Dapaong : la tapisserie, la chasse gardée des femmes

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Aucun métier n’est de nos jours réservé aux hommes. Les femmes ont investi plusieurs domaines d’activités et cela n’est pas un fait nouveau. A Dapaong (grand nord du Togo) un fait pique la curiosité. La plupart des filles qui veulent apprendre un métier s’aventurent toujours dans le domaine de la tapisserie. Qu’est ce qui explique ce gout inavoué pour la tapisserie? Interrogées, apprenties et patronnes tapissières ont donné les raisons du choix de ce métier qui les passionne tant.

Sur 5 ateliers visités, les filles occupent 80% voire plus de l’effectif des apprentis. Nous débarquons dans un atelier de tapisserie purement féministe. Une patronne à la tête d’une dizaine de filles concentrées à couper des morceaux de tissus pour couvrir les mousses d’un prochain fauteuil qui sortira de leurs ingénieuses mains.

« J’ai décidé de me lancer en apprentissage après l’abandon des classes. J’ai choisi la tapisserie parce que je voulais faire un truc différent que ce que toutes les filles font », explique Adéle, l’une des apprenties. Après le contrat, elles passent trois ou quatre ans (c’est selon l’âge de l’apprentie nous explique-t-on) d’application qu’elles deviennent patronnes avant.

Hélène, la trentaine, patronne tapissière nous accueille dans son atelier qu’elle a ouvert il y a 7 ans. Pourquoi en tant que femme n’a-t-elle pas choisie la couture ou la coiffure? Des métiers réservés pratiquement à la gent féminine?

« La tapisserie est un métier comme tout autre. On l’a souvent dit, la tapisserie est un métier d’homme puisqu’il nécessite la force physique, mais à un moment les femmes s’y sont lancées. Toutes les femmes la plupart du temps n’apprennent que la couture ou la coiffure. Un métier qui abonde ce qui fait qu’il est difficile d’avoir des clients si on s’y aventure. Nous avons remarqué que la tapisserie que ce soient filles ou garçon peut l’apprendre, et elle rapporte mieux que la couture et la coiffure où les bénéfices sont saisonniers », soutient Hélène.

Le travail en lui-même consiste d’abord à faire un cadre, le couvrir de mousses avant de passer à la couture du tissu. « Juste, il suffit de collaborer avec un menuisier qui fait le cadre et je fais tapisserie dessus. Parfois, nous le faisons nous-mêmes. Si bien sûr, on a des notions de menuiserie. Certains apprennent la menuiserie avant la tapisserie, alors ils sont indépendants », indique Djikpel, patron tapissier au quartier Nassablé (Dapaong).

Être femme et exercer ce métier n’est pas sans conséquence. Parfois c’est l’idée que se fait les uns et les autres sur ces femmes avant de leur confier un travail qui est sujette à discussion.

« Jusqu’alors, certains ne croient pas en moi. Pour me confier un travail, je sens qu’ils ont une réticence. Vous venez de poser la question si je suis la patronne? C’est la question qui revient à chaque fois. D’autres disent même que ces bourrés exposés ne sont pas fabriqués ici mais ailleurs », lance-t-elle en indiquant un grand salon qu’elle a exposé de l’autre côté de la route.

La seule difficulté demeure les moyens pour s’installer.

Comment s’y prendre pour ouvrir son propre atelier et devenir patron, c’est la seule équation plus ou moins difficile à résoudre. « Après mon apprentissage j’ai passé au moins deux ans à trouver les moyens par un petit commerce pour me lancer », confie Hélène la patronne.

Elles sont nombreuses à débuter mais le bout du tunnel étant loin certaines trouvent le métier difficile et abandonnent. Dans le lot également plusieurs persévèrent. Qu’est ce qui vous fait croire que vous achèverez l’apprentissage? « J’ai un modèle devant moi qui me forme, ma patronne », répond Clarisse. Ainsi elles gagnent pleinement leurs vies.

M E

Source : www.lomechrono.com