Pierrot Attiogbé écrit « Lungi, le récit d’une tragédie » à cause de l’absence de grandes commémorations au tour ce drame…

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Pierrot Attiogbé écrit « Lungi, le récit d’une tragédie » à cause de l’absence de grandes commémorations au tour ce drame…

L’un des rescapés du crash d’hélicoptère de Lungi en Sierra Leone qui a coûté la vie à 13 Togolais, Pierrot Attiogbé a dédicacé samedi 3 juin dernier à Lomé à l’occasion du 10ème anniversaire de la commémoration de ce drame, un ouvrage de 200 pages. Dans cet entretien accordé à la Rédaction de « Le Correcteur » en marge de la cérémonie de dédicace, le Directeur de Pyramide Fm revient sur ses motivations, les attentes du public et les grands enseignements qu’on peut tirer de ce drame.

Quelles sont les motivations à l’origine de votre ouvrage ?

Il s’agit fondamentalement d’immortaliser par le biais d’un ouvrage ce que nous avions vécu entre le 2 et le 5 juin 2007 en terre togolaise puis sierra-léonaise par la suite. En réalité, j’ai fait un constat depuis notre retour de la Sierra Leone à la suite de la tragédie que tout le monde connait, les journées du 3 juin sont juste, celles de quelques émissions radios et parfois d’articles de presse. Ces émissions sont certes de précieux temps de souvenirs puisque moi-même j’en ai organisé ou participé plusieurs fois, mais je me suis toujours dit qu’on pouvait aller au-delà. L’absence de grandes commémorations m’a en partie poussé à commencer par écrire ces souvenirs qui ont fini par prendre la forme d’un livre. Autre chose, il y a cette proximité avec une importante partie des victimes. Qu’elles soient de l’administration de la fédération ou simples supporteurs, nous avions en partage le football et le soutien à l’équipe nationale. Faire ce devoir de mémoire m’a paru important.

Pourquoi le titre « Lungi, le récit d’une tragédie » ?

Ce titre renseigne le lecteur sur la localité où s’est produit ce triste événement qu’était la tragédie que le football togolais avait vécu. Je rappelle que 13 Togolais avait péri dans cet accident. Au départ, j’ai voulu donner à ce bouquin, le nom de Olive, une consœur journaliste qui dirigeait Sport FM au moment du drame. Et puis j’ai aussi été tenté par un autre titre ; la catastrophe de Lungi : telle que je l’ai vécue. Mais au final c’est ce dernier titre qui l’a emporté.

Qu’est ce qu’on peut retenir de votre ouvrage ?

Essentiellement le déroulé de notre voyage de Lomé à Lungi puis de Lungi à Freetown. Il s’agit de mon récit de ce périple au sein de la délégation officielle des Eperviers. L’ouvrage en 200 pages présente les différentes phases de ce voyage depuis l’aéroport de Lomé jusqu’à notre retour après l’accident. La découverte de la Sierra Leone, un pays qui venait de sortir de plusieurs années de guerre civile, le match au national stadium de Freetown, la victoire du Togo et le fair-play du public sierra-léonais. Ensuite le retour et le crash de l’hélicoptère. J’ai par moments fait référence à des vécus personnels qui n’ont pas de lien direct avec la tragédie notamment mon entrée dans la corporation des journalistes ou encore mon enfance. On peut aussi retenir de ce bouquin, le témoignage de Me Dodzi Apevon, avocat du collectif des familles des victimes. Son témoignage a repris l’essentiel des conclusions de l’enquête technique. Le livre finit sur un album photo.

Quelles sont vos attentes du public ?

Mes attentes sont celles de toute personne qui a mis sur le marché une œuvre de l’esprit. Je souhaite que les Togolais et au-delà, réserve un bon accueil à cet ouvrage qui en réalité est né d’un amusement. Je ne pensais pas aboutir à l’écriture d’un bouquin mais c’est chemin faisant que je me suis décidé à poursuivre cet exercice. Comme je l’ai rappelé à la cérémonie de dédicace, j’avais juste voulu m’amuser en imitant les écrivains. Les premières phrases, je les avais écrites en 2010. Je voudrais inviter le public à se procurer cet ouvrage dans les librairies et dans certaines stations radios pour marquer tout l’intérêt qu’il a toujours porté à notre sport-roi, le football par des moments de joie ou de peine comme c’est le cas.

Quels sont les grands enseignements qu’on doit tirer de ce drame ?

A mon avis les enseignements s’entremêlent. Il y a eu cet accident probablement parce qu’il y avait eu des menaces qu’on n’a pas su déceler à temps ou qu’on a peut être minimisées. Tout, tourne autour de l’organisation de notre sport. Sur un continent comme l’Afrique, il faut rester attentif aux moindres détails. Il faudrait désormais et je crois que c’est le cas de plus en plus, être plus rigoureux dans l’organisation des déplacements de la sélection nationale et par ricochet l’organisation de tout notre football. Les principaux acteurs doivent mettre devant l’intérêt général en oubliant le plus possible les intérêts personnels. D’où l’idée de la professionnalisation de tout le secteur du football. Même être simple supporteur doit pouvoir induire des droits mais aussi des devoirs. Il en est de même pour la presse sportive et plus généralement toute l’administration du sport. C’est un illustre journaliste sportif togolais qui me confiait souvent qu’en réalité, nous ne devons pas être trop surpris par tout ce qui peut subvenir dans un sport amateur. Dans beaucoup de pays, le sport n’est plus seulement une activité ludique.

A quand le prochain ouvrage ?

J’avoue que l’exercice n’a pas été du tout facile. J’espère pouvoir compter sur les conseils et avis des devanciers pour pouvoir, produire un prochain ouvrage. Dans l’immédiat, il est trop tôt pour prendre un rendez-vous.

Je voudrais finir en disant que beaucoup de Togolais vivent à propos de notre football, une sorte de frustration. Ils sont plus prompts à sauter de joie après une victoire du Real Madrid ou une action de génie de Ronaldo. Les principaux acteurs de notre football ont à mon avis, l’impérieux devoir d’influencer cette tendance qui prend des proportions de plus en plus grandes, en remettant le football national (un tant soit peu) au centre de tous les intérêts sportifs. Ces acteurs sont suffisamment informés de l’amour que les Togolais ont pour leur sélection nationale de football et les clubs de leur quartier ou de leur ville. Je voudrais pour finir, remercier tous ceux qui de près ou de loin m’ont soutenu durant tout ce processus.

Entretien réalisé par Honoré Adontui

Source : Le Correcteur No.764 du 06 juin 2017

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