Curieuse course contre la montre de Faure

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Curieuse course contre la montre de Faure

Entre deux avions, Faure Gnassingbé n’a de cesse multiplié des voyages auprès de ses collègues de la sousrégion. Guinée Conakry, Mali et Sénégal, voilà entre autres pays successivement visités par le Chef de l’Etat togolais. Ceci, à une période sensible dans l’histoire politique de son pays. D’où la curiosité autour de ce périple entamé par le prince de Lomé.

Qu’est-ce qui fait courir tant Faure Gnassingbé ? Se demandent nombre d’observateurs de l’actualité sociopolitique togolaise. Depuis la semaine dernière, le Chef de l’Etat enchaîne les voyages. «diplomatiques» dans certaines capitales de la sous-région. Il s’est donc rendu successivement à Conakry où il s’est entretenu avec son homologue guinéen Alpha Condé, par ailleurs Président en exercice de l’Union Africaine (UA).

Ensuite, Faure Gnassingbé a posé ses valises à Dakar, après un détour à Bamako. Mais avant, Faure a reçu mercredi à Lomé, le Président béninois Patrice Talon. Mais hormis ses allocutions de Bamako et de Niamey, dans le cadre du forum des Premières Dames de la Cedeao, aucune information n’a filtré des déplacements du Chef de l’Etat togolais aussi bien à Conakry qu’à Dakar. Faure Gnassingbé s’est mue, depuis le début de cette crise, qui a commencé il y a deux mois, dans un silence méprisant.

Mais une analyse diagonale des dernières évolutions de la situation sociopolitique au Togo pourrait amener, sans grand risque de se tromper, à déduire que Faure Gnassingbé est à la recherche d’un éventuel «sauveur». Certes bien raisonnable pour chaque humain en situation inconfortable, cette course contre la montre du Numéro 1 Togolais apparaît néanmoins comme les conséquences directes et implacables découlant du refus systématique du pouvoir de Lomé à s’ouvrir à l’alternance. En effet, bien que jeune, Faure Gnassingbé, après douze ans d’exercice du pouvoir, se retrouve aujourd’hui être le Doyen des chefs d’Etat de la sous-région ouest africaine. Durant ces douze dernières années, le f ils à Gnassingbé Eyadema a vu s’opérer, autour de lui, l’alternance dans les 14 États qui composent l’espace communautaire. Même la Gambie de Yahya Jammeh n’a pu résister au vent de la démocratie. Mais au Togo, sous prétexte d’avoir hérité d’un système perfectible, le pouvoir de Lomé ne s’est guère gêné de rétablir, soi-même, la situation.

Au contraire, depuis 2006, au travers de la signature de l’Accord Politique Global (APG), ce n’est que du dilatoire. Les recommandations de la Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR) ont toujours du mal à être mises en œuvre. Les différents accords signés entre les acteurs politiques sont presque restés lettre morte. Les réformes politiques tant souhaitées par plus de 98% des togolais, quant à elles, restent toujours un mirage. Fatigué de la roublardise politique du pouvoir de Lomé, le peuple togolais longtemps tourné en bourrique, a semblé résigner.

L’on en était là quand il s’est du coup levé de sa longue léthargie pour contraindre le pouvoir en place à s’exécuter. Nouvelle orientation politique qu’incarne depuis le 19 août dernier, le Parti National Panafricain (Pnp) de Tikpi Atchadam. Et depuis lors, tout semble donner l’impression que la peur a changé de camp au Togo. Après trois séries de marches pacifiques de protestation de l’opposition togolaise en faveur du retour à la Constitution de 1992 et le droit de vote de la diaspora, les lignes ont considérablement bougé.

En réponse, des croisades médiatiques du pouvoir qui, à l’arrivée, suscitent plus de polémiques qu’elles n’apportent de l’apaisement. Et entre marches pour la «préservation de la paix» et «peur bleue», le pouvoir de Lomé se lance dans un hypothétique processus de
référendum aux issues incertaines pour le Togo. Et fidèle à la tradition, la Coalition des 14 partis politiques, après les marches de «dernier avertissement» et de «la colère» les 4 et 5 octobre derniers, en appelle, ce mercredi et demain jeudi, à la «marche de la résistance» contre la forfaiture.

« La Coalition des 14 partis dénonce le caractère illégal de cette décision. Quand l’Etat se met lui-même à violer les lois, les citoyens ont le devoir sacré de résister », lit-on dans le communiqué, en réponse à la tentative d’interdiction de la marche par les ministres de l’Administration Territoriale et des Collectivités Locales et de Sécurité et de la Protection civile.

Aujourd’hui, c’est moins honorant pour Faure Gnassingbé, pourtant Doyen des Chefs d’Etat de la Cedeao et Président en exercice de l’espace communautaire, de courir, tel un naufragé, de capitale en capitale à la recherche de la solution magique, qu’il a pourtant à la portée de ses mains. Il est aujourd’hui clair que dénouer la crise ne saurait être l’œuvre d’une baguette magique, mais plutôt d’une volonté politique. L’heure est indubitablement aux réformes. Il faut donc y aller sans calculs politiciens qui ont toujours fait du mal au Togo et à ses populations.

Cyril le PESSEWU

www.icilome.com