L’armée togolaise n’est pas assez entrée dans l’histoire ! Cette formulation de forme est empruntée d’un discours de l’ancien président français Nicolas Sarkozy qui plutôt disait que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire ».
Ainsi, s’agissant du Togo, ce serait bien d’ajouter à l’idée l’adverbe positivement pour être au complet. L’armée togolaise n’est pas assez positivement entrée dans l’histoire. Car, les tragiques évènements qui tracent la vie politique de la nation togolaise ont toujours laissé au fil des années, des étiquettes malheureuses sur ce corps de métier, notamment les FAT, forces armées togolaises.
Puis, les années passent sans qu’il ne soit possible de changer le cours de l’histoire et des conceptions. Or, ce n’est pas pour autant des occasions qui manquent.
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Trêve de spéculations ! Il ne s’agit en aucun cas, dans l’idée, d’appeler les FAT à faire un coup d’état pour entrer dans l’histoire, non ! Ceux qui tiennent des discours contraires ont peut-être une raison qui ici, n’est pas la nôtre.
Puisqu’en vérité, il s’agit d’inviter un corps de métier à marquer positivement l’histoire, impacter son pays, œuvrer à sortir de l’esprit des populations togolaises toutes ces pages noires qui font malheureusement son histoire.
Le 13 janvier 1963, c’est à travers un coup d’état que les forces armées togolaises se sont illustrées et immiscées sur la scène nationale et internationale, renvoyant l’image d’un Togo, premier pays a assassiné son premier président démocratiquement élu.
Puis, l’enfer se perpétue. Le 13 janvier 1967, bis repetita, prise de pouvoir par l’armée avec Eyadema ; 05 octobre 1990, répression sanglante d’un soulèvement populaire ; 03 décembre 1991, attaque du gouvernement de la transition démocratique de Me Joseph Kokou Koffigoh ; 05 mai 1992, le carnage de Soudou ; 22-23 octobre 1992, prise d’otage des membres du HCR, Haut Conseil de la République de Mgr Kpodzro ; 23 juillet 1992, meurtre de Tavio Ayao Amorin ; 25 janvier 1993, tragédie de Fréau Jardin sans oublier les massacres de la lagune de Bè en avril 1991 et les tristes souvenirs des mois de février et avril 2005 après la surprenante disparition du général président Gnassingbé Eyadema…la liste est longue.
En effet, la litanie des faits politiques majeurs que retient l’histoire de la République du Togo n’honore pas les FAT. Sur plusieurs tableaux, elles ont toujours été citées en mal. Car, la population togolaise dans sa majorité semble garder une certaine aversion vis-à-vis des hommes en treillis à cause du comportement des « éléments incontrôlés » qui sèment la désolation.
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Le général Eyadema l’a su et, plusieurs initiatives ont été prises pour corriger le tir et retisser les liens. Mais, c’est sans succès. L’époque de réconciliation armée-nation initiée par le président Eyadema après des heures de heurts, n’a absolument rien donné vu que les divisions étaient incommensurables et les blessures, trop profondes. Il fallait bien plus pour recolmater les brèches. Désormais, il faut tout refaire.
Covid-19, et si c’est enfin le moment !
Dans les mesures urgentes de riposte contre la propagation du virus, le Gouvernement togolais a décidé d’un couvre-feu de 20h à 6h. Environ 5000 hommes ont été retenus pour assurer le respect de cette mesure gouvernementale. Et c’est fini ! certains de ces hommes en uniforme croient avoir reçu le permis de la violence.
Au premier jour du couvre-feu, ils se sont déchaînés sans ménagement sur de pauvres populations civiles sans défense, c’est-à-dire, sur des individus qui, à moins qu’ils ne soient des « récalcitrants » selon le terme du ministre de la sécurité Yark Damehame, se trouvent pris ou surpris dans la rue aux heures prévues pour le couvre-feu.
La violence inouïe de ces treillis sur leurs compatriotes a souvent laissé l’opinion nationale, voire internationale sans voix. Espéraient-ils l’occasion pour en découdre avec une population civile de laquelle ils sont issus ? La question reste posée. Mais rien n’est encore perdu pour tout esprit épris de changement car, dans la vie, il y a toujours de réelles chances pour se reprendre et changer.
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En effet, sur plusieurs cieux, en cette difficile période de coronavirus, ce sont les forces armées qui viennent prêter main forte aux médecins qui sont en première ligne de la lutte contre la pandémie. Les exemples sont légion, il faut juste énumérer quelques-uns.
En France par exemple, les forces armées ont été déployées sur tous les fronts face à un ennemi invisible, la pandémie du covid-19. Ils aident les médecins dans le transfert des patients afin d’éviter l’engorgement des urgences hospitalières. En Espagne, les militaires sont présents dans toutes les régions du pays pour transporter les morts, bâtir en temps record des hôpitaux de campagne et désinfecter des bâtiments publics et privés.
En Italie, ils sont nombreux sur tous les fronts. Pas plus loin du Togo, le Ghana, les forces armées se sont mobilisées pour aider les civils à dégager les immondices qui peuvent être sources de contamination de la maladie. Pendant ce temps, au Togo, la population est en courroux contre les forces armées du fait des zélés qui peuplent ce corps et qui excellent dans des violences aveugles et barbares en cette période de crise qui commande l’union.
Alors, pour finir avec cette triste image collée aux Forces armées togolaises qui souvent, se défoulent sur les civils, M. François Boko, ancien officier de la gendarmerie togolaise propose d’« évitez d’utiliser les moyens militaires uniquement sous l’angle coercitif et de contrôle de la population. Optimisez-les plutôt sous l’angle humanitaire afin qu’ils participent à l’effort collectif de lutte contre la pandémie du Covid-19 : opportunité d’une cohésion nationale au Togo ».
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Il a aussi souhaité qu’on « instruise la hiérarchie militaire et celle de l’administration pénitentiaire à établir et exécuter un plan de pulvérisation et d’assainissement des casernes, des établissements pénitentiaires et autres lieux de détention de la police judiciaire au Togo ». Pourquoi ne peuvent-ils pas aider à désinfecter les marchés et autres espaces publics dans le pays, sans oublier les zones à forte concentration les jours ouvrés ?
D’ailleurs cela répond bien aux dispositions de l’article 149 de la Constitution Togolaise qui donne plein droit à l’armée d’accomplir les travaux d’utilité publique. Se faisant, les éléments de la police, de la gendarmerie ou de l’armée auront du prix aux yeux des Togolais.
En somme, l’idée reste noble et peut valablement contribuer à regarder autrement que méchamment les Forces armées togolaises. Ce serait aussi l’occasion pour les treillis de se faire tant soit peu pardonner par un peuple qui se sent souvent méprisé et martyrisé pour ses envies de liberté et de démocratie. Ainsi, l’on parlera d’une armée utilitaire, d’une armée du peuple, une armée au service du peuple. Aussi ne cesserait-on de le dire, l’armée qui sait manier et le bâton et la carotte, c’est-à-dire jouer sur la pédagogie avant la sanction est plus respectée.
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Au demeurant, aux FAT, les populations togolaises ne leur demandent qu’une chose : le respect des dispositions constitutionnelles qui régissent leur profession. Article 147 de la Constitution : « Les Forces armées togolaises sont une armée nationale, républicaine et apolitique… ». C’est dire que l’image des hommes en tenue qui criaient un coup K-O lors de la dernière campagne présidentielle, cette image doit en réalité faire pitié et, à partir du moment où l’on opte pour le professionnalisme, elle ne sera désormais qu’un mauvais souvenir.
C’est une certitude que les Forces armées togolaises jouent un grand rôle dans la protection et la défense du territoire national, une mission ô combien difficile et compliquée qui mérite respect et encouragement de la part des populations. Cependant, il ne reste qu’à l’armée de soigner au mieux, ses relations avec les civils. En réalité, c’est de ça qu’il s’agit. Alors, Forces armées togolaises, voici venue l’heure du changement pour tous !
La Manchette
Source : Togoweb.net