Quand on voit le niveau auquel le système RPT a mis la barre de la violence, on ne peut pas ne pas engager très très rapidement la réflexion stratégique et la planification stratégique appuyée de manière ferme par une organisation entièrement repensée de la contestation populaire, si on ne l’a pas fait jusqu’ici.
Aucun observateur sérieux n’est surpris de la réaction et des manoeuvres du système RPT. Aussi, serait-il une erreur stratégique majeure que de considérer le congrès du RPT tenu à Tsévié le week-end dernier et les décisions qu’il a annoncé comme quelque chose d’insignifiant voire de ridicule. Le RPT déroule son plan clairement et ceci dans une logique du fait accompli dans un cadre soi-disant légal qu’il entend opposer au mouvement populaire le moment venu. Ce n’est pas anodin. Il faut contrecarrer tout ceci très rapidement et nous avons les moyens adéquats pour ce faire. Il faut être capable d’identifier ces moyens et les mobiliser convenablement.
A cet effet, la stratégie du mouvement populaire en cours dans le territoire africain du Togo doit être redéfinie à partir de l’idée que la colonne vertébrale de la tyrannie bâtie au Togo depuis 1963 et soutenue directement de l’extérieur par un certain nombre de pays occidentaux et dits émergents est constituée du commandement militaro-policier et de quelques richissimes hommes dit d’affaires. Ces hommes dits d’affaires, véritables mafieux locaux franc-maçons relaient des capitalistes étrangers pour qui ils sont des garçons de courses sur le plan local. Le principal terrain de jeu de ce trio – Commandement militaro-policier + Richissimes hommes dits d’affaires franc-maçons + Capitalistes étrangers – (CRC) est le port autonome de Lomé, le seul port en eau profonde de la côte ouest-africaine, véritable nid des trafics les plus insoupçonnables en direction de l’ensemble de la région. Si les stratèges du mouvement populaire ne définissent pas un plan de travail méthodique vis-à-vis de ce trio magique, alors ils n’ont pas encore commencé leur travail. Car, c’est autour de cette réalité que doit se faire le travail de renforcement des capacités insurrectionnelles de notre peuple.
Face à la tyrannie héréditaire des Gnassingbé soutenue de l’intérieur par une mafia locale et de l’extérieur par une pègre internationale affairiste, il n’y a de place ni au doute ni à la tiédeur. Fermeté, Mobilisation et surtout Organisation sous un leadership visionnaire capable de concevoir, au-delà de l’invention des slogans galvaniseurs et des adjectifs qualificatifs du régime, une planification stratégique de la marche populaire vers la libération du pays: voilà les maîtres mots de la période. Le peuple africain du Togo est face à son destin. Il doit assumer son devoir patriotique et organiser la Révolution avec deux objectifs en tête: 1) démolir la tyrannie héréditaire qui a pris le pays en otage depuis longtemps; 2) reconstruire le pays sur de nouvelles bases.
Il nous faut une nouvelle Constituante pour doter le pays libéré d’une nouvelle constitution qui ne soit plus le copier-coller de la Constitution française, mais une Constitution qui traduit véritablement notre histoire, notre culture, nos valeurs, nos aspirations, une nouvelle organisation de l’État nouveau en tant que peuple africain.
La mise en place d’une Constituante intelligente et foncièrement patriote évitera aux africains du Togo de faire comme tant d’autres peuples déçus des lendemains de leur soulèvement populaire ayant abouti à renverser l’autorité présidentielle qui incarne le système sans que celui-ci soit touché dans son fondement. Ces peuples déçus ont voulu emprunter une voie facile et écourter les sacrifices que demande le parcours douloureux menant de la domination coloniale à la renaissance. L’un des derniers peuples vivant des lendemains qui chantent d’une insurrection populaire c’est le peuple africain du Burkina Faso. Celui-ci n’a pas su, malgré l’héritage révolutionnaire de Sankara, rejeter les pressions qui lui venaient de partout afin que des élections sans un changement réel adviennent tout de suite après la fuite du clan Compaoré. Oubliant qu’on ne bâtit pas le changement sur du pourri ou du frelaté, nos compatriotes du Burkina Faso ont fait des élections et se sont retrouvés dans une alternance dans la continuité du système qu’ils ont cru avoir déraciné.
En attendant cela, il nous faut nous rendre à l’évidence que si, au-delà des manifestations publiques aussi bien dans « la diaspora » qu’à l’intérieur du pays , nous ne travaillons pas très rapidement, de manière structurée sur les questions d’organisation et de stratégie sur le moyen et long termes, alors notre oeuvre court le risque de rester superficielle et nous risquons très fortement de ne pas atteindre le double objectif visé par le peuple africain du Togo et cité ci-dessus: 1) renverser le système dynastique de type colonial ancré au Togo depuis 54 ans maintenant; 2) Engager la reconstruction du Togo sur le roc des valeurs africaines revissées dans un cadre africain reconquis par les africains et mis au service des africains.
Partout, il faut qu’émerge, au-delà des manifestations de rues, un leadership capable de se servir de l’enthousiasme de la mobilisation actuelle pour structurer localement les togolaises et togolais, les organiser, les former et les orienter durablement vers l’action libératrice sur le temps long.
Komla Kpogli,
Secrétaire général du MOLTRA
04 novembre 2017
27Avril.com