Le gouvernement canadien versera jusqu’à 110 millions de dollars canadiens, ou 85 millions de dollars, pour indemniser les victimes de la soi-disant «purge homosexuelle», des décennies de discrimination autorisée par le gouvernement contre les Canadiens homosexuels.
L’annonce mardi dernier a fait suite à un discours prononcé à la Chambre des communes à Ottawa par le premier ministre Justin Trudeau, qui a présenté ses excuses aux victimes. Le programme gouvernemental, qui a duré plus de 30 ans et qui n’a pris fin que dans les années 1990, a fait perdre des milliers de personnes à leurs emplois et fait parfois l’objet de poursuites en raison de leur orientation sexuelle. La politique a touché les Canadiens dans l’armée, la fonction publique et la Gendarmerie royale du Canada.
Le gouvernement a également présenté une loi visant à supprimer les «condamnations injustes» des dossiers judiciaires des personnes accusées en vertu de lois criminalisant l’homosexualité.
Dans un discours aux victimes et à leurs partisans qui s’étaient rassemblés à la tribune de la Chambre des communes, M. Trudeau s’est excusé du «rôle du Canada dans l’oppression systémique, la criminalisation et la violence» contre les minorités sexuelles.
« C’est avec honte et tristesse et un profond regret pour les choses que nous avons faites que je me tiens ici aujourd’hui et que je dis: nous avions tort », a-t-il dit.
Il a ajouté: « J’espère qu’en parlant de ces injustices, en jurant de ne jamais les répéter, et en agissant pour réparer ces torts, nous pouvons commencer à guérir. »
Dans les années 1950, une unité spéciale des Mounties a lancé une vaste campagne visant à éliminer les membres gays et lesbiennes de l’armée et d’autres institutions gouvernementales qui étaient considérées comme vulnérables au chantage par l’Union soviétique. Il n’y a aucun cas connu d’employés publics gais transmettant des informations à une puissance étrangère.
Pour identifier les cibles, les autorités ont mené une surveillance, fait des menaces et même développé une soi-disant «machine à fruits» construite pour détecter l’homosexualité. À un moment donné, 9 000 personnes faisaient l’objet d’une enquête par l’unité, selon certaines estimations.
Bien que le Canada ait partiellement dépénalisé les actes homosexuels en 1969, le programme a duré jusqu’en 1992, ruinant des dizaines de milliers de vies, les homosexuels subissant la honte et les punitions allant de la perte de l’habilitation de sécurité à l’incarcération pour «grossière indécence».
Dans certains cas, les avocats des plaignants ont dit que certaines femmes homosexuelles avaient été violées par des hommes qui leur avaient dit que cela corrigerait leur orientation sexuelle.
Certaines des victimes se seraient suicidées après la destruction de leur carrière.
Les excuses de M. Trudeau et le règlement historique de son gouvernement, que les défenseurs des droits des homosexuels considèrent comme sans précédent partout dans le monde, constituent les dernières étapes d’un examen amorcé l’an dernier par son gouvernement libéral pour contrer les effets dévastateurs du programme discriminatoire.
«C’est une chose dont nous pouvons être extrêmement fiers au Canada», a déclaré R. Douglas Elliott, l’avocat principal des plaignants dans le procès. « A une époque où l’Amérique recule et tente de réintroduire la discrimination, nous allons de l’avant et faisons face à cette injustice historique, en accordant des réparations aux victimes et en nous engageant inébranlablement à ce que cette discrimination ne se répète jamais ».
Le règlement, qui s’élève à 145 millions de dollars canadiens, permettra aux victimes survivantes qui ont subi des représailles de la part du gouvernement entre 1962 et 1996 de réclamer une indemnisation, a déclaré M. Elliott. Ils seront également admissibles à une compensation financière allant jusqu’à 150 000 dollars canadiens pour ceux qui ont subi de graves dommages psychologiques et physiques.
Parce que de nombreuses victimes sont décédées, 15 millions de dollars canadiens ont été alloués pour un ensemble de mesures de réconciliation et de commémoration en leur honneur. Ceux-ci incluront la construction d’un monument national à Ottawa et des programmes éducatifs sur l’histoire de la discrimination envers les personnes gaies et transgenres.
Simon Thwaites, 55 ans, a perdu sa maison et ses moyens de subsistance après avoir été expulsé de l’armée canadienne en 1989 parce qu’il était gay. Il a dit que son enthousiasme pour le règlement a été tempéré par le traumatisme qu’il a enduré pendant des décennies.
«C’est un grand pas, mais vous ne pouvez pas enlever les blessures et les dommages en une journée», a déclaré M. Thwaites.
Source : www.cameroonweb.com