C’est une réalité glaçante, au-delà de l’entendement humain, le traitement que subit l’ethnie Tem par les temps qui courent. Ces compatriotes du centre du pays sont partout traqués sur le territoire nationale. Le terme épuration ethnique n’est pas excessif. Une traque organisée, physique et psychologique, qui cache mal les mains de la hiérarchie militaire. Leur seul tort, lorsqu’on interroge, c’est d’être des Kotokoli. On les accuse à tort et à travers, tantôt de djihadisme, tantôt de parti enclin à l’insurrection. Les funestes inventions ne sont-elles pas la marque de toute dictature. Le quotidien de ces Kotokoli, à Tchaoudjo et dans l’Assoli, mais aussi dans les quartiers de forte concentration Tem (Zongo), dans nos préfectures, c’est un véritable calvaire fait d’enlèvements nocturnes, d’éprouvantes course-poursuite et d’horribles scènes de bastonnades. Les témoignages font froid dans le dos. Demain, l’on apprendra, stupéfait, que les mêmes victimes Tem, ont voté leur bourreau, avec un score brejnevien, pour son quatrième mandat. Ténébreux!
Nul n’a besoin d’être un Tchagbelé, un Boukari, un Ouro ou un Djobo pour avoir le cœur brisé face aux exactions que vivent les Kotokoli. Faure Gnassingbé et son armée, peuvent-ils au moins prendre la peine d’expliquer aux Togolais les raisons réelles qui motivent ces intrusions intempestives des FAT dans des localités ciblées, celles où résident les Tem? Certains Kotokoli sont obligés d’aller, les soirs, dormir en brousse, de peur d’être cueillis chez eux, dans leur sommeil, par des éléments de notre armée nationale. Des exilés politiques à l’intérieur des frontières de leur propre pays. La plupart sont des jeunes. On impute ainsi à toute une ethnie de militer au PNP ou d’avoir des liens de parenté avec son leader Tikpi Atchadam. Et, pire, d’avoir des penchants djihadistes. Depuis quand les musulmans togolais ont commencé à se radicaliser pour que, subitement, l’on découvre qu’ils constituent de potentiels menaces terroristes pour le pays?
Les Togolais sont assez intelligents pour ne pas pouvoir mesurer l’énormité de la fumisterie; personne ne gobe ces alibis farfelus qui correspondent plutôt au mode opératoire, à l’approche de chaque élection présidentielle, d’une dictature totalitaire surannée et exclusive. Déjà appauvris, sevrés du minimum vital dans leur région qui manque de tout et démunis de tout espoir d’un avenir meilleur, ces pauvres compatriotes sont en plus condamnés à fuir leurs domiciles; au total des innocents forcés de porter cette croix maléfique de l’extrémisme religieux et, dans la vallée de la mort, de se nourrir de racines sauvages et d’herbes crues, livrés à la merci de reptiles venimeux et d’insectes affreux. Leur condition est bien celle de citoyens envahis, pris en chasse, bannis, humiliés, celle d’êtres humains réduits à l’espèce animale sous prétexte d’un jihadisme imaginaire crée de toute pièce par un régime viscéralement tortionnaire qui continue de souiller allégrement notre sol. Cette situation inexplicable fait de ces jeunes Tem des vivants sans ressort accuses à tort, juste parce qu’on veut donner une crédibilité à la terreur qui a toujours constitue l’ADN de la monstrueuse politique de répression du régime.
Devant ces humiliantes guérillas orchestrées contre les Tem, que disent les cadres et élites de cette ethnie injustement frappée par une répression barbare? Omerta total, absolu ! « C’est leur problème » doivent-ils se dire ces elites Tem car, pour elles, « tant que mon pain est sauf, le reste est sans importance ». Difficiles à comprendre. Et même celui qui prétend être, selon son propre serment, le président de tous les Togolais, détourne le regard, n’ayant ses yeux que pour les arnaques à mettre en place dans le but de conserver le pouvoir. Notre président se mure dans un silence brut et violent, incapable de baser sa gouvernance sur le peuple, sur l’intérêt générale et sur des valeurs qui excluent la violente gratuite. Il nous dira, le 22 février, qu’il a remporté haut les mains la victoire à Sokodé, Kparatao, Bafilo et Kpalimé Zongo … Sans états d’âme et toute honte bue.
Seulement, lorsque de folles allégations circulent, en boucle, dans nos villes et campagnes, faisant état de ce que « ce sont les militaires kabyè qui violentent les Tem, les tabassent et violent leurs domiciles », ces allégations sont assez graves pour faire l’objet d’une gestion diligente ou susciter une prompte réaction du chef de l’État en vue d’un arrêt immédiat des exactions et des interprétations qu’elles charrient. L’inaction du chef suprême des armées le culpabilise. Soit il est de connivence avec les militaires qui terrorisent ces populations ou alors, il ne contrôle rien. Ces faits sont trop graves pour ne pas attirer l’attention. Le silence ne peut être du tout une option. Se contenter de dire que les descentes en pays Tem en question sont juste des patrouilles de routine donc, régulières, cela relève d’une ridicule campagne. Quel type de leader est celui-ci qui reste muet devant les situations qui mettent en danger la cohésion nationale?
Ailleurs, les mandats servent à quelque chose, à construire les ouvrages du futur. C’est différent au Togo, un pays gouverné dans le passé à coup de stupides promesses, de chimères: l’Hôpital de Référence Saint Pérégrin de Lomé, la ferme avicole moderne de Badja et toutes les premières pierres posées en fanfare, toujours sous terre, l’apprendront à leurs dépens. Au Gnassingbeland natal, la politique sociale marque le pas quand la violence politique prospère. Mais, parce que Faure Gnassingbé est venu au monde pour n’être que président, certains de ses concitoyens peuvent dormir à la belle étoile, même pas dans leur maison, en brousse, avec rats, varans et chauve-souris, exposés à tous les aléas de la nature qui dépouillent l’homme de tous les plaisirs de la vie. Quelle indignité! On n’en sortira jamais? Toutes ces années de gouvernance à la baïonnette, de révoltes mitraillées, de crises endeuillées, de descente en enfer, d’enfants assassinés, de commerces incendies, de mosquées vandalisées, brûlées, pour se retrouver, en 2020, face a quoi? A une forfaiture électorale comme celle dans laquelle sont engagés malfrats et neuneus?
La démocratie togolaise dégage une odeur de rance et le pays, pour détourner le danger qui rode, a besoin d’un commandant-en-chef qui sait/peut discipliner l’armée et engager son autorité personnelle sur les questions sensibles de la nation. A juger les choses par ce qu’on voit et entend, le Togo a, à sa tête, une autorité vendue au diable, périmée et éminemment incompétente, qui laisse son peuple cerné par des monstres habilles qui crachent des flammes et emportent des vies. Le Togo, on veut y croire, renaîtra de ses cendres. Tel le Phoenix. Quand et de quelle manière? Mystère et boule de shit. On sait, par contre, que le contrat social est un échec retentissant. A ce qu’il parait, être dans l’attente de ce jour où les Togolais pourront enfin vivre libres, c’est autant faire le pied de grue devant un cendrier ou une urne mortuaire. « Pleure, ô pays bien aime ». Quel gâchis!
Kodjo Epou
Washington DC
USA
Source : 27Avril.com