines critiques qui ne comprennent pas pourquoi l’ancien Archevêque devenu Directeur de campagne du candidat Agbéyomé, n’a jusqu’ici pas réussi à avoir Jean Pierre Fabre, leader de l’ANC avec lui, il initie une visite surprise un weekend chez ce dernier pour lui expliquer que malgré sa popularité au sein de l’opposition, il devrait se soumettre au « Choix de Dieu » pour soutenir celui que Dieu lui révèlerai t comme candida t capable de faire l’alternance au Togo.
Le Président de l’ANC confessera plus tard que c’est à ce moment précis qu’il prend conscience qu’il ne sera pas désigner par le vieux prélat qui dans la foulée se débarrasse des réticences et réserves formulées par des leaders comme Me Apévon des FDR pour désigner l’ancien Premier Ministre d’Eyadema.
Malgré le choc l’accueil très peu chaleureux réservé à ce choix d’une personnalité assez controversée et sans véritable base électorale, le prélat persiste et signe. Il sort l’artillerie lourde en usant des attributs de l’église catholique et de l’Etat comme dans une fiction à la télé.
Ehonté, le vieil évêque organise une grande une tragicomédie parfaitement mise en scène de manière très peu catholique d’ailleurs, dans une église catholique de Lomé où, on a vu l’homme de Dieu invoquer des bénédictions sur son « candidat unique » à qui il a remis un drapeau togolais en pleine célébration. La scène de fous qui a choqué plus d’un en commençant par une bonne partie des chrétiens catholiques et le clergé laissent de marbre ses initiateurs pour qui tous les moyens sont bons pour arriver à leur fin : vider le plus important parti de l’opposition pour arriver à faire passer Agbéyomé Kodjo.
Dans la foulée des candidatures fantaisistes préalablement annoncées disent se retirer au profit de l’élu de Kpodzro. Dans le reliquat de la C 14, Dame Brigitte Adjamagbo Johnson de la CDPA et Fulbert Attiso , de Togo Autrement, ne peuvent faire autrement pour exister que de rejoindre la dynamique. Quelques mois plus tôt en juin 2019, l’Archevêque avait battu campagne pour le reste de leur Coalition qui malgré le départ de l’ANC, du PND, a pu glaner quelques élus locaux aux municipales.
L’occasion de ce scrutin, en amont, a permis de descendre Jean Pierre Fabre, à travers un audio qui a longtemps circulé sur les réseaux sociaux et dans lequel, Mme Brigitte Adjamagbo Johnson, expliquait à un activiste comment Jean Pierre Fabre (totalement et politiquement affaibli après la découverte des pots de vin et autres grosses sommes d’argent reçu du pouvoir pendant l’aventure C14), avait négocié avec le Premier ministre et le parti UNIR « quelques postes de maires pour l’ANC au détriment de la C14.
Jean Pierre Fabre: ébranlé par Atchadam et la C14, désormais exécuté par Kpodzro
L’avenir politique de Jean Pierre Fabre est plus qu’incertain. Vomi dans ses propres fiefs à Lomé et à Aného, l’homme est arrivé troisième sur des terres qui étaient les siennes il y a cinq ans, et partiellement encore acquises il y a six mois.
C’est courageusement et pour éviter la grande honte, qu’avant la CENI, l ‘ ANC à travers un communiqué signé de son vice-président Patrick Lawson annonçait le soir même du scrutin que son candidat n’était plus dans la course pour le fauteuil présidentielle au regard de l’hécatombe. La sanction est tombée. Agbéyomé a siphonné les voix de Fabre et l’ « Opération Vider l’ANC » se révèle un succès.
Le temps d’une élection, le vieux prélat a su utiliser Dieu pour mettre fin à la carrière de celui qui était pourtant bien placé pour rivaliser avec le candidat d’UNIR.
Lors de la présidentielle de 2015 il avait atteint les 35%de l’électorat, ce que Agbéyomé n’a pas atteint. C’est toute l’opposition qui s’effondre avec l’intrusion d’un vieux prélat catholique, qui a réinstallé avec plus de légitimité le Président sortant.
Regrets et grande déception chez les militants qui se disent « enfarinés ». Le miracle n’a pas eu lieu: « Il est midi et Agbéyomé ne nous a pas encore ramené le pouvoir » s’indigne l’un des caciques de l’ANC, un zémidjan qui a fait la migration le 22 février 2020 en votant Agbéyomé Kodjo .
L’argument selon lequel Fabre ne pourra jamais revendiquer sa victoire, même s’il remportait le scrutin, a fait mouche. Agbéyomé Kodjo aidé par l’ancien Archevêque a pu convaincre par des sorties médiatiques tonitruantes qu’ils avaient Dieu, l’armée et surtout le secret pour prendre le pouvoir. Agbéyomé avait convaincu les militants de l’ANC, dont la naïveté est extraordinaire, que s’ils sortaient massivement voter pour lui déjà à 6h du matin, il leur ramènera « le pouvoir à midi ». Il est midi depuis bientôt une semaine.
Et à la place du miracle, c’est la même litanie qui est servie par le Directeur de campagne, Mgr Kpodzro et le candidat malheureux lui-même : ils demandent au peuple, le leur, de sortir défendre sa victoire dans les rues. Un exercice dans lequel aucun leader n’a autant réussi que Jean Pierre Fabre. Fatigués de marcher, les militants avaient dû lui tourner le dos entre 2010 et 2013. Aujourd’hui c’est Agbéyomé qui, ravalant toutes ses promesses de campagne, appellent les anciens militants et électeurs de l’ANC à redescendre dans les rues ce vendredi 28 février 2020. De quoi attrister davantage des électeurs totalement déçus.
L’Histoire se moque des traîtres
L’élection présidentielle de 2020 est d’une grande tristesse pour trois acteurs dont la vie publique a été jalonnée de calculs erronés, d’égoïsme, d’orgueil et de traîtrise. Le premier, Mgr Kpodzro porte en lui l’échec du processus de démocratisation enclenché dans les années 90. La conférence nationale et la transition démocratique ont été un échec à cause de son incapacité à se mettre au-dessus de la mêlée en tant qu’homme de Dieu pour réussir une délicate mission.
« Est-ce que ça arrange l’opposition », la phrase fétiche de l’Archevêque pendant toute la durée de la Conférence Nationale, est assez révélatrice de l’homme de Dieu qui divise au lieu d’unir. Pendant la transition il n’a pas n’ont plus réussir à fédérer une opposition qui avait les manettes du pouvoir et qui a préférer se livrer une guerre fratricide. Trente ans après Mgr Kpodzro trébuche et tombe au même endroit. Une fois encore il divise une opposition qui se nourrit elle-même de la division.
C’est l’histoire qui se moque de ceux qui ont trahit le Togo, dans les différents camps, qu’ils soient issus du pouvoir ou qu’ils soient de la lutte depuis des décennies. Jean Pierre Fabre devra demander pardon à Gilchrist Olympio qui lui a demandé il y a dix ans de renvoyer l’ascenseur à Me Agboyibo à l’élection de 2010.
Aidé par un autre traître à paris, ils ont créé le FRAC pour revenir et repartir en rangs dispersés. La suite les togolais ne la connaissent bien. Et l’intrusion du revanchard Kpodzro, malgré les dénonciations de la Conférence des Evêques du Togo, n’a pas évité la chute libre. L’histoire se répète toujours en faveur de ceux qui craignent Dieu.
Et la chute du prélat, la défaite de son candidat et la mort politique de celui qui avait la carrure pour espérer une arrivée de l’opposition au pouvoir, sont autant de mauvais signes que les militants doivent savoir appréhender pour ne plus être pris pour des moutons de panurge.
Togo Réveil No 369
Source : Togoweb.net