5 février 2005-5 février 2020 : 15 ans d’Eyadema…sans Eyadema

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Le commun des Togolais ne s’en souvient
sans doute pas, balloté qu’il est par les soucis personnels et politiques,
notamment l’incertitude au sujet de l’issue de l’élection présidentielle du 22
février prochain. Aujourd’hui 5 février 2020, cela fait, mine de rien, quinze
(15) ans jour pour jour que Gnassingbé Eyadema traversait l’autre rive. Autant
de temps après la « catastrophe nationale», quel bilan peut-on
établir en terme de démocratie et de bonne gouvernance, les deux vertus que les
Togolais étaient en droit d’espérer avec le fils qui a été à l’école des
Blancs ?

L’espoir d’un
lendemain meilleur

Le 5 février 2005, c’était un samedi,
personne ne s’attendait à cette nouvelle. L’annonce à la nuit tombée de la mort
de Gnassingbé Eyadema, au pouvoir depuis 1967, intervint comme un coup de
tonnerre dans un ciel serein. Difficile à croire d’autant plus que le commun
des Togolais ne le savait pas malade. D’ailleurs la légende racontée dans la
bande dessinée « Il était une fois
Eyadema »
dit qu’il n’est jamais tombé malade de toute sa vie, sauf
une petite dysenterie chopée durant son adolescence  qu’il a d’ailleurs vite vaincue. L’homme avait
même une image d’immortel, dans la mémoire collective formatée par le régime
durant les années de culte de la personnalité…C’était la stupeur générale. Dans
les rues de certains quartiers, des gens qui ont appris la nouvelle de passage
se sont mis à courir, comme poursuivis par son fantôme. Tout le monde retenait
son souffle, devant l’incertitude sur ce qui pourrait arriver. Très vite, les
accapareurs du pouvoir sont montés en scène pour faire ce qu’ils ont fait,
installer Faure Gnassingbé sur le trône. S’en sont suivis le tripatouillage de
la Constitution pour habiller le coup d’Etat, le tollé général et leurs
suites…Faure Gnassingbé se retira du pouvoir pour y revenir par les urnes…

Passé cette période un peu mouvementée, le
commun des Togolais, même si c’était à contrecœur, avait décidé de donner du
temps à Faure Gnassingbé de faire ses preuves pour le juger à l’œuvre. Son avènement
au pouvoir a suscité à partir d’un moment, un brin d’espoir au sein de la
population. Le seul fait qu’il soit civil, instruit à l’école des Blancs, au
contraire de son défunt père, donnait une certaine espérance à nombre de
Togolais qu’il pourra mieux faire. Ils croyaient que la démocratie connaitrait un
meilleur sort sous son règne, la gouvernance serait meilleure. Bref toutes les
conditions étaient réunies pour qu’il fasse mieux et oublier son défunt père.
L’adage le dit d’ailleurs, le fils qui n’est pas capable de faire mieux que son
papa, n’est pas digne. Le « Prince » avait participé à faire pavlover
les Togolais avec ses propos. L’un des plus retentissents était la fameuse
phrase « Lui c’est lui, moi c’est
moi »,
parlant de son père. Une façon habile de promettre le paradis
sous sa gestion, en tout cas du mieux. Mais à l’épreuve du terrain, hum…

15
ans…d’Eyadema

L’un des traits caractéristiques
d’Eyadema, c’est sa boulimie du pouvoir. Il avait égrainé trente-huit (38) ans
au pouvoir avant de passer la main (sic). S’il n’était pas décédé, sûrement
qu’il aurait continué à régner. Et avec tout ce que l’on connait comme méthode
de gouvernance…

Le commun des Togolais croyait qu’avec son
fils, présenté comme le plus instruit et policé de ses rejetons, qui plus est a
fréquenté chez et avec les Blancs, les choses allaient être autrement. On était
loin d’imaginer que l’envie de s’accrocher au pouvoir passera même par la tête
à Faure Gnassingbé qui, d’ailleurs, au début, était très timide et faisait
l’agneau. Mais plus le temps passait, plus il s’enhardissait. En quelques
années seulement, il s’est débarrassé des généraux qui lui ont fait allégeance
et l’ont déposé (sic) sur le trône cette nuit du 5 février 2005, a commencé à
créer son empire et fini par montrer aux Togolais sa vraie nature. En 2015,
Faure le démocrate n’a pas hésité à candidater à un troisième mandat, faisant
comme son papa qui évoqua en 2003 la Constitution pour se justifier. On croyait
à un bonus exceptionnel. Mais cinq ans plus tard, voilà le « p’ti » qui est en route pour s’offrir un quatrième
mandat. Avec le goût immodéré qu’il a pour le pouvoir, c’est une illusion de
croire qu’il se retirera en 2025 ou 2030, au terme de son cinquième mandat. Il
aura alors fait vingt-cinq (25) ans de pouvoir. Il est parti sur les traces de
son père.

En termes de gouvernance, le fils aura
montré qu’il n’est pas mieux que le père. Tous les traits caractéristiques de
la gouvernance politique de son géniteur se retrouvent sous son règne à lui.
Assassinats politiques, massacre des populations civiles, y compris même des
enfants, violations des droits de l’homme…tout y est. C’est un millier de Togolais
qui ont été sacrifiés en 2005 afin qu’il monte au trône. Et sous sa régence, il
a continue de fort belle manière la série noire, on tire même sur des enfants,
aux mains nues. Sous Faure Gnassingbé, il ne fait pas bon de revendiquer
l’alternance. Au meilleur des cas, tu te retrouves en prison. Incendie des
marchés, accusation de djihadisme, le « Messi » togolais ne se défend
rien pour  coincer l’opposition. Les
scandales se sont multipliés, écornant l’image du pays à l’international.

Eyadema n’était pas un parangon de vertu.
Faure présenté comme un expert financier, un gestionnaire hors pair, on croyait
à une belle ère pour le Togo. Mais en termes de gouvernance économique, la
situation semble pire que sous son père. Les détournements de fonds existaient
à l’époque, mais ils se faisaient de façon soft. Impossible pour les pilleurs
d’opérer ostentatoirement et afficher leur fortune. Mais aujourd’hui sous le
fils, on vole en plein midi, et des milliards, sans être inquiétés. Les
pilleurs s’affichent même avec leurs fortunes indues. Faure n’a-t-il pas
reconnu tacitement les pillages en 2012 ? Malheureusement, il n’a rien
fait pour mettre fin à la série.

15 ans après la mort d’Eyadema, le Togo
aura régressé de 100 ans en arrière, comme l’avait prédit le
« vieux » lui-même.  Tout ce
qui aura changé depuis lors, c’est juste le petit nom de celui qui préside aux
destinées du pays ; rien de plus. La démocratie et la bonne gouvernance
espérées sont en tout cas restées des mirages…

Tino Kossi

source : Liberté

Source : TogoActu24.com