ASVITTO : lettre ouverte au PR relative à un arrêté ministériel illéga

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ASVITTO : lettre ouverte au PR relative à un arrêté ministériel illéga

Lomé, le 20 août 2019
REF : ASVT-LI 08/001/19
LETTRE OUVERTE DE L’ASVITTO AU CHEF DE L’ETAT

LE PRESIDENT
A
Son Excellence,
Monsieur Faure GNASSINGBE,
Président de la République Togolaise.
Lomé-Togo

Objet : interpellation sur l’illégalité de l’arrêté ministériel N°0011/SEDH portant création d’une plateforme multi acteurs de concertation et de collaboration, entre l’Etat, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), et les Organisation de la société civile (OSC).

Excellence Monsieur le Président de la République,
En découvrant avec regret une anomalie juridique du fait d’une institution gouvernementale, l’Association des Victimes de Tortures au Togo (ASVITTO) vient par la présente la porter à votre connaissance. Il s’agit de l’arrêté ministériel N°0011/SEDH portant création d’une plateforme multi acteurs de concertation et de collaboration, entre l’Etat, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), et les Organisations de la société civile (OSC), signé le 25 octobre 2018 par le Secrétariat d’Etat auprès du ministre de la justice et des relations avec les institutions de la république, chargé des droits de l’homme. Cet Arrêté viole substantiellement le fondement juridique de la CNDH consacré par la Loi Organique N°2018-006 Relative à la Composition, à l’Organisation et au Fonctionnement de la Commission Nationale des Droits de l’Homme, promulguée le 20 juin 2018. D’autre part, cet arrêté est une forme subtile de restriction des libertés d’association et d’opinion, car il censure habilement les organisations et personnalités de la société civile qui dérangent.

Sur les violations de l’indépendance de la CNDH, l’arrêté ministériel laisse transparaître sans ambigüité les observations suivantes :
La CNDH n’a d’autorité que la Constitution du 14 octobre 1992 qui lui garantit son indépendance conformément à l’article premier de la Loi Organique.

Au terme de l’article 2 de ladite Loi, aucun membre du gouvernement, fût-il du secrétariat au droit de l’homme ne doit s’immiscer dans l’exercice des fonctions de la Commission.
De plus, cet arrêté ministériel est une obstruction à l’article 2.b qui oblige tous les organes de l’Etat à accorder à la CNDH l’assistance dont elle a besoin. Or, les institutions comme la Présidence de la république et le ministère de la défense nationale et des anciens combattants dont dépendent l’Agence Nationale de Renseignement (ANR), les militaires et officiers supérieurs mis en cause dans le rapport de la CNDH sur les évènements d’avril 2009, ne figurent pas parmi les ministères et institutions dudit cadre de concertation.
Sur la restriction des libertés fondamentales, cet arrêté ministériel n’est pas conforme à l’essence des droits de l’homme comme un contre-pouvoir caractérisé par des principes d’impartialité que doit avoir la société civile vis-à-vis du gouvernement. Autrement dit, cet arrêté ministériel est foncièrement un artifice politique visant à avoir une emprise subtile par des méthodes de corruption sur des OSC aux fins d’intentions inavouées.

Par ailleurs il viole la loi de 1901 qui ne fait pas de discrimination dans la considération des organisations légalement constituées d’une part, et viole également la liberté d’opinion consacrée par la déclaration universelle sur les défenseurs des droits de l’homme.
Fort de ce constat, le contexte et l’esprit de cet arrêté suscitent l’indignation des personnalités qui ont de la considération pour les valeurs sociétales universellement reconnues.

Au demeurant, s’il y a besoin d’un cadre de concertation nationale et de collaboration, il n’appartient pas au gouvernement de copter les organisations qui l’intéressent mais il revient de droit à la société civile de désigner les structures qui peuvent valablement et légitimement la représenter à l’échelle nationale ou internationale.
Cette discrimination est également une méthode sournoise contre les organisations crédibles qui refusent toute compromission et vise à orienter les financements des bailleurs vers les OSC sur lesquelles le gouvernement peut compter en bafouant les droits de l’homme. Une bipolarisation de la société civile savamment créée et habilement entretenue par le gouvernement pour faire passer des lois liberticides et antidémocratiques comme le coup de force du 07 août 2019 à l’Assemblée nationale qui a modifié la loi N°2011-010 du 16 Mai 2011 fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunions et de manifestations pacifiques publiques.

Par cette position regrettable, le gouvernement a choisi délibérément de sortir du cadre de réconciliation et manifeste sa volonté d’être indifférent aux violations massives du fait des pouvoirs publics et aussi son attachement à l’impunité, parce qu’il peut compter sur des personnalités qui ont du mépris pour l’éthique et la moralité au sein de la société civile. Et on peut se permettre de prendre des décisions secrètement dans les ‘’loges’’ et chercher à les imposer à toute une corporation tout comme si le Togo était une propriété des sectes.

Monsieur le Président, Convaincue de l’allure pernicieuse de cet arrêté ministériel, l’ASVITTO vous demande, son abrogation pure et simple. Car il est souhaitable que vous gardiez en tête que l’Eternel « S’est toujours réservé des hommes qui n’ont pas fléchi les genoux devant Baal, et des bouches qui ne l’ont pas baisé », 1Rois 19.18
Recevez, Excellence Monsieur le Président de la République, l’expression de ma considération distinguée.
Pj : arrêté ministériel N°0011/SEDH

M. ATCHOLI KAO M. Essohouna
Cc
Ministre des droits de l’homme
CNDH
G5
OMCT
Médias

Source : www.icilome.com